31 Salle d’urgence

Jour : 0
Heure : 23 h 30 (une heure après la collision)
Endroit : Salle d’urgence

L’ambulance s’immobilise. Les ambulanciers paramédicaux en sortent et soulèvent aisément la civière pour la sortir du véhicule et la déposer sur ses roues. Ils franchissent ensuite les portes du triage.

L’infirmière Jackie, installée au poste de triage, lève les yeux. « Est-ce le conducteur impliqué dans la collision automobile à un véhicule?

— Oui, répond James. Je crois qu’il se nomme Aaron Knoll. J’ai son portefeuille ici, ainsi que quelques documents. Nous l’avons stabilisé sur les lieux de l’accident, et je dois remplir des documents ici.

— On vous attend dans la salle de traumatologie 2, indique Jackie. Donnez-moi son portefeuille et je l’inscrirai dans le système. Connaissez-vous son plus proche parent?

— Nous l’ignorons. Il n’y avait que lui et une passagère.

— Merci. Vous pouvez vous rendre dans la salle 2. Le Dr Pierce vous y attend et tout est prêt pour vous recevoir. »

Les deux ambulanciers paramédicaux franchissent les portes avec la civière pour se rendre à l’arrière du poste de triage et pénétrer dans le service de traumatologie. En jetant un coup d’œil dans le premier espace, ils voient la passagère installée pour une radiographie. Un peu plus loin dans le corridor, ils tournent à l’angle d’un mur pour entrer dans la salle de traumatologie 2.

« Bonsoir, docteur Pierce.

— Hé, James. Que nous amenez-vous en cette belle soirée?

— Il s’agit de monsieur Aaron Knoll, conducteur impliqué dans une collision automobile à un véhicule à l’angle des rues Hemlock et Willow. Il y a eu déploiement des coussins gonflables. Il portait sa ceinture de sécurité. Les pompiers ont dû retirer le toit et les portières pour l’extraire du véhicule. Nous lui avons installé un collier cervical, et il se trouve sur une planche dorsale. Les signes vitaux sont les suivants : tachycardie sinusale à 130, fréquence respiratoire à 32 lors de la dernière mesure, saturation en oxygène à 90 % avec respirateur à 10 l/min et pression artérielle à 90/70. Il y a des lacérations au cuir chevelu, et l’examen primaire n’a révélé aucune autre blessure aux membres. Mon partenaire a constaté que son abdomen est sensible et ferme. L’évaluation initiale de l’échelle de Glasgow est de 13/15. Le patient n’a pas encore pleinement repris connaissance, mais il bouge tous ses membres de façon spontanée. Nous ne lui avons administré aucun analgésique. Il a reçu deux litres de soluté physiologique 1. Aucun proche n’a été avisé. Avez-vous besoin d’autres choses, docteur Pierce? »

Jour : 0 Fréquence cardiaque Pression artérielle Fréquence respiratoire Température Saturation en O2
Heure : 23 h 30 130 90/70 32 90 % à 10 l/min

« Non. Installons-le sur le lit et examinons-le de plus près », répond le médecin.

Les ambulanciers paramédicaux et les infirmières déplacent Aaron sur le lit de traumatologie de l’hôpital. Il gémit légèrement pendant le repositionnement.

En travaillant rapidement en équipe, les deux infirmières de l’urgence commencent à découper les vêtements d’Aaron, à le brancher à l’appareil de contrôle et à vérifier le point de ponction. L’inhalothérapeute vérifie le débit d’oxygène et ausculte le thorax du patient. En moins de cinq minutes, Aaron est relié à la télésurveillance continue et recouvert d’une couverture légère. Les signes vitaux sont consignés et transmis au Dr Pierce.

« Je crois qu’il est un peu plus éveillé maintenant. La pression artérielle est un peu plus basse que je l’aurais souhaité. Ingrid, installez une deuxième ligne intraveineuse et faites les prélèvements sanguins habituels pour un traumatisme. Donnez-moi du glucose au cas où nous devrions composer avec un quelconque problème lié au diabète. »

Ingrid installe aisément une ligne intraveineuse de calibre 16 dans la fosse antécubitale inutilisée par les ambulanciers paramédicaux. Elle prélève huit tubes de sang et installe un soluté physiologique en écoulement complet. « Docteur Pierce, la glycémie indique 10.

— Merci Ingrid. » En levant les yeux vers l’inhalothérapeute, le médecin demande : « Qu’en est-il des bruits respiratoires?

— Tout va bien jusqu’à présent, répond Ingrid. L’entrée d’air dans les bases est bonne, uniforme partout, et il n’y a aucun autre bruit. Sur respirateur à 95 % avec expansion égale. La saturation est à 99 % actuellement, et je commencerai à régler la FiO2 à la baisse.

— Excellent! Quand la FiO2 sera inférieure à 70 %, faites une GSA pour savoir où nous en sommes. »

Le Dr Pierce s’approche du patient et commence l’évaluation des membres et du tronc. Ne constatant rien d’anormal pour les membres, il porte son attention sur l’abdomen et note qu’Aaron est en défense abdominale, que l’abdomen est dur, qu’il n’y a aucun bruit intestinal et qu’il y a quelques contusions dans le quadrant supérieur gauche.

« La pression artérielle augmente un peu avec l’administration de liquide. Voyons où en est l’hémoglobine avant de donner du sang au patient. J’aimerais vérifier sa colonne cervicale et savoir ce qui se passe dans son abdomen. Qu’en est-il de la diurèse actuellement?

— Une sonde de Foley est installée depuis cinq minutes environ, et nous avons 200 ml d’urine avec une légère coloration, répond l’infirmière. Un échantillon a été envoyé.

— Fantastique. Je vais sortir et communiquer avec le radiologiste de garde pour savoir s’il est possible de faire un tomodensitogramme pronto. »

Heure : 1 h (deux heures et demie après la collision)

Glen, le préposé du service de radiologie, entre dans la salle de traumatologie 2 et annonce que le technologue spécialisé en tomodensitométrie est prêt à recevoir Aaron Knoll.

Ingrid lève les yeux. « Hé, Glen. Merci. Es-tu là pour nous aider à nous rendre à la tomodensitométrie?

— Oui. Les choses ont été assez tranquilles cette nuit jusqu’à présent.

— Pour toi, peut-être. Ici, nous sommes débordés. » En jetant un œil à l’inhalothérapeute, Ingrid demande : « Prêt?

— Oui, allons-y. »

Ingrid saisit les documents sur le bureau et indique qu’elle est prête à partir.

Les trois poussent et tirent la civière dans le service d’urgence pour franchir les portes arrière et se rendre à l’ascenseur qui les mènera directement au service de radiologie.

À leur arrivée, Glen montre le corridor à la droite du bureau d’accueil. « La salle de tomodensitométrie 3 est prête. La passagère se trouve déjà dans l’autre salle. »

Ingrid hoche la tête et guide la civière jusqu’au bout du corridor pour y trouver le technologue spécialisé en tomodensitométrie. Ce dernier tient la porte ouverte pour les laisser passer.

« Bonjour, Ingrid. Comment va la nuit? Est-ce Aaron Knoll?

— Très occupée et oui. — On vous a demandé de venir?

— Oui, deux de nous ont été appelés pour donner un coup de main en raison de l’accident et d’autres problèmes survenus durant la soirée.

— Wow. Très bien. Le Dr Pierce a préparé la demande, mais nous voulons vérifier la colonne cervicale pour savoir s’il se passe quelque chose dans la tête du patient. Nous aimerions aussi connaître ce qui se passe dans son abdomen, puisqu’il est très sensible, précise Ingrid. La diurèse est satisfaisante. Les tests de laboratoire ne révèlent aucune insuffisance rénale; nous pouvons donc utiliser de la substance de contraste pour l’abdomen. Aucune substance du genre pour la tomodensitométrie de la tête, car, comme vous le savez, la substance de contraste et le sang se ressemblent sur l’image. Balayage hélicoïdal, pour que ce soit plus rapide. Ensuite, nous pourrons reformater les images.

— Excellent! Vérifions la présence d’hémorragie cérébrale avant de s’attarder à l’abdomen. Transférons-le sur la table de manière à ce que la tête entre en premier dans l’appareil. » Ingrid et le technologue travaillent ensemble en suivant le protocole applicable aux traumatismes pour la tomodensitométrie.

Heure : 2 h (trois heures et demie après la collision)
Endroit : Poste de triage

« Pourriez-vous m’aider? Je cherche mon fils? »

Jackie lève le regard pour voir une femme très anxieuse qui, de toute évidence, a versé des larmes. « Pourriez-vous me donner le nom de votre fils?

— Aaron. Aaron Knoll. Je suis sa mère. Est-il en vie? Ne me dites pas qu’il est mort, je vous en prie!

— Non, madame Knoll, votre fils n’est pas décédé. Il est au service d’urgence, répond Jackie d’un ton rassurant. Je vais aller chercher le Dr Pierce pour qu’il vous parle et vous conduise à votre fils.

— Merci infiniment, dit Mme Knoll, soulagée. Et sa copine?

— Je suis désolée. Je ne peux rien dire d’autre. Permettez-moi d’aller chercher le Dr Pierce. »

Quelques minutes plus tard, Jackie revient dans la salle d’attente et guide Mme Knoll vers la salle familiale.

« Docteur Pierce, voici Mme Knoll.

— Bonsoir, madame Knoll, dit le Dr Pierce en lui serrant la main. Voici Ingrid, l’une des infirmières prenant soin de votre fils.

— Oh mon dieu. Que s’est-il passé?

— Veuillez vous asseoir, répond le médecin en accompagnant la mère d’Aaron jusqu’à une chaise. Il y a environ trois heures et demie, votre fils a été impliqué dans une collision automobile à un véhicule à proximité de ce que nous croyons être la maison de sa copine. La voiture a été très endommagée. Il était inconscient sur les lieux de l’accident, mais il reprend lentement ses sens. Nous avons fait quelques tests, et il semble qu’il aura besoin d’une intervention chirurgicale en raison d’une hémorragie interne.

— Oh non! C’est affreux. S’en sortira-t-il? Puis-je le voir?

— Nous espérons que l’intervention chirurgicale et un certain temps de récupération lui permettront de se rétablir. Il peut toutefois se produire bien des choses dans l’intervalle, et il aura besoin de beaucoup d’aide pour aller mieux.

— Je me sens un peu dépassée actuellement, déclare Mme Knoll. Il ne boit jamais en conduisant. Comment tout cela s’est-il produit?

— Madame Knoll, il n’avait pas les facultés affaiblies par l’alcool ou la drogue, précise le médecin d’un ton rassurant. Nous pensons plutôt qu’il s’est endormi au volant, mais seulement lui pourra nous le confirmer à son réveil.

— Il se réveillera, n’est-ce pas?

— Nous croyons que si. Pour l’instant, il semble s’agir d’une commotion. Le tomodensitogramme n’a révélé aucune lésion à la tête ou au cou. Au fil du temps, nous en saurons davantage. Nous avons raison d’espérer un rétablissement complet. Comme je l’ai dit, d’autres choses peuvent se produire d’ici là, et il aura besoin d’un grand soutien pour se rétablir.

— D’accord, je crois que je comprends bien. Il est gravement blessé, il lui faudra bien du temps pour que son état s’améliore et il pourrait y avoir des complications imprévues, résume Mme Knoll en regardant le sol et en tentant d’accepter les événements.

— Oui, c’est exact. Il est jeune, ce qui signifie que les résultats sont souvent meilleurs que s’il avait eu mon âge.

— Puis-je le voir maintenant? »

Ingrid se lève et s’approche de Mme Knoll. « Oui. Laissez-moi vous montrer l’endroit où il est et vous expliquer les appareils installés à son chevet. Je crois que le chirurgien voudra vous parler également. »

Ingrid conduit Mme Knoll jusqu’à la salle de traumatologie 2 pour y voir Aaron.

« Madame Knoll, avant d’entrer, vous devez savoir qu’il y a de nombreux appareils autour d’Aaron et que beaucoup de gens entreront et sortiront de la salle. Ces personnes ne se présenteront pas toutes et elles n’échangeront peut-être pas avec vous. Il faut un bon nombre de professionnels de la santé pour soigner votre fils actuellement. Il est tout aussi stressant pour nous de voir votre fils dans cet état.

— OK, OK, dit Mme Knoll en hochant la tête. Puis-je le voir maintenant?

— Suivez-moi. » Ingrid et Mme Knoll contournent le coin du mur et entrent dans la salle de traumatologie 2. En y pénétrant, cette dernière voit son fils étendu, le dos à plat sur la civière, et il est recouvert d’une couverture. Des câbles émergent d’en dessous de la couverture et se rendent jusqu’à l’appareil de contrôle, fixé au mur. Des tubulures d’intraveineuse transparentes partent de sacs suspendus à des crochets, traversent des pompes intraveineuses de couleur bleue et se rendent sous la couverture, jusqu’aux bras d’Aaron. Un tube en plastique transparent se trouve au pied du lit et contient un liquide légèrement jaune.

— Oh mon dieu. Il a l’air si malade. À quoi servent les bandages autour de sa tête?

— Il s’est sans doute heurté la tête au volant avant le déploiement des coussins gonflables, ou sur la vitre latérale, explique Ingrid. Il a eu quelques coupures que nous avons refermées à l’aide de points de suture.

— Aura-t-il des cicatrices? Il a un si beau visage.

— Je l’ignore. Tout dépend de la manière dont il récupère. Il est un peu tôt pour penser aux cicatrices. Laissons-le passer les prochains jours. Nous pourrons alors déterminer si les cicatrices constituent un problème.

— Puis-je le toucher?

— Absolument. Et dites-lui que vous êtes ici et l’endroit où il se trouve. Parfois, dans cet état, un patient peut entendre les gens autour de lui. Il connaît bien votre voix et il vous fait confiance. En vous entendant lui dire ces choses, elles auront plus de sens pour lui. Laissez-moi vous apporter une chaise afin que vous puissiez vous asseoir et lui tenir la main un peu. »

Ingrid saisit une chaise se trouvant dans le coin de la salle et aide Mme Knoll à s’asseoir près du lit d’Aaron.

Heure : 3 h (quatre heures et demie après la collision)

« Madame Knoll? Je suis le Dr Labinski. Le Dr Pierce m’a demandé d’examiner votre fils et d’effectuer une intervention chirurgicale pour arrêter une hémorragie interne.

— Oui, je suis madame Knoll. Est-ce grave?

— Eh bien, la situation est assez grave pour qu’on me demande de l’examiner et de résoudre le problème. La situation est donc grave, en effet. Laissez-moi vous expliquer ce que je souhaite faire. Ensuite, si vous donnez votre consentement, nous le conduirons à la salle d’opération pour lui permettre de commencer à se rétablir, du moins nous l’espérons. »

Le Dr Labinski explique à Mme Knoll que Aaron a probablement une partie de la rate arrachée et que l’hémorragie continuera s’il n’est pas opéré. Aaron a déjà perdu un peu de sang, mais son état est raisonnablement stable. Il ne restera cependant pas stable sans intervention chirurgicale. Il explique aussi le risque associé à une anesthésie, aux infections et aux cicatrices, ainsi que les risques relatifs à l’incapacité d’arrêter d’autres hémorragies dans la salle d’opération.

Mme Knoll signe le formulaire de consentement.

« Je me rends de ce pas à la salle d’opération pour informer le personnel que nous ferons l’intervention chirurgicale cette nuit, dans l’heure qui suit environ. Je vous téléphonerai lorsque nous aurons terminé. Je vous incite fortement à retourner à la maison quelques heures ou à demander à Ingrid si vous pouvez dormir dans la salle familiale. Il vous faut du sommeil. Aaron aura besoin de votre aide à son réveil. Je m’attends à ce que l’intervention chirurgicale dure de deux à trois heures. Aaron devra ensuite passer à peu près quatre heures dans la salle de réveil. Enfin, il sera conduit à l’étage du service de chirurgie, où vous pourrez le voir vers 10 h.

— D’accord. Je préférerais rester; je parlerai donc à Ingrid.

— C’est très bien. Je vous téléphonerai après l’intervention. »

Sur ce, le Dr Labinski sort de la salle de traumatologie 2 et se dirige vers la salle d’opération.


  1. Soluté physiologique avec dextrose à 5 %

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