Chapitre 6 – Écrire des synthèses

Objectifs d’apprentissage
  • Caractériser différents types de synthèse
  • S’exercer à compiler de l’information à partir d’un petit corpus de textes dans une démarche d’addition
  • Écrire des synthèses explicatives et des synthèses biographiques
  • Vérifier la cohérence temporelle dans une synthèse écrite à partir de plusieurs sources (en particulier quand il s’agit d’une biographie)
  • Utiliser efficacement les compléments circonstanciels en tête de phrase ainsi que les compléments appositifs devant le noyau du sujet pour créer une progression thématique riche
  • S’exercer à faire du relevé lexical et phraséologique
  • Revoir l’utilisation des pronoms relatifs composés

1. Introduction

On trouve dans l’écriture de synthèses la même diversité de démarches et de finalités que dans l’écriture de résumés. De quels genres de textes part-on : articles de presse, rapports, articles savants, etc. ? Quel traitement est donné au sujet dans les textes : explication, argumentation, description ? Les différents textes qu’on utilise vont-ils tous dans le même sens, auquel cas la synthèse sera une espèce de compilation additive ou présentent-ils des analyses, des points de vue opposés, auquel cas la synthèse visera plutôt à mettre en lumière les différences de points de vue ? Et quelle est la visée de la synthèse au-delà de l’exercice de rédaction ? Comme dans les chapitres précédents sur le résumé, nous chercherons à donner une réalité discursive aux synthèses produites par des mises en situation.

 

2. La synthèse : quelques notions théoriques

2.1 Mises au point terminologiques : synthèse, synthétique, synthétiser

On oublie parfois de s’appuyer sur la racine et les affixes (préfixes et suffixes) d’un mot pour en analyser le sens. Dans le mot synthèse (et ses dérivés), on trouve l’élément grec syn-, qui signifie « avec », « ensemble » (pensez à symphonie, synergie, syntaxe, syntagme…) et thesis, également du grec, et renvoie à ce qui est posé, affirmé dans le discours.

Si vous lisez maintenant l’article synthèse dans le Petit Robert[1] (PR), vous verrez que celui-ci propose un découpage des sens plus complexe que ce à quoi on pourrait s’attendre. La première grande division oppose l’action à son produit :

I. Opération qui procède du simple au composé, de l’élément au tout.

II. Ensemble constitué par les éléments réunis ; résultat d’une synthèse (I).

On retrouve ici la même opposition qu’entre résumer (opération) et résumé (produit de l’opération de résumer). Il est important de bien percevoir cette dualité : on synthétise constamment de l’information, mais un texte résultant de cette opération mentale n’est pas toujours ce qu’on appelle une synthèse.

Revenons à la synthèse comme opération (regroupement I dans le PR) : le PR divise l’opération entre la démarche générale et son application à des objets spécifiques :

A. Activité de l’esprit sur des objets de pensée.

B. Fusion, réunion d’éléments concrets ou abstraits en un tout.

Du point de vue de l’opération mentale, c’est ce travail de fusion, de réunion d’éléments en un tout qui nous intéresse dans ce chapitre : pour fusionner, pour réunir, il faut déterminer quelles sont les relations entre les morceaux d’information qu’on cherche à réunir. C’est cette analyse qui guidera le travail concret de production d’un texte de synthèse.

L’adjectif synthétique, pour sa part, renvoie et à l’opération (ex. : un esprit synthétique est un esprit qui sait construire une vision globale à partir des morceaux) et au produit (ex. : un exposé synthétique dégage l’essentiel en mettant en lumière les relations entre les éléments).

Le verbe synthétiser, quant à lui, désigne l’action soit comme opération mentale, soit comme opération concrète portant sur un ensemble de textes. Lorsqu’il désigne l’opération mentale, il concerne aussi bien le résumé que la synthèse.

 

2.2. La démarche synthétique appliquée au résumé et à la synthèse

Souvenons-nous que la démarche mentale pour produire un résumé est double :

  • analyse en premier, c’est-à-dire décomposition du texte en ses constituants, recherche de l’idée centrale de chaque paragraphe (ou de chaque section ou chapitre dans des textes plus longs)
  • synthèse en second, c’est-à-dire recomposition, réunion dans un tout plus simple, plus évident : la synthèse construit une nouvelle organisation de l’information où les liens structurels sont mis en évidence

Synthétiser à partir de plusieurs sources, plusieurs documents, c’est également construire un nouvel ensemble d’informations selon une démarche alliant analyse et synthèse :

  • analyse, c’est-à-dire comparaison et confrontation pour faire ressortir la complémentarité et les différences
  • synthèse, c’est-à-dire réunion additive (complémentarité) ou différenciatrice : la synthèse construit un nouveau texte offrant un tout plus grand par addition ou différenciation

L’organisation de l’information consiste à créer un plan additif ou oppositif, selon les quatre opérations suivantes : sélection, regroupement, hiérarchisation et ordonnancement.

 

À retenir, à appliquer :
Pour effectuer la synthèse de plusieurs textes, il est primordial de déterminer quelles relations s’établissent entre les informations fournies dans les différents textes : y a-t-il simplement accumulation (addition) de données ou y a-t-il des points de vue différents qui s’opposent ? Entre des textes strictement informatifs, le rapport sera davantage de l’ordre de l’addition ; entre des textes analytiques, on aura plus facilement des points de vue divergents.

 

3. La synthèse comme texte

3.1 Le texte de synthèse : une question de contexte

Tout comme on peut distinguer différents types de résumé (résumé-contraction scolaire, résumé analytique, compte rendu…), on peut distinguer différents types de textes de synthèse.

La synthèse comme exercice scolaire varie selon les disciplines et les niveaux scolaires. Dans un programme de commerce, de comptabilité, d’administration, par exemple, on s’exercera à produire des bilans en tous genres. Dans les domaines technique et scientifique, on s’exercera à la rédaction de rapports d’expérimentation, de faisabilité et de recherche. Enfin, toutes les recherches scientifiques impliquent la rédaction d’études; la thèse de maîtrise ou de doctorat comporte une démarche synthétique : synthèse des recherches/expériences préalables (état de la question, revue de la littérature) et synthèse de sa propre recherche, sa propre expérimentation et réflexion. Dans le cadre d’un cours de rédaction générale, on fabrique des exercices de synthèse ne reposant pas sur un corpus de données trop riche ou trop spécialisé, mais permettant un travail de synthèse sur les plans cognitif (de cognition, c’est-à-dire la pensée) et linguistique.

La synthèse comme document professionnel ou scientifique couvre les rapports, études, bilans et fiches de synthèse en tous genres, notamment les notes de breffage. La fiche de synthèse est d’ailleurs un genre fondamental dans les études comme au travail : des notes de cours, de stage ou de lecture, par exemple, sont plus utiles sous forme synthétique que chronologique.

 

3.2 La synthèse selon la visée et le destinataire

Une synthèse n’est pas écrite de la même façon selon qu’on la fait pour soi ou pour d’autres lecteurs, selon qu’on l’écrit comme trace d’un ensemble de connaissances, comme outil didactique ou comme outil de travail à part entière.

Prenons l’exemple des textes encyclopédiques, qui sont tous, par définition, synthétiques. Ils varieront du tout au tout selon qu’ils s’adressent à des spécialistes ou au grand public, à des personnes savantes ou à des personnes peu éduquées, à des adultes ou à des enfants.

L’écriture d’une synthèse, quelle qu’elle soit, demande donc en premier lieu qu’on précise la situation de communication : à quel titre écrit-on, dans quel but et pour qui ?

 

4. Mandat et cadre de production

Depuis les premiers chapitres, nous avons visé à inscrire les tâches de rédaction dans des situations de communication possibles au-delà de l’exercice strictement scolaire. Orienter l’écriture vers une finalité réelle (même fictive) permet de faire des choix discursifs, stylistiques, structurels ancrés dans une représentation concrète de destinataires fictifs qui ne sont pas uniquement votre professeure.

Dans les applications qui suivent, nous nous servirons des termes mandat d’écriture et cadre de production pour définir les situations de communication. Un mandat, c’est ce qu’une cliente, une patronne vous confie comme travail. L’utilité du terme pour la rédaction, c’est qu’il aide les deux parties (dans notre cas, le professeur et l’étudiant) à vérifier que tous les paramètres de l’écriture sont bien définis. Dans un mandat d’écriture professionnel, on précisera entre autres le tarif, l’échéance, les pénalités de retard. Dans un travail scolaire, on précisera les critères d’évaluation, le barème de correction, etc. Certains paramètres s’appliquent autant à un texte scolaire que professionnel : longueur et date de remise, notamment.

Le mandat, c’est donc plus que le sujet; c’est toutes les « obligations contractuelles » que le texte doit remplir. Or, tant dans le monde professionnel qu’à l’université, les mandats ne sont pas toujours clairs : quelle est la longueur, qu’est-ce qui le plus important, quelle liberté a-t-on… ? Aborder la tâche comme un mandat permet de valider que toutes les instructions nécessaires sont fournies, que tous les paramètres sont définis. Trop souvent, des rédacteurs et des étudiants se font dire, une fois leur travail remis, que le texte ne correspond pas à ce qui était demandé. Mais les attentes étaient-elles clairement formulées ? C’est à la rédactrice, à l’étudiante de s’assurer qu’elle a en main des instructions complètes et claires.

Pour qu’un mandat d’écriture soit complet, il faut que le cadre de production soit clair. À quel titre la personne qui écrit le texte l’écrit-elle ? Comme expert, comme personne en position d’autorité, comme témoin ? Comment le texte va-t-il être utilisé, à quoi au juste servira-il ? Définir le cadre de production, c’est définir ces paramètres, qu’on ne peut pas toujours inférer à partir des indications générales.

 

5. Applications

Les sujets de rédaction qui vous sont proposés ci-dessous appellent tous trois une démarche de synthèse d’ordre additif. Il ne s’agit pas de confronter des descriptions, des analyses divergentes, mais de rassembler des informations venant de différentes sources au sein d’un nouveau texte.

Votre professeur vous donnera peut-être ensuite un sujet demandant une démarche comparative ou oppositive plutôt que simplement additive.

5.1 Application n° 1 : synthèse sur le haïku

Rédaction balisée

MANDAT D’ÉCRITURE

Écrivez un texte de synthèse de 350 à 400 mots sur le haïku pour un manuel de français de 10e année. Présentez votre texte dans un encadré. Découpez-le en trois ou quatre sections, qui auront chacune leur sous-titre. Donnez un titre accrocheur à votre synthèse.

Étapes à suivre

  1. Trouvez sur Internet trois documents intéressants sur le haïku. Assurez-vous que vos documents no 2 et no 3 ajoutent quelque chose par rapport au premier. Vous pouvez bien sûr inclure la page de Wikipédia dans vos trois sources.
  2. Écrivez correctement, selon le modèle APA(6e édition), les références de vos trois sources. Aidez-vous du guide de la bibliothèque de l’Université de Montréal, « Citer selon les normes de l’APA », en particulier la section 8. Pages Web / Documents sur Internet, de la page « En bibliographie (Modèles) »[2].
    Sous votre référence, en retrait et en caractères plus petits pour distinguer de la référence même, écrivez une annotation sur l’intérêt de cette source pour faire votre synthèse.

Exemple :

 

  1. Recopiez vos trois textes dans un document MS Word. Annotez-les pour sélectionner de l’information en vue du mandat de rédaction donné ci-dessus.
  1. Écrivez le plan de votre texte selon le modèle suivant :

Titre provisoire : [ ]

Intro provisoire : [situer le haïku au sein de la poésie et donner une définition

Sous-titre 1 : [ ]

Sous-titre 2 : [ ]

Sous-titre 3 : [ ]

  1. Écrivez votre synthèse en ayant bien à l’esprit votre visée : présenter le haïku à des élèves de 10e année afin de leur faire apprécier cette forme de poésie. N’oubliez pas que certains d’entre eux auront déjà découvert le haïku plus tôt dans leur cursus scolaire. Vous pouvez vous appuyer sur cette connaissance préalable supposée.
  1. Relisez votre synthèse avec comme objectif d’apporter des modifications qui l’amélioreront. N’hésitez pas à échanger votre copie avec un ou une collègue de classe pour avoir un regard critique. Remettez les étapes 2-5 à votre professeure (ou suivez ses directives si elles sont autres).

Quelques références qui pourront vous être utiles

  • Le haïku (s. d.). Dans Cours autodidactiques de français écrit. Université de Montréal. Repéré à http://www.cafe.umontreal.ca/genres/n-haiku.html
    • Voir en particulier la section 3. Définition et fonction dans la société et la section 4. Origines et postérité.

5.2 Application n° 2 : synthèse sur le patrimoine culturel immatériel

Réflexion pré-écriture
Savez-vous ce qu’est le patrimoine culturel immatériel ? Donnez-en une définition écrite à partir de ce que vous en connaissez ou, à défaut, en faisant une paraphrase définitoire du terme.

Rédaction

MANDAT D’ÉCRITUREÀ partir des deux textes reproduits ci-après et d’au moins une autre source (vous pouvez utiliser les trois références qui suivent les deux textes reproduits), construisez un texte original de 250 à 300 mots qui présente BIEN ce qu’est le patrimoine culturel immatériel et ses enjeux.

Précisions sur le cadre de production
Vous vous adressez à des gens instruits, au Canada. Donnez un ancrage canadien (au moins minimal) à votre texte. Votre texte aura une visée encyclopédique : il vise à faire connaître le concept, l’intérêt du patrimoine immatériel et les enjeux qui s’y rattachent.

Consignes et conseils

Réfléchissez bien à votre plan de synthèse AVANT de rédiger. Comme vous ne présenterez pas l’ensemble de l’information proposée dans les documents, il vous faudra construire une nouvelle démarche explicative en réorganisant l’information. Utilisez de l’information venant d’au moins trois textes.

Produisez un plan écrit de votre texte. Intégrez-le dans le travail que vous remettrez (le cas échéant). Confrontez votre plan à votre texte quand vous aurez fini celui-ci; faites les changements appropriés soit dans le plan, soit dans le texte.

Donnez les références bibliographiques pour tous les textes que vous utiliserez (ceux proposés ci-après et tout autre texte dont vous vous serez servi).

Limitez les citations directes. Préférez la paraphrase, sauf, par exemple, pour une définition venant d’une autorité (l’Unesco, par exemple) ou pour un commentaire fort venant d’un intervenant important.
Certains éléments explicatifs généraux, qui peuvent se répéter dans plusieurs textes, n’ont pas besoin d’être attribués à une source particulière : vous n’êtes pas en train d’écrire un travail de recherche ou d’analyse pour un cours de sociologie ou autre, mais un texte d’information générale, lequel, avec les adaptations pertinentes, pourrait trouver sa place dans une encyclopédie, un manuel scolaire, un magazine. Ce genre de texte ne donne pas systématiquement de références sur la sources des idées (qu’il soit bien clair que l’absence d’attribution des idées aux différentes sources ne s’applique pas à la rédaction de vos travaux de recherche et notes de lectures de façon générale).

Texte no 1

Qu’est-ce que le patrimoine culturel immatériel[3] ?

Ce que l’on entend par « patrimoine culturel » a changé de manière considérable au cours des dernières décennies, en partie du fait des instruments élaborés par l’UNESCO. Le patrimoine culturel ne s’arrête pas aux monuments et aux collections d’objets. Il comprend également les traditions ou les expressions vivantes héritées de nos ancêtres et transmises à nos descendants, comme les traditions orales, les arts du spectacle, les pratiques sociales, rituels et événements festifs, les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers ou les connaissances et le savoir-faire nécessaires à l’artisanat traditionnel.

Bien que fragile, le patrimoine culturel immatériel est un facteur important du maintien de la diversité culturelle face à la mondialisation croissante. Avoir une idée du patrimoine culturel immatériel de différentes communautés est utile au dialogue interculturel et encourage le respect d’autres modes de vie.

L’importance du patrimoine culturel immatériel ne réside pas tant dans la manifestation culturelle elle-même que dans la richesse des connaissances et du savoir-faire qu’il transmet d’une génération à une autre. Cette transmission du savoir a une valeur sociale et économique pertinente pour les groupes minoritaires comme pour les groupes sociaux majoritaires à l’intérieur d’un État, et est tout aussi importante pour les pays en développement que pour les pays développés.

Le patrimoine culturel immatériel est :

  • Traditionnel, contemporain et vivant à la fois: le patrimoine culturel immatériel ne comprend pas seulement les traditions héritées du passé, mais aussi les pratiques rurales et urbaines contemporaines, propres à divers groupes culturels.
  • Inclusif : des expressions de notre patrimoine culturel immatériel peuvent être similaires à celles pratiquées par d’autres. Qu’elles viennent du village voisin, d’une ville à l’autre bout du monde ou qu’elles aient été adaptées par des peuples qui ont émigré et se sont installés dans une autre région, elles font toutes partie du patrimoine culturel immatériel en ce sens qu’elles ont été transmises de génération en génération, qu’elles ont évolué en réaction à leur environnement et qu’elles contribuent à nous procurer un sentiment d’identité et de continuité, établissant un lien entre notre passé et, à travers le présent, notre futur. Le patrimoine culturel immatériel ne soulève pas la question de la spécificité ou de la non-spécificité de certaines pratiques par rapport à une culture. Il contribue à la cohésion sociale, stimulant un sentiment d’identité et de responsabilité qui aide les individus à se sentir partie d’une ou plusieurs communautés et de la société au sens large.
  • Représentatif : le patrimoine culturel immatériel n’est pas seulement apprécié en tant que bien culturel, à titre comparatif, pour son caractère exclusif ou sa valeur exceptionnelle. Il se développe à partir de son enracinement dans les communautés et dépend de ceux dont la connaissance des traditions, des savoir-faire et des coutumes est transmise au reste de la communauté, de génération en génération, ou à d’autres communautés.
  • Fondé sur les communautés : le patrimoine culturel immatériel ne peut être patrimoine que lorsqu’il est reconnu comme tel par les communautés, groupes et individus qui le créent, l’entretiennent et le transmettent ; sans leur avis, personne ne peut décider à leur place si une expression ou pratique donnée fait partie de leur patrimoine.

Texte no 2

N.B. : Soyez bien conscient que le texte ci-dessous a été écrit dans un contexte québécois et que ce qui porte spécifiquement sur le Québec ne sera pas pertinent pour votre synthèse.

Enjeux du patrimoine immatériel[4]

La déclaration d’Istanbul (septembre 2002) et, un an plus tard la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (octobre 2003) sont venues confirmer la position de plusieurs pays membres de l’UNESCO quant à la reconnaissance formelle du patrimoine culturel immatériel comme vecteur de l’identité culturelle des peuples et assise à la diversité.

Contexte de mondialisation

Facteur vital de l’identité et de la diversité des peuples, le patrimoine immatériel représente, dans le contexte de la mondialisation, un atout de taille pour lutter contre la tendance à l’uniformisation et à la banalisation des cultures. En soi, la mondialisation n’a pas que des effets pervers, bien au contraire. Elle est aussi une formidable occasion pour les peuples de s’ouvrir au monde et d’accéder à des marchés autrefois inaccessibles. S’insérer dans la mondialisation, ce n’est pas perdre sa différence mais la cultiver.

Cette différence est fortement identitaire. Les cultures étant constituées de multiples identités individuelles et collectives, l’identité dont il est question ici n’est pas singulière mais plurielle. L’exemple du Québec est fort éloquent. La société québécoise, en effet, s’est formée au cours des siècles au contact des nombreuses communautés, autochtone, francophone, anglophone, italienne, grecque, asiatique et autres, qui ont habité, développé et modelé le pays.

Si pendant longtemps l’identité a été définie par rapport à soi, à partir de ses propres traditions, elle est de plus en plus considérée comme découlant aussi de l’Autre, c’est-à-dire d’emprunts faits à d’autres cultures. C’est ce que certains spécialistes appellent le « métissage des cultures ». La diversité culturelle est désormais perçue comme une source d’innovation, de créativité et de richesse économique.

Cette diversité se manifeste dans la vie sociale et économique des villes et des campagnes. Elle se découvre à travers des pratiques « portées » par des hommes et des femmes, des individus et des groupes, qui en sont les détenteurs et les agents de transmission. Dans ce contexte, le citoyen (ou le groupe) est considéré comme un praticien de la culture dans son milieu. C’est à travers lui, ou à travers le groupe, que ce développe le sentiment d’appartenance au milieu. L’enjeu n’est donc pas que culturel, il est aussi social, la culture de proximité étant un important facteur de cohésion sociale, d’ancrage au territoire.

Développement économique

Le patrimoine immatériel peut aussi servir de levier au développement économique. Il favorise la diversification des économies, donc l’autonomie des territoires. Au même titre que les richesses naturelles, les éléments constitutifs du patrimoine immatériel sont des ressources à développer et à exploiter.

Les ressources du patrimoine représentent un potentiel économique souvent ignoré. Comme pour les richesses naturelles, il importe cependant d’utiliser ces ressources judicieusement, dans une perspective de développement durable. Les savoirs et savoir-faire techniques, scientifiques et artistiques sont autant de potentialités qui peuvent être à la source de projets structurants tant sur le plan national que sur le plan local ou régional.

Le patrimoine culturel immatériel s’inscrit également dans les travaux des gouvernements portant sur la propriété intellectuelle (OMPI) et l’économie du savoir. Il suffit, par exemple, d’évoquer l’énorme potentiel économique que représentent les connaissances ancestrales des autochtones en matière de plantes et d’herbes et leur utilisation en pharmacopée moderne pour comprendre les enjeux qui sont en cause.

Patrimoine immatériel – Innovation et création

Facteur d’identité et de diversité, le patrimoine immatériel est depuis toujours source de créativité. En culture comme en nature, il n’y a pas de génération spontanée. Les pratiques culturelles traditionnelles ont toujours servi de terreau à la création. Qu’il en soit conscient ou pas, c’est le plus souvent son héritage historique et culturel que l’artiste, l’artisan des métiers d’art et d’artisanat, l’entrepreneur artisan de produits du terroir tire son inspiration, trouve son originalité et marque sa différence ou sa spécificité.

La possibilité de produire et de mettre en marché, ici et à l’étranger, des produits de qualité, novateurs, diversifiés, reflétant la spécificité du Québec dépend pour une grande part de la conservation et de la transmission de compétences acquises et développées au cours des générations et transmises dans la communauté d’origine.

 

Autres textes

5.3 Application n° 3 : synthèse biographique (Charles Azanavour) (rédaction balisée)

Comment écrit-on une biographie courte sur une personnalité ? La question est simple, la réponse l’est moins.

Prenons deux monstres sacrés[5] internationaux de la chanson française, que vos grands-mères – et peut-être vous-mêmes – connaissez : Edith Piaf et Charles Aznavour.

Étape 1

Si vous connaissez l’une ou l’autre de ces stars de la chanson, écrivez une courte biographie sur l’une ou l’autre. Sinon, faites l’exercice sur un autre chanteur ou une autre chanteuse française que vous connaissez. Comparez ensuite ce que vous avez écrit avec quelques collègues de classe.

(Rappel : Utilisez Antidote pour trouver les termes nécessaires et des expressions utiles.)

Étape 2

Observons maintenant des biographies courtes tirées de dictionnaires encyclopédiques, de sites sur la chanson française, etc. Par exemple :

 

1. Examinons le premier paragraphe des deux notices suivantes, tirées de l’Encyclopédie Larousse en ligne[6]. Selon le modèle canonique des notices biographiques d’une certaine étendue, le premier paragraphe présente une synthèse de ce qui est jugé le plus significatif :

Édith Giovanna Gassion, dite Édith Piaf

Chanteuse française (Paris 1915-Paris 1963).De son vivant, Édith Piaf s’est attiré tous les superlatifs, tant sa destinée, sa carrière et sa voix ont été exceptionnelles. Transcendant les générations, la force émotionnelle de ses chansons, servies par des textes qui magnifient la langue française, est demeurée intacte.

http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Édith_Giovanna_Gassion_dite_Édith_Piaf/138051

Varenagh Aznavourian, dit Charles Aznavour

Auteur-compositeur et chanteur français (Paris 1924).« J’ai la voix qui colle avec le genre de chansons que j’écris », reconnaît Charles Aznavour dans son autobiographie parue en 1970 (Aznavour par Aznavour, Fayard éditeur). Fils d’Arméniens ayant fui la Turquie, il a fait de cette voix parfois à la limite d’être brisée l’instrument d’un succès qui fut long à se dessiner, comme le rappelle l’une de ses chansons les plus emblématiques, Je m’voyais déjà (1960).

http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Varenagh_Aznavourian_dit_Charles_Aznavour/107001

 

Commentaires sur la structure de l’introduction des deux notices :

a) Domaine d’activité, lieu et date de naissance, et lieu et date de décès (le cas échéant) dans un chapeau.

b) Commentaire de synthèse sur la carrière de l’artiste, sur la portée de son œuvre :

– Édith Piaf: le fait que tout dans sa vie, sa carrière, son œuvre était hors du commun; l’intérêt de ses chansons.

 

 

 

 

 

 

 

– Charles Aznavour: sa voix très particulière (notamment par une citation); son origine (pertinente à cause de son engagement pour l’Arménie); amorce sur sa longue carrière.

2. Observons maintenant une mini-biographie de Charles Aznavour tirée d’un document pédagogique lié à la chanson Comme ils disent sur le site Ces chansons qui font l’histoire, du ministère de l’Éducation nationale de France :

Auteur, compositeur et interprète et comédien, Charles Aznavour est né à Paris en 1924, de parents immigrés arméniens. Il devient dans les années 1960, un artiste incontournable de la musique française malgré des débuts difficiles. Charles Aznavour est un chanteur qui se veut engagé. Dans Comme ils disent il défend et dénonce l’homophobie.

http://chansonsquifontlhistoire.crdp.ac-versailles.fr/chansonsquifontlhistoire/IMG/pdf/comme_ils_disent.pdf[7]

 

Commentaires sur la construction de cette courte biographie :

a) Domaines d’activités mis en relief en apposition devant le nom du chanteur (lequel est le noyau du sujet).

b) Date et lieu de naissance origine en prédicat de la 1re phrase, donc base chronologique (structure confirmée par l’enchaînement chronologique de la 2e phrase : Il devient dans les années 1960…).

c) Portée de sa gloire en prédicat dans la 2e phrase.

d) Deux phrases sur quatre en lien avec la chanson à laquelle la biographie est liée.

3. Observons aussi le début de la biographie du Dictionnaire des noms propres de lintern@ute et l’organisation construite par les sous-titres :

Charles Aznavour
Né à Paris (France) le 22/05/1924

Après des débuts difficiles, Charles Aznavour s’est imposé en haut de l’affiche pour ne plus jamais en redescendre. En France comme à l’étranger, il reste l’un des derniers totems de la chanson française.

http://www.linternaute.com/biographie/charles-aznavour/

 

Commentaires sur l’introduction :

a) Trame temporelle de la carrière développée sur les deux phrases : débuts /s’est imposé / reste.

b) Synthèse très expressive du succès de sa carrière : haut de l’affiche / pour ne jamais en redescendre / un des derniers totems[8] de la chanson française.

 

Organisation construite par les sous-titres dans la suite de la notice :

Les années d’apprentissage[…]

Les débuts difficiles d’une carrière solo

[…]

La reconnaissance internationale

[…]

Encore et toujours en haut de l’affiche

[…]

 

Commentaire sur les sous-titres

Structure qui met en lumière la progression de la carrière en écho avec la trame chronologique de l’introduction.

(Si vous ouvrez la notice, vous remarquerez aussi que les quatre sous-titres, sans être directement des balises chronologiques, permettent une structure totalement narrative dans les quatre sections. Notez aussi la mise en relief par du gras des informations les plus importantes.)

 

4. Pour finir, regardons la section de synthèse en tête de l’article de Wikipédia :

Charles Aznavour […], né Shahnourh Varinag Aznavourian […] le 22 mai 1924 à Paris, est un auteur-compositeur-interprète, acteur et écrivain français d’origine arménienne.

Au cours d’une carrière commencée en 1946, il a enregistré plus de mille deux cents chansons interprétées en plusieurs langues : en français, anglais, italien, espagnol, allemand, arménien (Yes kou rimet’n tchim kidi), napolitain (Napule amica mia), russe1. Il a écrit plus de huit cents chansons, que ce soit pour lui-même ou d’autres artistes2.

Il est l’un des chanteurs français les plus populaires, et le plus internationalement connu. Décrit comme « la divinité de la pop française » par le critique musical Stephen Holden, Charles Aznavour a été consacré « chanteur de variété le plus important du xxe siècle » par CNN et Time devant Bob Dylan, Frank Sinatra et même Elvis Presley. Selon sa maison de disques, il a vendu plus de 180 millions de disques dans le monde3.

Sans renier la culture française ni son appartenance à la France, il représente l’Arménie dans plusieurs instances diplomatiques internationales à partir de 1995, et obtient la nationalité arménienne en 2008. Il est nommé au poste d’ambassadeur d’Arménie en Suisse, son pays de résidence, et le représentant permanent de ce pays auprès de l’ONU.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Aznavour

 

Commentaires sur l’organisation et la progression thématique :

a) Quatre paragraphes :

1) repères biographiques de base (naissance, etc.);
2) l’ampleur de sa carrière par le nombre de chansons;
3) la renommée;
4) l’engagement politique.

b) Début des phrases :

Dans 6 des 8 phrases que contient cette courte synthèse, le sujet ou le noyau du sujet est il (les 2 autres ont pour sujet Charles Aznavour).
Observez cependant par quoi la plupart des phrases commencent: soit des compléments circonstanciels devant le sujet ou encore des compléments appositifs qui font partie du sujet, mais sont antéposés devant le noyau. Ce sont ces éléments en tête qui forment le thème de chacune de ces phrases et construisent la progression thématique. Le pronom il ne constitue l’entièreté du sujet que dans 3 phrases sur 8. (L’enchaînement de deux sujets il entre la fin du 1er paragraphe et le début du 2e peut en fait être considéré comme une double maladresse : l’enchaînement même de ces deux il est un peu faible stylistiquement et surtout, le fait que le 2e il soit en tête de paragraphe et thématise tout le paragraphe est faible du point de vue de la structuration de l’information : le thème du paragraphe n’est-il que ce maigre il ?)

Étape 3

Rédaction d’une notice biographique synthétique

Voici deux mandats d’écriture. Avant de vous y attaquer, faites donc les deux exercices qui suivent cet encadré.

 

  1. Écrivez une notice biographique courte (150-175 mots) selon le cadre suivant :
  • Énonciateur : une ou un professeur de français du secondaire
  • Destinataires : des élèves (10e à 12e année) de français langue seconde en Ontario et au Canada anglais en général
  • Support : un site (encore un !) sur la culture française pour les apprenants de français de votre institution (et de façon plus large pour quiconque est intéressé)
  • Aspects à inclure et proportions : l’engagement autant que la fabuleuse carrière
  • Longueur : de 140 à 160 mots selon le compte de MS Word (pour comparaison, les 4 paragraphes ci-dessus de l’article de Wikipédia font 206 mots selon le compte de MS Word[9]. Attention ! 150 mots, c’est court !

Conseils
a) Trouvez un moyen de rendre Charles Aznavour intéressant pour des jeunes de 14 à 17 ans.
b) Assurez-vous que le système temporel est cohérent dans votre synthèse. Si vous utilisez le présent narratif comme temps de base, faites bien attention à ne pas utiliser le passé composé dans la même valeur:
Charles Aznavour fait ses débuts comme chanteur à… Il * a aussi composé des chansons pour…
N.B. : Même dans un texte écrit au présent narratif, le verbe naître s’écrit généralement au passé composé (aspect résultatif) :
Charles Aznavour est né en… à… Il passe son enfance à… et commence à…

 

  1. Écrivez une notice biographique de 350 à 450 mots selon le cadre suivant :
  • Énonciateur : un rédacteur, une rédactrice culturelle
  • Destinataires : les francophiles canadiens anglais adultes
  • Support : une encyclopédie culturelle pour les francophiles canadiens
  • Aspects à inclure et proportions : les différentes composantes de sa carrière artistique (selon une trame chronologique ou non); des éléments d’analyse, de critique; son engagement social et politique
  • Longueur : de 350 à 450 mots selon le compte de MS  Word (pour comparaison, les 4 paragraphes ci-dessus de l’article de Wikipédia font 206 mots selon le compte de MS Word[10].

Conseils
a) Vous pouvez mettre des sous-titres si vous désirez.
b) Ne noyez pas les lecteurs dans trop de dates et autres données chiffrées.
c) Lisez le conseil b) du sujet 1.

6. Exercices liés à l’application 5.3

 

Exercice n° 1
Désigner et caractériser un chanteur : termes, expressions et périphrases diverses

À partir des lectures que vous ferez pour rédiger votre synthèse (textes ci-dessus, article complet de Wikipédia et autres textes que vous choisirez vous-même), construisez un répertoire de termes, d’expressions et de périphrases[11] diverses pour désigner et caractériser Charles Aznavour. Organisez votre répertoire en tableau avec des sous-catégories en vous servant, si vous le désirez, du modèle de départ ci-dessous; comme il s’agit d’un exercice heuristique (c’est-à-dire de découverte), votre organisation peut être totalement différente : le but, c’est de de suivre une démarche active de recherche lexicale autrement que par un dictionnaire bilingue.Ce répertoire vous aidera à ne pas avoir que des petits il tout nus en sujet et à formuler de façon précise vos prédicats.

La renommée et la carrière Les activités artistiques L’engagement social et politique
monstre sacré chanteur un chanteur qui se veut engagé
star auteur-compositeur dénoncer l’homophobie
vedette parolier
tout au long de sa carrière
une double carrière
l’une des rares vedettes françaises
au faîte de sa gloire

Vous trouverez une version MS Word de cet exercice ici

 

Exercice n° 2
Utiliser les pronoms relatifs composés

Utiliser les pronoms relatifs composés

Les subordonnées relatives sont un moyen de base pour étoffer les groupes nominaux dans la phrase. Le petit exercice qui suit vous invite à revoir l’emploi des pronoms relatifs composés (lequel, auquel, duquel et leurs formes féminines et plurielles). On utilise aussi ces pronoms avec toutes les prépositions autres que à à et de : dans lequel, sur lequel, grâce auquel, en dépit duquel, etc.

Rappelez-vous de bien valider la fonction du pronom relatif dans la subordonnée relative pour choisir la bonne préposition :

Le concert auquel j’ai assisté hier soir était sublime. (On assiste À un concert).

L’agent grâce auquel elle a lancé sa carrière a été accusé de harcèlement sexuel.


  1. Édition 2018.
  2. Il n’existe pas de version française officielle du modèle APA (voir la section « À propos de la traduction française » à la page « À propos » du guide de l’Université de Montréal. L’adaptation proposée par les bibliothécaires de l’Université de Montréal de la 6e édition de l’APA a le mérite d’être exhaustive et claire. Cependant, votre professeure vous imposera peut-être un modèle un peu différent, voire un tout autre style.
  3. UNESCO (s.d). Qu’est-ce que le patrimoine culturel immatériel ? Repéré à http://www.unesco.org/culture/ich/index.php?lg=fr&pg=00002 (Autorisation de reproduction en instance d’obtention.)
  4. Texte sans date et maintenant indisponible sur Internet qui avait été affiché sur le site du ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec (maintenant ministère de la Culture, et des Communications).
  5. Monstre sacré : vedette de la chanson, du cinéma, du théâtre qui a atteint le sommet de la gloire.
  6. Notices repérées le 13 juin 2018.
  7. Foulon, P. (2014). Comme ils disent. Ces chansons qui font l’histoire. [Fiche pédagogique]. France : Ministère de l’Éducation nationale.
  8. Usage un peu surprenant du mot totem.
  9. Pour compter le nombre de mots d’un passage : sélectionner le passage (sinon le compte se fait pour le texte entier) ? Menu Révision ? Statistiques (WordCount)
  10. Pour compter le nombre de mots d’un passage : sélectionner le passage (sinon le compte se fait pour le texte entier) ? Menu Révision ? Statistiques (WordCount)
  11. Une expression est plus ou moins lexicalisée (plus ou moins figée); une périphrase est une tournure qui explique, qui porte un commentaire.

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Résumer, synthétiser, argumenter Droit d'auteur © 2018 par Sylvie Clamageran, Henriette Gezundhajt est sous licence License Creative Commons Attribution - Pas d’utilisation commerciale - Partage dans les mêmes conditions 4.0 International, sauf indication contraire.

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