1 Pourquoi les STIM interactifs? Considérations de conception pédagogique

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POURQUOI LES STIM INTERACTIFS? CONSIDÉRATIONS DE CONCEPTION PÉDAGOGIQUE

Elena Chudaeva

L’apprentissage actif est basé sur le constructivisme, une théorie de l’apprentissage qui soutient que les apprenants construisent leur propre compréhension d’un sujet en s’appuyant sur leurs connaissances antérieures. La mise en œuvre de l’apprentissage actif signifie donc que l’enseignement ne se concentre plus sur la transmission des connaissances, mais sur la construction des connaissances par les apprenants, grâce à la création de tâches, d’interactions, de devoirs et d’environnements guidés qui favorisent un apprentissage approfondi et significatif. Une théorie étroitement liée au constructivisme, le socio-constructivisme, soutient que l’apprentissage actif est optimal lorsque les apprenants construisent leurs connaissances en interaction avec les autres apprenants. En outre, lors du choix d’une technologie éducative, il est toujours utile de prendre une décision éclairée basée sur la qualité du contenu, l’efficacité pédagogique, la facilité d’utilisation et l’accessibilité. En général, il est judicieux de choisir la ressource la plus accessible adaptée aux besoins des enseignants et d’anticiper sur les lacunes en matière d’accessibilité afin de garantir l’égalité d’accès au programme d’études pour les utilisateurs bénéficiant de mesures d’adaptation en matière d’apprentissage (MERLOT, 2020).

Avantages liés à l’utilisation de laboratoires virtuels, de simulations en ligne et de ressources Web interactives

Les méthodes d’apprentissage requièrent des apprenants qu’ils participent pleinement à leur apprentissage en réfléchissant, en discutant, en faisant des recherches et en créant. Dans les classes d’apprentissage actif, les apprenants peuvent être invités à mettre en pratique des compétences, à résoudre des problèmes, à explorer des questions complexes, à proposer des solutions et à expliquer des idées dans leurs propres mots par le biais de l’écriture et de la discussion. Les méthodes d’apprentissage actif sont particulièrement efficaces pour l’apprentissage des apprenants, comparativement aux méthodes qui consistent principalement en des cours magistraux.

Les enseignants affirment également que les laboratoires virtuels privilégiés pour des situations qui nécessitent appareils et des fournitures coûteux, ou qui impliquent des expériences dangereuses; toutefois, les laboratoires réels sont également nécessaires afin de permettre aux apprenants de se familiariser avec des tâches et des équipements professionnels de la vie réelle. Généralement, les enseignants indiquent qu’à leurs yeux ces laboratoires sont pareils et soutiennent l’assertion selon laquelle les deux laboratoires sont essentiels pour obtenir une vision holistique de la réalité, dans la mesure où ils présentent tous deux des caractéristiques intéressantes et utiles, adaptées à l’apprentissage (Tsichouridis et al., 2019).

Des études ont révélé que les laboratoires virtuels peuvent conduire à une augmentation des résultats non cognitifs tels que la motivation et l’auto-efficacité qui peuvent découler de la réalisation des activités en laboratoires virtuels et conduire à de meilleurs résultats scolaires et dans la vie active (Heckman et Kautz, 2012; Heckman et al. 2006; Makransky et al., 2016). En outre, le recours aux simulations virtuelles et aux laboratoires virtuels dans le cadre de la ludification du programme d’études peut être amusant pour les apprenants (Aljuhani et al., 2018; Carnevale, 2003).

Il est important de noter que les laboratoires en ligne peuvent être plus bénéfiques pour les apprenants ayant des besoins particuliers (Viegas et al., 2018) et que les ressources interactives peuvent constituer un excellent moyen de mener des activités d’apprentissage axé sur les problèmes et de développer l’esprit d’analyse (Klentien et Wannasawade, 2016).

Interactions dans les environnements d’apprentissage

Anderson (2008) évoque trois grands types d’interactions dans les environnements d’apprentissage:

  • interaction enseignant-apprenant
  • interaction apprenant-apprenant
  • interaction apprenant-contenu d’apprentissage

Ces interactions sont des éléments essentiels du processus d’apprentissage. Les activités d’apprentissage actif soutiennent toutes ces interactions et offrent aux apprenants des expériences d’apprentissage significatives et approfondies. Touchez ici pour lire le chapitre Towards a Theory of Online Learning (Vers une théorie de l’apprentissage en ligne) du livre intitulé The Theory and Practice of Online Learning édité par Terry Anderson.

Image tirée de The Theory and Practice of Online Learning, montrant les interactions pédagogiques entre un apprenant, un contenu d’apprentissage et un enseignant.

Remarque. Extrait de The Theory and Practice of Online Learning (chapitre 2) [Image], par Terry Anderson, 2008, université d’Athabasca. Licence Creative Commons (CC BY-NC-ND 2.5 CA).

En proposant des expériences interactives et immersives aux apprenants, nous nous concentrons sur l’interaction entre l’apprenant et le contenu. L’interaction entre l’apprenant et le contenu a toujours été une composante majeure de l’éducation formelle, même lorsqu’il s’agit d’études en bibliothèque ou de lecture de manuels dans le cadre d’un enseignement en face à face. Selon Anderson (2008), le Web 2.0 prend en charge ces formes plus passives d’interaction entre l’apprenant et le contenu, mais offre également une multitude de nouvelles possibilités, telles que l’immersion dans des micro-environnements, des exercices dans des laboratoires virtuels et des tutoriels d’apprentissage en ligne assistés par ordinateur.

Communauté d’apprentissage par l’enquête (CoI)

L’introduction d’activités d’apprentissage actif, de laboratoires virtuels et de simulations permet de créer et de développer une communauté d’apprentissage parmi les apprenants.

Une communauté d’apprentissage par enquête est un regroupement de personnes qui, en collaboration, s’engage dans un discours et une réflexion critiques afin d’en tirer une signification personnelle et de confirmer une compréhension mutuelle (Cadre de la CoI, n.d.).

Le cadre théorique de la communauté d’apprentissage par l’enquête représente un processus de création d’une expérience d’apprentissage profonde et significative (approche collaborative-constructiviste) par la mise en œuvre de trois éléments interdépendants: les présences sociale, cognitive et enseignante (Cadre de la CoI, n.d.). Pour plus d’informations, visitez le site Web du Cadre de la CoI.

Capture d’écran prise sur coi.athabascau.ca, représentant le processus de création d’une expérience d’apprentissage profonde et significative (approche collaborative-constructiviste) par la mise en œuvre de trois éléments interdépendants: présences sociale, cognitive et enseignante.

Remarque. Communauté d’apprentissage par l’enquête [Infographie]. Cadre de la CoI. https://coi.athabascau.ca/coi-model/

La présence sociale est «la capacité des participants à s’identifier parmi la communauté (par ex., le programme d’études), à communiquer activement dans un environnement de confiance et à établir des relations interpersonnelles en projetant leur personnalité individuelle» (Garrison, 2009, p. 352).

La présence enseignante est la conception, la facilitation et la direction des processus cognitifs et sociaux dans le but d’atteindre des résultats pertinents sur le plan pédagogique et significatifs sur le plan personnel (Anderson, Rourke, Garrison et Archer, 2001).

La présence cognitive est la mesure dans laquelle les apprenants ont la capacité d’élaborer et de confirmer une signification au moyen d’une réflexion et d’un discours approfondis (Garrison, Anderson et Archer, 2001).

L’utilisation des ressources Web interactives disponibles ou la création d’importantes ressources personnelles peuvent appuyer les trois éléments de la Col dans le cadre de vos cours. L’utilisation d’outils technologiques peut renforcer la présence cognitive; la possibilité de discuter d’une activité appuie la présence sociale; et l’apprentissage actif ainsi que les exercices collaboratifs permettant aux apprenants d’apprendre les uns des autres, peuvent renforcer la présence enseignante.

À propos de la conception d’activités de laboratoire scientifique virtuel

Les activités de laboratoire de sciences sont des processus d’apprentissage par l’enquête; de ce fait, le cadre d’apprentissage par l’enquête suggéré par de Jong et al. (2013) s’est avéré très utile pour analyser la conception d’activités de laboratoire virtuel. Ce cadre d’apprentissage par l’enquête comporte cinq étapes:

  1. Orientation
  2. Conceptualisation
  3. Enquête
  4. Conclusion
  5. Discussions

Au cours de la phase d’orientation, il est question de présenter le problème aux apprenants sont initiés au problème; le but étant de les motiver à apprendre. À l’étape de conceptualisation les apprenants se familiarisent avec les concepts théoriques liés au problème étudié. La phase d’enquête est consacrée à l’exploration libre du monde scientifique virtuel ou à l’expérimentation guidée. À l’étape de conclusion les apprenants analysent leurs résultats et formulent des conclusions. Pour terminer, la phase de discussions est essentielle pour une mise en œuvre efficace et effective des laboratoires de sciences virtuels. Cette méthode de conception des activités de laboratoire en ligne renforce également les présences sociale, enseignante et cognitive du cadre de la CoI mentionné plus haut. Toute forme d’appui au développement de compétences d’apprentissage autorégulé aidera les apprenants à exploiter efficacement les laboratoires virtuels.

Lire une description et un exemple d’activité basée sur cette approche dans l’article intitulé Supporting Students in Using Virtual Science Labs. Regarder la vidéo intitulée Design of Science Virtual Labs and Student Support.

Éventuels défis

Il est important pour le personnel éducateur et administratif d’examiner les défis possibles.Bien que les obstacles externes à lala mise en œuvre desnouvellestechnologiesdevraientêtrerésolusauniveauinstitutionnel, le personnel éducateur est confronté à de nombreux autres défisdans leurseffortsdemettre en œuvrede nouvellestechnologies del’éducationdans leurs salles de classe. Nous explorerons tout d’abord les défis auxquels le personnel éducateur peut être confronté, puis nous analyserons certaines solutions potentielles à ces défis. Le premier défi peut être une barrière interne qui inclut les attitudes et les croyances de l’enseignant sur le rôle de la technologie éducative et de la pédagogie, la confiance en ses connaissances et ses compétences, et la résistance à l’égard des technologies dans la salle de classe. Nous avons identifié trois points principaux o prendre en considération lors de l’intégration des nouvelles technologies dans les programmes d’apprentissage: l’accès (problèmes de connectivité internet et accès aux appareils technologiques), la formation et l’assistance. Ces trois points concernent aussi bien les enseignants que les apprenants. Pour une mise en œuvre des nouvelles ressources dans la salle de classe, il est recommandé de consacrer suffisamment de temps et d’efforts au perfectionnement professionnel des enseignants.

Les défis potentiels liés à l’intégration des technologies peuvent être les suivants:

  1. l’impossibilité pour certains apprenants d’accéder aux ressources en raison de problèmes techniques liés à leurs appareils;
  2. la création d’activités pratiques en ligne exige du temps et des efforts supplémentaires de la part des enseignants;
  3. la communauté de pratique joue un rôle crucial dans l’utilisation des nouveaux outils par les enseignants, mais constitue un élément qui vient s’ajouter aux responsabilités de l’enseignant;
  4. l’intégration de nouvelles ressources requiert de multiples tentatives et itérations;
  5. la création d’opportunités d’apprentissage actif asynchrone significatives pour des apprenants constitue un véritable défi;
  6. l’établissement d’un équilibre entre les instructions directes et l’exploration libre dans la conception des activités d’apprentissage peut nécessiter le soutien d’un concepteur pédagogique et une approche d’apprentissage par la pratique en matière de perfectionnement professionnel des enseignants.

Il est important de noter que dans le processus d’adoption de nouvelles technologies d’apprentissage, le personnel éducateur est confronté à un problème connu en ligne sous le nom de «double innovation» (Cleaver, 2014). En d’autres termes, une étape supplémentaire s’ajoute au processus de préparation pour les enseignants. En effet, l’enseignant doit d’abord se familiariser avec la technologie de manière à pouvoir bien l’utiliser en classe avant de décider de quelle façon intégrer la technologie aux objectifs et au programme du cours (Johnson, Jacovina, Russell et Soto, 2016). En raison de la double innovation, le temps de préparation se voit prolongé.

Recommandations

Au cours des deux dernières années, les formateurs ont considérablement accru leurs capacités d’utilisation des technologies éducatives. Toutefois, nous aimerions partager quelques stratégies qui peuvent encourager les instructeurs à continuer à utiliser les nouvelles technologies et promouvoir l’innovation dans l’enseignement et l’apprentissage.

L’enseignement est une expérience personnelle. Ainsi, le fait d’offrir aux instructeurs une variété d’options pour les outils technologiques à utiliser contribuera à rendre le processus plus confortable.

Voici quelques suggestionsà l’intention dupersonnel éducateurconcernant les technologiesnovatrices à adopter:

  1. Prévoyez du temps pour la formation initiale. Faites preuve de patience!
  2. Si possible, sollicitez du soutien pédagogique auprès du centre d’enseignement et d’apprentissage de votre établissement.
  3. Préparez des évaluations alternatives (dans le cas où un apprenant n’a pas accès à la technologie, ou si l’outil technologique n’est pas entièrement accessible).
  4. Maitrisez les caractéristiques d’accessibilitéd’une ressource particulière.
  5. Créez une communauté de pratique au sein de laquelle vous pourrez partager vos succès et vos défis avec vos collègues et vous soutenir mutuellement.
  6. Partagez les pratiques exemplaires et les meilleures activités avec vos collègues. Apprenez de vos pairs et avec vos pairs.
  7. N’ayez pas peur de commettre des erreurs et soyez prêt à en tirer des leçons.
  8. Si vous exploitez une nouvelle technologie dans le cadre de vos cours, veillez à consacrer du temps à l’apprentissage de l’outil par vos apprenants. Lorsqu’il s’agit de l’utilisation réelle des nouveaux outils, on n’est jamais à l’abri des difficultés inattendues.
  9. Pour terminer, et c’est peut-être le plus important, appréciez le processus d’apprentissage, le vôtre etcelui de vosapprenants! Le fait d’apprendre quelque chose de nouveau et de voir vos apprenants acquérir eux aussi de nouvelles connaissances peut être très gratifiant.

Ressources supplémentaires

EDUCAUSE Learning Initiative: 7 Things You Should Read About Instructional Strategies for Active Learning.

«Ne vieillissez pas, peu importe votre âge. Ne cessez jamais de contempler comme des enfants curieux le grand mystère dans lequel nous sommes nés» – Albert Einstein.

Références

Aljuhani K., Sonbul M., Althabiti M. et Meccawy M. (2018). Creating a virtual science lab (VSL): the adoption of virtual labs in Saudi schools. Smart Learning Environments 5(16). https://doi.org/10.1186/s40561-018-0067-9.

Anderson T. (2008). Towards a theory of online learning. Dans T. Anderson et F.Elloumi(Eds.), Theory and practice of online learning (2 édition, pp. 45-74). Athabasca: Université d’Athabasca. Extrait de:http://www.aupress.ca/index.php/books/120146.

Anderson T., Rourke L., Garrison D. R. et Archer W. (2001). Assessing teaching presence in a computer conferencing context.Journal of Asynchronous Learning Networks, 5(2), en ligne (disponible).http://www.aln.org/alnweb/journal/jaln-vol5issue2v2.htm.

Carnevale D. (2003). The virtual lab experiment: Some colleges use computer simulations to expand science offerings online. The Chronicle of Higher Education, 49(21).

Cleaver S. (2014). Technology in the Classroom: Helpful or Harmful? Extrait de http://www.education.com/magazine/article/effective-technology-teaching-child/.

CoI Framework. (n.d.) https://coi.athabascau.ca/coi-model/.

de Jong T., Sotiriou S. et Gillet D. (2014). Innovations in STEM education: The Go-Lab federation of online labs. Smart Learning Environments, 1.https://doi.org/10.1186/s40561- 014-0003-6.

Garrison D. R. (2009). Communities of inquiry in online learning: Social, teaching and cognitive presence. Dans C. Howard et al. (Eds.),Encyclopedia of distance and online learning(2e édition., pp. 352-355). Hershey, PA: IGI Global.

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Klentien U. et Wannasawade W. (2016). Development of blended learning model with virtual science laboratory for secondary students. Procedia – Social and Behavioral Science, 217, 706-711.

Makransky G., Thisgaard M. W.et Gadegaard H. (2016). Virtual simulations as preparation for lab exercises: Assessing learning of key laboratory skills in microbiology and improvement of essential non-cognitive skills. PLoS ONE, 11(6).

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Tsichouridis C., Vavougios D., Batsila M. et Ioannidis G. (2019). The optimum equilibrium when using experiments in teaching – Where virtual and real labs stand in science and engineering teaching practice. International Journal of Emerging Technologies in Learning (IJET), 14(23), 67–84. https://doi.org/10.3991/ijet.v14i23.10890.

Viegas C., Pavani A., Lima N., Marques A., Pozzo I., Dobboletta E., Atencia V., Barreto D., Calliari F., Fidalgo A., Lima D., Temporao G. et Alves. G. (2018). Impact of a remote lab on teaching practices and student learning. Computers and Education, 126, 201–216.