Introduction

Un point de départ

Lobjectif de cette ressource éducative libre (REL) est d’offrir aux enseignant.e.s un point de départ, c’est-à-dire une trousse d’éveil sous forme de gabarit pédagogique, peuplé de pistes de réflexions et de méthodes suggérées pour entamer l’enseignement de divers thèmes/sujets/enjeux en lien avec la justice sociale. Mais pourquoi avoir créé une telle ressource?

Aborder certains sujets avec les apprenant.e.s peut présenter un défi nécessitant une prise de risque, compte tenu de leur nature délicate et parfois controversée. Hackman (2005) estime que l’enseignement dans une perspective de justice sociale peut s’avérer difficile. Toutefois, une classe axée vers la justice sociale vise à doter les apprenant.e.s des connaissances et de la conscience nécessaires pour analyser les questions d’oppression et d’injustice et transformer cet apprentissage en action (Bell, 2016 ; Hackman, 2005). Conséquemment, les apprenant.e.s acquièrent un sentiment d’agentivité, risquent de s’engager davantage en faveur de la justice sociale et commencent à se considérer comme capables d’interrompre les systèmes structurels d’oppression et de contribuer activement au changement social (Bell, 2016 ; Hackman, 2005 ; Stachowiak, 2017).

La conscience socioculturelle

Le développement de la conscience socioculturelle est particulièrement important, en d’autres termes, notre compréhension du fait que les pensées et les comportements des gens sont influencés par la race, l’ethnicité, la classe sociale et la langue (Banks, 1996). Il est donc important que les enseignant.e.s puissent d’abord songer à leurs identités socioculturelles (Banks, 1991) afin d’encourager les élèves à y réfléchir à leur tour et à développer leur propre conscience socioculturelle.

Les chercheures Villegas et Lucas (2002) expliquent que grâce à cette conscience socioculturelle, les enseignant.e.s peuvent reconnaître la relation entre les écoles et la société et comprendre que « les écoles contribuent à reproduire les inégalités sociales existantes tout en donnant l’illusion que ces inégalités sont naturelles et justes » [traduction libre] (p. 23). Pour ce faire, elles ont imaginé un cadre global pour former des enseignant.e.s sensibles à la culture, défini par six caractéristiques : (a) iels sont conscient.e.s de la réalité socioculturelle, (b) iels ont une vision positive des diverses populations d’étudiant.e.s, (c) iels se perçoivent comme capables d’apporter des changements dans l’éducation, (d) iels comprennent comment les apprenant.e.s construisent leurs connaissances, (e) iels connaissent leurs étudiant.e.s, et (f) iels conçoivent l’enseignement sur la base de ces connaissances. Or, en développant cette sensibilité à la culture, les enseignant.e.s ne se contentent pas de bien connaître leurs élèves, mais utilisent ce qu’iels savent de leurs élèves pour leur ouvrir la voie à l’apprentissage, entre autres, « en impliquant tous les élèves dans la construction des connaissances, en s’appuyant sur les forces personnelles et culturelles des élèves, en aidant les élèves à examiner le programme d’études à partir de perspectives multiples, en utilisant des pratiques d’évaluation variées qui favorisent l’apprentissage et en faisant en sorte que la culture de la classe soit ouverte à tous les élèves » (Villegas et Lucas, 2002, p. 27).

La pédagogie sensible et adaptée à la culture

Le ministère de l’Éducation de l’Ontario (MÉO) s’engage à promouvoir une pédagogie sensible et adaptée à la culture par l’entremise de plusieurs initiatives visant à célébrer la diversité, à offrir un soutien adapté et à miser sur la réussite de chaque élève (Le Centre Franco, 2019, 2021). En fait, le MÉO souligne l’importance de « développer sa capacité à faire preuve d’ouverture aux différences culturelles », compte tenu du fait que les milieux scolaires deviennent de plus en plus diversifiés (Le Centre Franco, 2019, 2021). Comment créons-nous des espaces d’apprentissage qui sont à la fois adaptés à la diversité culturelle tout en reconnaissant le besoin de sensibiliser les apprenant.e.s aux questions de justice sociale qui imprègnent notre société aujourd’hui? Selon Lekas et al. (2020), le concept de l’humilité culturelle « c’est admettre que l’on ne sait pas et que l’on est prêt.e à apprendre [des autres], tout en reconnaissant notre propre enracinement dans la culture » ​[traduction libre] (p. 2). Ce concept pourrait s’avérer un bon point de départ vers la conscientisation des rapports de pouvoir qui existent dans la société et la création « d’environnements culturellement sûrs et inclusifs » (Le Centre Franco, 2019, 2021).

D’ailleurs, cette trousse d’éveil se veut un outil pédagogique versatile et inclusif, se ralliant autour d’une idée phare qui permettra une entrée en matière et une façon concrète d’amorcer des thèmes tels que le racisme, l’iniquité des genres, l’antisémitisme et l’islamophobie, la pauvreté, l’interculturalité, l’intimidation, la discrimination, la pollution, la vérité, la réconciliation et la décolonisation, les traités, l’identité, la santé mentale, les conflits de guerre, la communauté 2ELGBTQIA+, l’entreprenariat social et bien d’autres. 

Peu importe où les enseignant.e.s se situent dans leur parcours vers une approche à l’enseignement plus inclusive et sensible à la culture, nous les encourageons à tirer profit de cette trousse d’éveil qui leur permettra d’entamer ou de poursuivre les conversations courageuses et riches, bien que parfois difficiles mais nécessaires dans la quête d’un monde plus juste et équitable pour toutes et tous.

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