L’histoire de Paul

L’histoire de Paul

Paul, le premier fils de Ginette et Hughes, naît en 1971. Il grandit dans un quartier aisé de Toronto, sous les soins d’une nounou à temps plein pendant ses premières années. Dès la maternelle, Paul est envoyé dans un internat. Il ne rentre à la maison que pour les vacances d’été et les congés scolaires. De même, il effectue ses études secondaires dans un internat à l’extérieur de la ville.

Pendant son passage à l’école secondaire, Paul reçoit une allocation importante de ses parents, ce qui lui permet d’acheter tout ce qu’il veut. En 12e année, il commence à se procurer de l’alcool pour arroser ses sorties avec ses amis. Paul fait constamment la fête, ce qui hypothèque ses résultats scolaires. Malgré tout, il parvient à obtenir son diplôme d’études secondaires et à être admis dans une université au Québec.

L'image est celle d'une école secondaire au Québec.
CC BY-SA 4.0 L’image est celle d’une école secondaire au Québec.

La vie universitaire de Paul est ponctuée de nombreuses fêtes et sorties. Après un certain temps, il constate que l’alcool ne suffit plus à lui donner l’intoxication souhaitée. En deuxième année d’université, il commence à consommer de la marijuana et du haschisch. Il ne rentre plus au domicile familial pour les vacances d’été et passe tout son temps avec ses amis. En troisième année d’études, Paul consomme quotidiennement de la cocaïne et de l’alcool. Il faut souligner que Paul demeure bouleversé par la naissance d’un frère atteint du syndrome de Down en 1989 (voir le profil de Brian). En 1993, Paul est tenu d’abandonner l’université avant la fin de la troisième année, car il se retrouve en situation d’échec dans tous ses cours.

Les parents de Paul interviennent et l’envoient dans un centre de désintoxication. À sa sortie du programme, Paul retourne vivre chez ses parents. Les années suivantes se déroulent sans but précis, avec des épisodes de consommation excessive entrecoupés de séjours en désintoxication. C’est dans l’un de ces centres que Paul rencontre sa première conjointe en 1999. Les deux membres du couple sentent qu’ils comprennent bien le difficile cheminement de l’autre et souhaitent s’entraider dans leur lutte contre la toxicomanie.

En 2002, Paul et sa première femme ont des jumelles, Ella et Olivia. Paul occupe des emplois précaires et a du mal à payer les factures et à gérer sa dépendance à la cocaïne. Après des années d’espoirs déçus, les parents de Paul ne veulent plus rien savoir de leur fils ni de sa jeune famille. Le couple rompt en 2008. L’ex-conjointe de Paul obtient la garde de leurs filles. Il s’agit enfin du signal d’alarme dont Paul avait tant besoin pour remettre de l’ordre dans sa vie. Il s’inscrit auprès de Narcotiques Anonymes en 2009.


Paul est abstinent depuis un peu plus d’un an au moment où il rencontre Nancy en 2010. Paul ne cache rien à Nancy : son passé de toxicomane, son précédent mariage et ses jumelles qui lui manquent beaucoup. Paul travaille pour une entreprise de construction et aime l’aspect physique de son travail, un exutoire qui lui enlève la tentation de consommer. Paul et Nancy se marient en 2012. Peu après, ils essaient de concevoir un enfant, mais rencontrent des problèmes d’infertilité (voir le profil de Nancy). À part ce contretemps, la vie de Paul et de Nancy se passe bien.

En 2018, Paul subit un accident de travail : une chute du haut d’un échafaudage de deux étages. Il est transporté en ambulance à l’hôpital, où on diagnostique des lésions aux ligaments et aux muscles du dos, ainsi que des déchirures à trois disques vertébraux. L’une des déchirures est assez importante. En guise de suivi, Paul effectue un examen de tomodensitométrie six semaines après l’accident.

En raison des antécédents de Paul en matière de toxicomanie, les médecins lui prescrivent du Flexeril (relaxant musculaire) et du Ketoprofen (anti-inflammatoire non stéroïdien). Il retourne à la maison pour y effectuer sa convalescence. Toutefois, les médicaments prescrits sont insuffisants pour soulager la douleur. Paul appelle sa médecin de famille pour lui demander un médicament plus puissant. Après de longues discussions, la médecin prescrit du Tylenol 3 (acétaminophène 300 mg et codéine 30 mg). Elle demande à Paul de continuer à prendre les deux autres médicaments qui avaient été prescrits à l’hôpital et de ne prendre le Tylenol 3 qu’en cas d’absolue nécessité. Par précaution, la médecin indique à la pharmacie de délivrer un maximum de quatre comprimés de Tylenol 3 par jour. Nancy doit donc s’arrêter à la pharmacie tous les soirs en rentrant à la maison.

À son retour à 19 h 30 le troisième jour suivant le début de la prise de Tylenol 3, Nancy trouve Paul agité, transpirant et se plaignant d’avoir très mal au dos. Paul affirme qu’il a pris son dernier comprimé de Tylenol 3 à 9 h le matin même, car il en avait eu besoin toute la nuit.


La lutte contre les douleurs dorsales chroniques se poursuit au cours des deux années qui suivent. Incapable d’atténuer complètement la douleur, Paul commence à s’automédicamenter avec de l’alcool et des médicaments sur ordonnance qu’il obtient dans des cliniques sans rendez-vous. En désespoir de cause, il se procure des médicaments auprès de vendeurs de rue. Paul touche des prestations d’invalidité de longue durée auprès de la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (WSIB). Il doit entreprendre un programme de retour au travail dans quelques semaines.

Pendant cette période, les parents de Nancy emménagent dans la maison de Paul et Nancy en raison de problèmes de santé (voir le profil de Marie). Marie, la mère de Nancy, a notamment subi une intervention chirurgicale. Paul découvre que sa belle-mère a obtenu de l’oxycodone-acétaminophène (2,5 mg-325 mg) pour soulager sa douleur. La médecin lui avait prescrit 60 comprimés en prévision d’une absence de plusieurs semaines. En cachette, Paul subtilise quelques-uns de ces comprimés par jour.

Environ deux semaines après l’arrivée de ses parents, Nancy constate que le nombre de comprimés d’oxycodone est bien inférieur à ce qu’il devrait être. La seule conclusion logique est que Paul est l’auteur du vol. Après une confrontation de plusieurs heures, Paul passe aux aveux.

Paul admet qu’il traverse une période difficile, mais nie qu’il a développé une nouvelle dépendance à l’oxycodone-acétaminophène. Rappelons que les difficultés de Paul se sont multipliées :

  • Prestations d’invalidité
  • Maux de dos chroniques
  • Insomnie
  • Arrivée de Sam (fils adoptif)
  • Diagnostic de Sam (fibrose kystique)
  • Présence de Marie et Jacques (beaux-parents de Paul) au domicile
  • Manque de contact et de soutien de la part de ses parents
  • Études et travail très accaparants pour Nancy

Nancy appelle l’ancien parrain de Paul chez les Narcotiques Anonymes pour lui demander conseil. Elle explique que Paul semble en colère contre le monde entier, amèrement déçu par la tournure de sa vie.

Au fil de nombreux efforts, Paul parvient à surmonter sa dépendance à la drogue. Il est plus soucieux de sa santé et subit un examen médical annuel de routine, ce qu’il avait longtemps négligé. Malgré ces progrès, la médecin de Paul se préoccupe de la santé cardiovasculaire de son patient, compte tenu de son âge et de sa consommation antérieure d’opioïdes.

L’inactivité physique est l’un des problèmes parallèles à la consommation d’opioïdes. De plus, la consommation d’opioïdes sur une longue période peut entraîner des changements au cerveau associés à des comportements impulsifs. À l’inverse, l’activité physique modifie les voies neuronales du cerveau liées à la récompense et au stress, ce qui fait obstacle aux facteurs biologiques et psychologiques de la dépendance. Compte tenu de ses antécédents de consommation et de son risque accru de maladie cardiovasculaire, Paul aurait tout avantage à effectuer régulièrement de l’exercice physique.

La prévention des maladies cardiovasculaires comprend plusieurs volets : des changements au mode de vie, un suivi médical régulier, des soins offerts de concert par divers professionnels de la santé, une gestion adéquate des médicaments, ainsi qu’un soutien et un encadrement continus.

Case Key Words

Mots-clés : Toxicomanie, adoption, alcoolisme, blessure au dos, système nerveux central, divorce, muscles, système musculaire, dépendance aux opioïdes, crise des opioïdes, système squelettique, groupes de soutien, vertèbres

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Études De Cas Polyvalentes En Sciences De La Santé Copyright © 2024 by Laura Banks; Elita Partosoedarso; Manon Lemonde; Robert Balogh; Adam Cole; Mika Nonoyama; Otto Sanchez; Sarah West; Sarah Stokes; Syed Qadri; Robin Kay; Mary Chiu; and Lynn Zhu is licensed under a Creative Commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike 4.0 International License, except where otherwise noted.

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