Sécurité psychologique
La réalisation d’un débreffage après une simulation fait progresser l’apprentissage, puisqu’un débreffage efficace peut aider les apprenant(e)s à mettre un sens sur les événements et encourager le transfert de connaissances, de la simulation à la pratique. La sécurité psychologique est une composante clé du débreffage. Ce concept sous-entend que les personnes se sentent à l’aise de prendre des risques et de se montrer vulnérables aux yeux d’autrui. Lorsqu’appliquée à la simulation virtuelle en éducation, cela signifie aussi que les apprenant(e)s se sentent à l’aise de parler, de faire part de leurs pensées et de poser des questions sans éprouver de honte ou s’inquiéter d’une éventuelle réaction négative de leurs pairs (Edmondson et Lei, 2014). Un(e) facilitateur(-trice) compétent(e) sera en mesure de créer un sentiment de sécurité psychologique au sein du groupe, contrebalançant ainsi la peur et l’attitude défensive des apprenant(e)s avec la volonté de partager, de réfléchir, de poser des questions et de discuter ouvertement des expériences (Kolbe et coll., 2020).
Conseil d’experts: Évaluation et sécurité psychologique
Une simulation utilisée à des fins d’évaluation et faisant l’objet d’une note réduira probablement le sentiment de sécurité psychologique des apprenant(e)s.
La sécurité psychologique pendant le débreffage
La sécurité psychologique est initialement mise en place au cours de la phase de prébreffage de l’expérience d’apprentissage par simulation (Chapitre 3). Kolbe et coll. (2020) décrivent les façons d’établir et de maintenir un sentiment de sécurité psychologique pendant le débreffage.
Mise en place d’un sentiment de sécurité psychologique
Le fait de donner le ton au début du débreffage est un aspect important de la sécurité psychologique. Pour établir un sentiment de sécurité psychologique, les personnes chargées du débreffage doivent :
- Expliquer le processus de débreffage – y compris le rôle des facilitateur(-trice)s, des apprenant(e)s et des observateurs potentiels.
- Inviter explicitement la participation active au débreffage et démontrer une appréciation de cette participation.
- S’engager envers des actions/comportements qui reflètent le respect, la curiosité, l’attention et la compréhension envers les perspectives des apprenant(e)s.
Maintien d’un sentiment de sécurité psychologique
Compte tenu de la dynamique – et parfois de la nature délicate – de la sécurité psychologique dans un contexte du débreffage, même des comportements irrespectueux apparemment mineurs peuvent avoir un impact négatif sur la perception de sécurité psychologique (Kolbe et al., 2020). Pour maintenir le sentiment de sécurité psychologique, les facilitateur(-trice)s doivent :
- Opter pour des comportements qui contribuent à la sécurité psychologique pendant le débreffage (comportements explicites – clarifier les attentes, utiliser un langage inclusif, démontrer une écoute active – et comportements implicites – arriver tôt, respecter la confidentialité, faire preuve d’empathie).
- Être conscient(e)s des indicateurs suggérant que la sécurité psychologique est menacée dans la perception des apprenant(e)s, par exemple :
- Des apprenant(e)s engagés et/ou loquaces deviennent silencieux et/ou réservés;
- Langage corporel fermé;
- Commentaires ou réponses de nature défensive;
- Des apprenant(e)s se disputant ou se critiquant les uns les autres.
- Présumer que les réactions des apprenant(e)s reflètent leurs sentiments – de la réticence et une attitude défensive signifient que les apprenant(e)s ne se sentent pas psychologiquement en sécurité.
- Mettre l’accent sur les comportements du (de la) facilitateur(-trice) (plutôt que sur ceux des apprenant(e)s) lorsqu’on tente de rétablir le sentiment de sécurité psychologique, par exemple :
- Communiquer un affect positif (langage corporel ouvert, contact visuel);
- Valider et normaliser les inquiétudes des apprenant(e)s.
- « Débreffer le débreffage » en évaluant régulièrement ses propres sentiments de sécurité psychologique et sa capacité de susciter la sécurité psychologique dans le cadre du processus.
Débreffage d’activités de simulation potentiellement stressantes du point de vue émotionnel ou psychologique
Les expériences d’apprentissage fondées sur la simulation ont le potentiel de provoquer de la détresse émotionnelle ou psychosociale chez les apprenant(e)s (Harder et coll., 2020). Lorsque les expériences de simulation contiennent des activités reconnues comme étant stressantes (par exemple, la mort d’un patient), le débreffage devrait mettre l’accent non pas sur le jugement clinique et l’analyse des compétences techniques et non techniques, mais plutôt sur le stress émotionnel de l’expérience. Harder et coll. (2021) ont élaboré un cadre de débreffage pour les praticien(-ne)s et les apprenant(e)s dans le domaine de la santé qui doivent faire face au décès de patients dans le cadre d’une expérience de simulation : il s’agit du cadre de débreffage TiPS (« Trauma-informed Psychologically Safe », c.-à-d. prenant en compte les traumatismes et la sécurité psychologique).
Le cadre de débreffage TiPS
Le cadre de débreffage TiPS est fondé sur les principes des soins tenant compte des traumatismes. Ces principes sont la sécurité, le choix, la collaboration, la fiabilité et l’autonomisation (Harris et Fallot, 2001). Le cadre vise à aider les apprenant(e)s à se sentir préparé(e)s à être exposé(e)s à des événements potentiellement traumatisants (Harder et coll, 2021). Il prévoit une orientation pour les facilitateur(-trice)s quant à l’établissement d’un sentiment de sécurité psychologique avant le débreffage, ainsi que des processus et procédures à suivre pendant le débreffage. Le cadre indique aussi ce qui doit être fait après l’exercice, ce qui inclut notamment une période d’observation visant à discerner les signes et symptômes de stress – normal et anormal – ou de réactions traumatiques. Il souligne enfin l’importance de s’autosurveiller fréquemment après une expérience de simulation émotionnellement éprouvante.
Dans la vidéo suivante, Dr. Nicole Harder présente le cadre TIPS. Cette vidéo est en anglais. Pour le sous-titrage en français, cliquer sur l’icone de sous-titrage (CC) au bas à la droite de la vidéo.
La recherche à l’avant-plan: TiPS
Lisez l’article « Developing a trauma-informed psychologically safe debriefing framework for emotionally stressful simulation Events » par N. Harder, J. Lemoine, W. Chernomas et T. Osachuk pour en savoir davantage sur le cadre de débreffage TiPS. https://doi.org/10.1016/j.ecns.2020.11.007
Sujets potentiellement délicats et/ou bouleversants
Les facilitateur(-trice)s devraient être conscients des sujets potentiellement délicats et/ou bouleversants et envisager des étapes supplémentaires pour assurer la sécurité psychologique, notamment :
- le choix d’un cadre de débreffage approprié (p. ex., TiPS);
- l’obtention des coordonnées des services de counseling pour un aiguillage éventuel;
- l’adoption de stratégies visant à prévenir la détresse émotionnelle et/ou un nouveau traumatisme chez les apprenant(e)s.
Sujets de nature délicate
- Mort/mortalité/soins palliatifs
- Maladie mortelle
- Violence/violence fondée sur le genre
- Suicide
- Maltraitance des enfants
- Racisme
- Arrêts cardiaques/urgences
- Désastres naturels
Stratégie visant à prévenir la détresse émotionnelle et/ou un nouveau traumatisme (Li et coll., 2019)
La prévention de la détresse émotionnelle et/ou d’un nouveau traumatisme chez les apprenant(e)s est importante. Les personnes chargées d’une simulation peuvent utiliser des stratégies de prévention tout au long des étapes d’une simulation pour minimiser ce risque:
- Préparation
- Donnez des renseignements détaillés sur le contenu potentiellement bouleversant au cours du prébreffage.
- Informez les apprenant(e)s sur les symptômes de détresse émotionnelle et/ou de nouveau traumatisme (p. ex., problèmes de sommeil, cauchemars.)
- Évaluation continue
- Faites une évaluation continue des expériences des apprenant(e)s tout au long de l’expérience de simulation –effectuez un suivi auprès d’eux à intervalles réguliers.
- Réponse aux divulgations
- Accueillez les divulgations des apprenant(e)s en faisant preuve de bienveillance, en tant que enseignant(e)s à l’emplacement de Réponse aux divulgations (et non comme clinicien(ne)).
- Présentez des services de soutien et de counseling disponibles et abordables (p. ex., services de santé à la disposition des apprenant(e)s ou des membres du personnel).
- Dosez l’exposition au matériel traumatisant
- Ayez recours à des pauses pour empêcher les apprenant(e)s de se sentir accablé(e)s par les émotions.
- Veillez à ce que le matériel traumatisant soit réparti tout au long du cours ou de l’expérience de formation/d’apprentissage.
- Donnez aux apprenant(e)s le contrôle du matériel
- Informez les apprenant(e)s de leur droit d’interagir avec le matériel selon leur propre niveau de confort.
- Encouragez les autosoins
- Mettez l’accent sur l’importance de la relaxation, des loisirs et du jeu.
- Encouragez la recherche de soutien auprès de membres de la famille, des amis et des mentors/superviseurs.