Chapitre 1 – Résumer : une tâche ancrée dans la communication
- Distinguer l’opération cognitive (résumer) et le texte (résumé) qui peut en résulter
- Appréhender théoriquement les trois opérations en cause : cognitive, communicationnelle et linguistique
- Comprendre la pertinence des résumés d’un point de vue fonctionnel
- Placer correctement les adjectifs dans la phrase, et bien les orthographier et les accorder
1. Introduction : résumer et résumé
Le mot résumer est un verbe; le mot résumé est un participe passé, un adjectif ou un nom dérivé du participe passé.
Cette différence grammaticale implique une différence de sens. En tant que verbe, résumer désigne une action : selon le dictionnaire Petit Robert (PR), le fait de « présenter brièvement en conservant l’essentiel ». En tant que nom dérivé d’un participe passé, le mot résumé désigne un produit : un résumé est un texte qui présente brièvement un sujet, une histoire, une analyse à partir d’un document plus long.
Lorsqu’on résume, on produit du résumé, mais pas nécessairement un résumé, c’est-à-dire qu’on ne produit pas nécessairement un texte appartenant au genre « résumé ». Ainsi, un article appartenant au genre « fait divers » dans un journal résume le fait divers, mais n’est pas pour autant un texte qu’on appellerait un résumé. De même, des notes de cours résument le cours, mais incluent des commentaires, des notes personnelles et ne sont pas strictement un résumé. Autre exemple : une critique de film comprend généralement un résumé de l’intrigue du film, mais ne constitue pas un résumé.
Il faut donc bien distinguer entre résumer comme opération mentale et résumé comme produit textuel. Lorsqu’on écrit à l’université ou au travail, on est presque toujours appelé à résumer, à synthétiser de l’information, mais cela ne signifie pas que le texte résultant peut être catégorisé comme résumé.
2. De l’opération intellectuelle à sa matérialisation
C’est par le langage que la pensée se matérialise. Résumer est donc aussi une action langagière, qui est déterminée par des paramètres communicationnels (qui est mon destinataire ? quelles sont les visées de la communication ? qui m’a demandé de faire le résumé? , etc.) et prend une forme linguistique conditionnée par ces paramètres.
Résumer est ainsi une opération triple :
- cognitive/intellectuelle (chaque élément d’information doit être classé, hiérarchisé…)
- communicationnelle (même si le résumé m’est destiné – notes de cours, par exemple – je dois déterminer la meilleure façon de présenter, d’organiser pour que le texte produit remplisse sa fonction)
- linguistique (comment se fait la mise en mots)
Ces trois opérations sont indissociables : elles se répondent, se relancent l’une l’autre tout au long de la production.
Résumer est ainsi une action complexe qui mobilise l’esprit de synthèse, depuis la conception jusqu’à la mise en mots.
3. Classifier pour comprendre et résumer
Dans l’introduction, nous avons dit que les « textes résumants » n’étaient pas tous des résumés et que souvent les « séquences résumantes » s’intégraient dans des textes plus vastes, dont la fonction générale n’est pas de résumer.
3. 1 La classification des textes et autres documents
Pourquoi avons-nous besoin de classer les textes et autres documents par genres ? Comment cette catégorisation est-elle construite par l’esprit humain pour comprendre des films, des émissions de télévision, des tableaux, des spots publicitaires, des articles de presse, des articles savants, des textes littéraires, des discours publics, des messages dans des réseaux sociaux, parmi bien d’autres productions langagières ?
La démarche de classification, ou taxinomie, ou typologie, est constitutive de l’organisation des savoirs. En lecture, la catégorisation est une clé essentielle pour l’interprétation. On classe ainsi les textes par genres : s’agit-il d’un roman (novel), d’une nouvelle (short story), d’un essai, d’une biographie, d’un article d’actualité, d’un reportage, d’une critique, d’une lettre ouverte polémique, d’un manuel scolaire, d’un formulaire, d’une lettre administrative, d’un mode d’emploi, etc. Bien sûr, la classification est plus qu’une simple liste. On obtiendra différents modèles de classification, et un nombre différent de niveaux de classification, selon les critères que l’on retient : on peut avoir une première opposition « littéraire / non littéraire », ou « ludique / utilitaire » ou « à usage interne /à usage externe » au sein d’une institution, etc. Les paramètres dépendront de la finalité de cette classification.
À un niveau peu complexe, nous classons généralement de façon automatique, parce que nous avons « fréquenté » assez de documents pour savoir comment ils sont codifiés, par leur forme physique, leur mise en page, le cadre dans lequel ils s’inscrivent, etc. Pour bien situer un document (c’est-à-dire pouvoir bien le comprendre et éventuellement bien le résumer), il est cependant utile de s’arrêter consciemment à ce travail de catégorisation.
3.2 La classification des résumés : fonction et fonctionnement
Dans ce manuel, nous éclairerons la démarche d’écriture des résumés que nous produirons par leur finalité – leur fonction donc (quel but le résumé vise-t-il ?), ce qui implique aussi de déterminer quels sont (ou seraient) ses destinataires (au-delà du professeur qui corrige). Nous nous plaçons ainsi en quelque sorte dans une perspective professionnelle du résumé : il ne s’agit pas strictement d’un exercice de rédaction, mais de la production d’un texte qui puisse exister réellement à l’extérieur du cadre de ce cours de rédaction.
Définir le cadre de production « dans la vraie vie » permet de déterminer en quoi doit consister le résumé, en d’autres mots son fonctionnement :
Questions à se poser pour établir le « fonctionnement » du résumé
- Quel est son contenu? (Quels éléments d’information, d’analyse retient-on ?)
- Comment est-il structuré ? Que met-il en relief ?
- Quel style adopte-t-il ?
- De quelle longueur est-il par rapport au texte de départ ?
- Etc.
4. Point de langue : place, accord et forme des adjectifs
L’adjectif pose des difficultés aux non-francophones à trois points de vue : sa place, son accord et aussi, tout simplement, la formation du féminin et du pluriel.
- Si, en français, l’adjectif se place le plus souvent après le nom, ce n’est pas du tout une règle absolue. Bon nombre d’adjectifs courts et courants se placent devant le nom; il en va de même pour les adjectifs courts ayant une valeur affective ou appréciative; même chose aussi quand le nom qualifié est un nom propre (voir les exemples à la diapositive 6 du document Les adjectifs : place, morphologie et accord).
- En français, contrairement à ce qui se passe en anglais (et dans d’autres langues), l’adjectif s’accorde en genre et en nombre avec le nom qu’il qualifie. Par exemple, dans les petites filles, l’adjectif prend la marque du féminin et du pluriel même si, du point de vue du sens, la redondance du féminin et du pluriel est inutile. C’est d’autant plus difficile pour les non-francophones de penser à ces accords « inutiles » que souvent on ne les entend pas : la seule marque sonore du pluriel dans les petites filles se trouve dans l’article. Et si dans les petites filles, on entend le féminin de l’adjectif, on n’entend ni le genre ni le nombre de l’adjectif dans ces chères filles.
- La morphologie du féminin et du pluriel des adjectifs est beaucoup moins complexe que celle des conjugaisons des verbes; néanmoins, les erreurs dans la formation du féminin et du pluriel restent relativement nombreuses même à un niveau avancé, en raison notamment de mauvais parallèles avec l’anglais : he/she is naive = il est naïf / elle est naïve.
En bref, l’adjectif mérite un peu de révision…