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ASSURANCE POUR L’APPRENTISSAGE EN PLEIN AIR AU CANADA

Keith Bossaer

Il est toujours passionnant de voir comment tant de Canadiens talentueux peuvent utiliser leurs compétences, leur formation, leur expertise et leur expérience pour permettre à d’autres personnes de profiter des grands espaces. Cependant, les réalités d’une société de plus en plus judiciarisée signifient que l’assurance devrait être une considération essentielle pour la plupart des activités d’apprentissage en plein air. Les questions d’assurance sont rarement abordées assez longtemps à l’avance et bien trop souvent, la couverture d’assurance n’est qu’un pis-aller. Ce chapitre explique les différents termes et les choix à faire en matière d’assurance.

L’une des premières considérations juridiques importantes est de déterminer si une entreprise sera individuelle, une société de personnes, une société à but lucratif ou une société à but non lucratif. Même si cette décision peut sembler relever davantage de votre avocat et de votre comptable, n’oubliez pas qu’une entreprise individuelle ou une société de personnes signifie que la responsabilité et les autres obligations vous incombent directement en tant que personne ou groupe de personnes. Quant à une société par actions, elle maintient presque toutes les obligations au niveau de la société et vous en libère donc personnellement. Il s’agit d’un point crucial, car il est peu probable qu’un plaignant puisse accéder à vos biens personnels si vous êtes constitué en société incorporée. L’assureur devra savoir si vous serez constitué en société ou non.

Responsabilité civile des entreprises

La responsabilité civile des entreprises (RCE) est la première et la plus importante des assurances nécessaires. C’est pourquoi il faut considérer la RCE comme un élément essentiel de votre protection de base en matière de responsabilité civile. L’auteur y fait souvent référence en tant que « la chair et les os » d’une police d’assurance, puisqu’elle s’applique aux incidents de dommages corporels et matériels. En raison de l’augmentation du nombre de poursuites frivoles, une défense juridique contre les demandes d’indemnisation est requise. Pour les véritables litiges qui aboutissent et pour lesquels une négligence peut être établie, l’assurance peut couvrir les pertes financières qui en découlent. La RCE comporte généralement de nombreuses extensions intéressantes au-delà des dommages corporels et matériels, notamment :

  • responsabilité civile pour préjudice personnel et publicitaire (c.-à-d. un préjudice non corporel tel que la diffamation ou la calomnie);
  • produits et opérations achevées (c.-à-d. la couverture des produits vendus ou des projets achevés);
  • responsabilité légale du locataire (c.-à-d. les dommages causés aux locaux loués, même s’il s’agit d’une location d’hôtel à court terme);
  • responsabilité civile automobile non propriétaire (c.-à-d. un véhicule temporairement sous votre contrôle ou utilisé dans le cadre de votre activité professionnelle);
  • responsabilité de l’employeur et responsabilité conditionnelle de l’employeur (au Canada, les régimes provinciaux d’indemnisation des accidents du travail peuvent s’appliquer, mais certaines blessures subies par les employés peuvent ne pas entrer dans le champ d’application);
  • frais de lutte contre l’incendie;
  • pratiques en matière d’emploi;
  • couvertures supplémentaires.

Prenons un exemple imaginaire que nous appellerons les « Randonnées guidées de Marie ». Il s’agissait d’une entreprise individuelle dont les activités avaient connu un essor fulgurant. Pratiquement toutes les excursions de randonnée de Marie atteignaient le nombre maximum de participants et elle était très heureuse de constater que son expérience, sa passion et sa formation portaient ses fruits.

Lors d’une randonnée guidée, une pluie inattendue avait rendu les sentiers légèrement glissants. À un endroit particulièrement escarpé, Marie a glissé, perdu l’équilibre et échappé son téléphone portable. En tentant de le récupérer en plein vol, elle est tombée vers l’arrière sur l’une de ses nombreuses clientes, Samantha. La collision a fait tomber Samantha vers l’arrière sur la seule partie escarpée du sentier, ce qui lui a fait dévaler la pente où elle s’est cogné la tête contre un rocher. Même si initialement, la blessure « ne semblait pas si grave » et que Samantha parlait et confirmait qu’elle « se sentait très bien » et qu’elle avait juste besoin de se reposer, elle a rapidement été prise de nausées et de vomissements, de sorte que le risque d’une lésion cérébrale traumatique a été jugé à la fois effrayant et potentiellement grave.

Malgré une planification de la gestion des risques et des procédures appropriées d’intervention en cas d’accident (toutes ces questions sont abordées dans d’autres chapitres), des accidents peuvent se produire et se produiront. Heureusement, Marie bénéficiait d’une couverture RCE et, par la suite, elle a examiné attentivement sa police d’assurance. Puisqu’elle n’avait pas constitué son entreprise en société, elle a dû s’appuyer sur sa couverture RCE pour financer une défense juridique contre les réclamations découlant de la blessure de Samantha et pour régler tout jugement ou règlement à l’amiable qui pourrait s’ensuivre. Dans ce cas, Marie a été couverte pour les constatations jusqu’à la limite d’un million de dollars, plus les frais de défense. Toutefois, si le montant dépasse sa limite, elle devra payer la différence sur son patrimoine personnel, puisqu’elle n’est pas constituée en société.

L’assurance pour les activités sportives et d’aventure en plein air peut être une couverture d’assurance difficile à obtenir au Canada. Marie a effectivement cherché à obtenir une couverture d’assurance alors qu’elle s’apprêtait à démarrer son entreprise. Elle a contacté les deux courtiers d’assurance avec lesquels elle fait habituellement affaire pour ses produits d’assurance habitation, automobile et santé. Deux semaines après le démarrage de son entreprise, les courtiers n’avaient toujours pas reçu d’offres de la part de compagnies d’assurance, car tous leurs assureurs avaient refusé de les couvrir en invoquant des problèmes quant aux risques encourus en sentier qu’ils n’acceptent pas de couvrir, une nouvelle plutôt étonnante pour Marie : « Ne peut-on pas obtenir une assurance pour ce qu’on veut, quand on le veut? »

Une assurance entreprise n’est pas toujours simple. La disponibilité de l’assurance commerciale tend à passer par des marchés cycliques souples et fixes, mais les besoins en assurance commerciale spécialisée peuvent être encore plus difficiles à satisfaire. Bien que, comme dans le cas de Marie, la randonnée guidée ne soit qu’une activité à risque « modeste », un grand nombre d’autres activités de plein air sont considérées comme à risque beaucoup plus élevé. Les assureurs ont dû faire face à des difficultés considérables sur les marchés de l’assurance, qui ont rendu certaines catégories d’assurance excessivement difficiles ou déraisonnablement chères à obtenir.

Il s’est avéré difficile d’obtenir une couverture pour une longue liste d’activités. Les exploitants de services de guide et de location ont eu du mal à trouver une couverture pour les véhicules tout-terrain motorisés, la location de bateaux ou de véhicules nautiques à moteur et les activités non motorisées de randonnée, de vélo, de tyrolienne, de parachute ascensionnel, de vol à voile, de rafting, d’escalade et d’alpinisme. Les sports de contact, les sports organisés, les courses et les épreuves de vitesse de tous types ont dû redoubler leurs efforts pour trouver une couverture au cours des dernières années. Les ventes de divers produits et activités sportives ont également fait face à des défis difficiles en raison de la fréquence des blessures et, dans le cas des vélos électriques, du risque d’incendie des batteries en cours de chargement. Malheureusement, il n’est pas toujours possible d’obtenir une couverture d’assurance aux taux et conditions envisagés par les clients sans limitations restrictives.

La bonne nouvelle est qu’au Canada, certains assureurs, agents généraux, mandataires de contrats Lloyds et courtiers spécialisés se sont mobilisés pour tenter de répondre aux besoins des consommateurs dans ce marché difficile. Les chefs d’entreprise qui cherchent des options de couverture sont bien avisés de poser des questions similaires sur leur couverture à leurs fournisseurs d’assurance. Dans la plupart des cas, les couvertures au Canada sont offertes par un fournisseur spécialisé, mais il peut être difficile d’y avoir accès sans l’aide d’un courtier bien informé. La bonne nouvelle, c’est qu’un courtier qui connaît bien les marchés devrait être en mesure d’accéder à ces fournisseurs spécialisés.

Exclusion des participants

Pour en revenir à la situation de Marie, elle a trouvé un courtier d’assurances renseigné qui était plus au fait des aspects commerciaux que son assureur habituel grâce à une rapide recherche sur Internet, et celui-ci lui a permis d’accéder aux marchés spécialisés. Il a trouvé deux solutions en l’espace d’une semaine par l’entremise d’agents généraux. Cependant, Marie doit maintenant apprendre le nouveau jargon de l’assurance. Les deux nouveaux devis insistent sur le fait que les avis d’exonération de responsabilité doivent être utilisés et signés par les participants. Les devis vont comme suit :

  1. limites RCE optionnelles de 1 million, 2 millions ou 5 millions de dollars;
  2. mêmes limites que ci-dessus, mais primes réduites de 40 % grâce à une disposition supplémentaire d’exclusion des participants.

Toutes les exclusions de la police sont d’une importance vitale et doivent être bien comprises par l’acheteur de l’assurance. L’exclusion des participants consiste à ne pas couvrir les personnes qui participent à l’activité d’aventure. Il est évident qu’il est dans l’intérêt de l’acheteur d’éviter ces exclusions lorsque possible. Toutefois, les assureurs peuvent considérer ces activités comme trop dangereuses et estimer que des blessures se produiront occasionnellement dans ce type d’entreprise. Par conséquent, ils refusent tout simplement de défendre ou de payer les réclamations de cette nature lorsqu’elles découlent d’une blessure dont le participant est responsable.

Quelle est la couverture suffisante?

L’une des questions les plus fréquemment posées est « Quel niveau de responsabilité dois-je assumer? » La réponse est simple : autant que vous pouvez raisonnablement vous le permettre compte tenu des résultats possibles des activités entreprises. Des limites plus élevées sont certainement préférables, mais seulement si elles sont réalisables, raisonnables et abordables pour le fonctionnement et le budget de l’entreprise. Malheureusement, des incidents extrêmement horribles se produisent parfois, et pratiquement aucune limite de couverture n’est susceptible d’être suffisante.

Les grands plaisirs de la vie en plein air s’accompagnent d’un certain degré de risque. Malheureusement, dans de rares cas, des conséquences négatives peuvent en résulter et, bien que la fréquence et la gravité des conséquences négatives n’aient pas changé au cours de l’histoire, la société est devenue de plus en plus procédurière, avec des conséquences sans précédent pour ceux qui peuvent être considérés comme ayant un certain degré de responsabilité. Une personne peut être tenue responsable même si elle n’a commis qu’une légère négligence. Dans certaines situations, en cas de responsabilité stricte, si la partie lésée ne peut pas obtenir réparation auprès des autres défendeurs, l’opérateur peut alors être déclaré entièrement responsable! Soyez prudent et prenez en compte ces couvertures d’assurance supplémentaire.

Frais médicaux

Un petit montant pour les frais médicaux est souvent inclus dans la plupart des RCE. Les plafonds de garantie sont généralement peu élevés (25 000 $ ou 50 000 $) et peuvent comporter un petit plafond de 2 500 $ ou 5 000 $ par personne. Vérifiez que cette couverture s’étend aux participants eux-mêmes et pas seulement aux tiers. La meilleure partie de la couverture médicale est qu’elle s’applique normalement indépendamment de la faute et/ou des exonérations signées.

Décès et mutilation accidentels

Une police d’assurance décès et mutilation accidentels (DMA) est très similaire à la couverture des frais médicaux dont il a été question plus haut. En général, il s’agit d’une couverture supplémentaire facultative en dehors de la RCE, mais elle peut être assortie de limites de couverture. La couverture s’applique malgré les exonérations signées, mais les limites de la couverture sont généralement modestes, généralement 25 000 $ ou 50 000 $. Les seules pertes couvertes sont celles spécifiquement indiquées dans le tableau fourni par le courtier d’assurance.

Organismes sans but lucratif au Canada

Au Canada, les organismes à but non lucratif, tels que les clubs de plein air et autres groupes communautaires ou d’intérêt, ont besoin de la même couverture d’assurance RCE que ceux à but lucratif. Les provinces, les villes, les municipalités et les propriétaires fonciers se déchargent de plus en plus de leur responsabilité sur les organismes à but non lucratif et les autres parties impliquées dans la prestation de services de loisirs en plein air et d’autres services de loisirs. Même si elles ont besoin de l’aide des organismes à but non lucratif pour élargir et approfondir les possibilités offertes aux citoyens, les collectivités locales sont tout de même ravies de se décharger de leur responsabilité. Les organismes à but non lucratif devront donc chercher une couverture d’assurance adaptée, au même titre que les organismes à but lucratif.

Responsabilité des administrateurs et des dirigeants

En plus de la RCE, les organismes à but non lucratif et les organismes à but lucratif doivent souscrire à une police d’assurance pour les administrateurs et les dirigeants afin de protéger les membres de leur conseil d’administration et de la direction. Il ne s’agit pas de la même chose que la garantie RCE qui protège contre les dommages corporels. Lorsqu’une personne accepte de siéger au sein d’un conseil d’administration, elle accepte certaines obligations légales qui peuvent lui incomber personnellement. Elle doit se conformer aux différents niveaux de réglementation et de législation, de l’échelon municipal à l’échelon national en passant par l’échelon provincial. Elle doit avoir à cœur les intérêts de son organisme et veiller à ce que les fonds soient dépensés de manière acceptable. Les risques liés aux pratiques d’emploi doivent être gérés, tels que la discrimination, le licenciement abusif et le harcèlement sexuel. Elle doit éviter les conflits d’intérêts et les transactions personnelles inappropriées. Bien qu’il soit flatteur d’être élu ou sélectionné pour remplir ces fonctions, ce poste peut devenir un risque en l’absence d’une bonne police d’assurance responsabilité civile des mandataires sociaux, car vos actifs personnels sont alors exposés. De nombreuses poursuites en responsabilité civile des entreprises finissent par être rejetées, mais la défense peut prendre des années et être très coûteuse. Les polices d’assurance responsabilité civile des mandataires sociaux sont souscrites sur la base des réclamations, ce qui est souvent différent des polices d’assurance responsabilité civile des entreprises. En simplifiant à l’extrême, la police ne couvrira que les « réclamations faites » pendant la durée de la couverture. Il convient donc de maintenir les polices d’assurance responsabilité civile des entreprises actives, d’éviter les retards de paiement et de continuer à renouveler les polices même après la cessation des activités de l’organisme. Demandez à un courtier d’assurance de vous expliquer en détail cette couverture et ses limites.

Erreurs et omissions professionnelles

Pour de nombreuses professions, y compris celles liées à l’apprentissage en plein air, il vaut la peine d’envisager la couverture des erreurs et omissions. Ces contrats peuvent toutefois être coûteux, car les professionnels sont exposés à des risques plus importants que ceux couverts par une simple police RCE, tels que les fautes professionnelles et les actes d’omission ou de commission. Plus la formation d’une personne est spécialisée et plus les affiliations et certifications professionnelles qu’elle détient sont nombreuses, plus la norme à laquelle cette personne peut être soumise en termes de responsabilité est élevée et plus il est probable qu’une police d’assurance erreurs et omissions soit nécessaire.

Autres couvertures

Bien qu’elle soit largement simplifiée dans ce chapitre, la couverture d’assurance varie considérablement. Selon le type d’entreprise exploitée, il peut être prudent d’ajouter une couverture supplémentaire. La couverture peut être étendue aux biens et bâtiments commerciaux, aux besoins en équipement et aux cyberattaques ou violations de données. Si les entreprises de plein air ne peuvent pas obtenir des limites de responsabilité suffisamment élevées, des polices de responsabilité excédentaire ou parapluie peuvent être nécessaires. Enfin, une autre différence majeure au Canada par rapport aux États-Unis est que la couverture des accidents du travail est assurée par l’indemnisation provinciale des accidents du travail. Toutefois, une entreprise peut également souhaiter obtenir une couverture pour les employés occasionnels. Demandez des explications à votre courtier.

À propos de l’auteur

Keith Bossaer

Oasis Outdoor Adventure & Sport Insurance Solutions Inc.

Keith Bossaer est le fondateur d’Oasis Outdoor Adventure & Sport Insurance Solutions Inc, un agent général national et un mandataire de contrats de Lloyds. Il a passé plus de 35 ans dans le secteur de l’assurance et s’est spécialisé dans les assurances spécialisées au cours des vingt dernières années. En aidant des dizaines de milliers de Canadien.ne.s à créer des entreprises dans les activités sportives de leur choix, tout en s’adonnant à leurs passions, il a mené une carrière extrêmement gratifiante qui lui a permis d’observer la croissance et l’essor de ces secteurs d’activité.

 

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L’article Assurance pour l’apprentissage en plein air au Canada (2024), par Keith Bossaer, est distribué sous la licence Creative Commons Attribution – Pas d’utilisation commerciale – Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, sauf indication contraire.

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L’apprentissage en plein air au Canada Droit d'auteur © par Simon Priest; Stephen Ritchie; et Daniel Scott est sous licence License Creative Commons Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, sauf indication contraire.

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