N01 : L’Électroencéphalogramme

Matin Yousefabadi

Une analyse de l’électroencéphalographie avec R : un guide pédagogique

Une introduction à l’électroencéphalographie (EEG)

L’électroencéphalogramme, ou EEG, est une technique de neuro-imagerie non invasive qui mesure et enregistre l’activité électrique du cerveau. Elle consiste à placer des électrodes sur le cuir chevelu pour détecter les fluctuations de tension résultant du courant ionique dans les neurones du cerveau. L’EEG fournit une représentation en temps réel de l’activité cérébrale et est largement utilisée en neurosciences informatiques pour étudier les processus neuronaux et comprendre le fonctionnement du cerveau.

En neurosciences informatiques l’analyse des données EEG se fait à l’aide d’algorithmes et de modèles mathématiques avancés afin d’extraire des informations précieuses sur les processus cognitifs, la perception sensorielle et divers troubles neurologiques. Les chercheurs utilisent l’EEG pour étudier les schémas d’activité neuronale, la connectivité cérébrale et la dynamique temporelle du traitement de l’information. La polyvalence et la précision temporelle de l’EEG en font un outil précieux pour étudier les fonctions cérébrales et contribuer à notre compréhension de l’interaction complexe des neurones dans le cerveau humain.

Les bandes de fréquence de l’EEG

Les signaux EEG sont caractérisés par différentes bandes de fréquence qui reflètent l’activité neuronale sous-jacente. Les bandes de fréquences sont définies en fonction de la gamme de fréquences du signal EEG, et chaque bande est associée à un type spécifique d’activité cérébrale. Les bandes de fréquence sont les suivantes :

  1. Ondes delta (δ) (0,5-4 Hz) :
    • Les ondes delta sont importantes pendant le sommeil profond et indiquent les oscillations les plus lentes du cerveau.
    • Les anomalies de l’activité delta peuvent être liées à certains troubles du sommeil et à des affections neurologiques.
  2. Ondes thêta (θ) (4-8 Hz) :
    • L’activité thêta est observée pendant la somnolence, la méditation et le sommeil paradoxal (mouvements oculaires rapides).
    • L’augmentation des ondes thêta est associée à la pensée créative et à la consolidation de la mémoire.
  3. Ondes alpha (α) (8-12 Hz) :
    • Prédominent pendant l’éveil détendu, les yeux fermés.
    • Les ondes alpha sont liées à un état mental calme et alerte.
  4. Ondes bêta (β) (12-30 Hz) :
    • Associées avec l’éveil actif et les tâches cognitives.
    • Les fréquences bêta élevées sont associées à une vigilance et une concentration accrues.
  5. Ondes gamma (γ) (30-100 Hz) :
    • Associées aux processus cognitifs de haut niveau, à la perception et à la résolution de problèmes.
    • Une activité gamma anormale peut être liée à certains troubles neurologiques.

L’étude de l’interaction de ces bandes EEG fournit des informations précieuses sur le fonctionnement du cerveau, aidant les chercheurs et les cliniciens à comprendre les processus cognitifs, à diagnostiquer les troubles et à mettre au point des interventions thérapeutiques. L’analyse des données EEG permet d’explorer la dynamique cérébrale et peut ouvrir de nouvelles perspectives sur la complexité de l’esprit humain.

 

Canaux EEG et positionnement des électrodes

Dans les données EEG (électroencéphalographie), les canaux font référence aux endroits spécifiques du cuir chevelu où des électrodes sont placées pour enregistrer l’activité électrique produite par le cerveau. Ces électrodes font partie d’un capuchon ou d’un réseau EEG. Chaque canal correspond à une électrode unique, et les signaux recueillis à partir de ces canaux fournissent collectivement une vue d’ensemble de l’activité cérébrale.

L’emplacement des canaux est crucial pour la capture des signaux provenant des différentes régions du cerveau. Des normes internationales communes, telles que le système 10-20, sont utilisées pour définir l’emplacement de ces canaux. Ce système doit son nom au fait que la distance entre les électrodes adjacentes représente environ 20 % de la distance totale entre l’avant et l’arrière ou entre la droite et la gauche du crâne, en fonction de la région. Chaque canal enregistre les fluctuations de tension en temps réel, reflétant l’activité électrique des neurones dans la région cérébrale sous-jacente. L’analyse des données EEG provenant de plusieurs canaux permet aux chercheurs et aux cliniciens d’examiner la distribution spatiale de l’activité cérébrale et d’identifier les schémas associés à divers états cognitifs, troubles ou tâches spécifiques.

 

L’analyse des données EEG avec R

Dans cette section, nous nous concentrons sur l’analyse des données EEG à l’aide de R. Même si l’analyse des données EEG peut être effectuée à la fois avec MATLAB et R, et que le choix entre les deux dépend souvent des préférences du chercheur, de la disponibilité de boîtes à outils ou de packages spécifiques, et de la nature de l’analyse, MATLAB est un choix plus populaire pour l’analyse des données EEG en raison de sa large gamme de packages pour l’analyse des données EEG.

Les outils principaux pour R :

Il existe plusieurs outils pour prétraiter, visualiser et extraire des informations significatives des enregistrements EEG. Vous trouverez ci-dessous un bref aperçu des étapes typiques de l’analyse des données EEG à l’aide de R :

  • eegkit: Un outil pour l’importation et le prétraitement des données EEG dans R.
  • eegUtils: Un outil pour effectuer le prétraitement de base de l’EEG et le traçage des données EEG.
  • ERP: Un logiciel pour analyser, identifier et extraire les potentiels liés à l’événement (ERP) liés à des stimuli ou des événements spécifiques dans R.

Des logiciels clés :

  • EEGLAB: boîte à outils MATLAB pour le traitement et l’analyse des données EEG. Elle comprend une variété de fonctions pour l’importation, le prétraitement, la visualisation et l’analyse des données EEG. EEGLAB fournit également une interface utilisateur graphique (GUI) pour l’analyse des données EEG.
  • FieldTrip: Boîte à outils MATLAB pour l’analyse des données EEG et MEG. Elle comprend des algorithmes pour l’analyse simple et avancée des données MEG et EEG, tels que l’analyse temps-fréquence, la reconstruction des sources à l’aide de dipôles, de sources distribuées et de formateurs de faisceaux, l’analyse de la connectivité et les tests statistiques non paramétriques.
  • Brainstorm: Une boîte à outils MATLAB dédiée à l’analyse des enregistrements cérébraux : MEG, EEG, fNIRS, ECoG, électrodes de profondeur et électrophysiologie multi-unités.

Traitement de l’EEG et analyse statistique en R

Prétraitement de l’EEG

Ce processus vise à éliminer le bruit, les artefacts et autres éléments indésirables tout en préservant l’intégrité des signaux neuronaux. Un prétraitement efficace garantit des résultats fiables lors des analyses ultérieures, en se concentrant sur l’activité neuronale réelle. Voici les principales étapes du prétraitement des données EEG :

  1. Filtrage :
    • L’application de filtres permet d’éliminer les bruits et les artefacts indésirables. Les filtres passe-bas éliminent les bruits à haute fréquence, tandis que les filtres passe-haut suppriment les dérives lentes.
    • Des filtres à encoche peuvent être utilisés pour éliminer des fréquences spécifiques, telles que les interférences des lignes électriques.
  2. Suppression des artefacts :
    • Identifier et supprimer les artefacts causés par les mouvements oculaires, l’activité musculaire ou les interférences externes.
    • Des techniques telles que l’analyse en composantes indépendantes (ICA) peuvent aider à séparer et à éliminer les artefacts du signal EEG.
  3. Segmentation :
    • Diviser le signal EEG continu en segments plus courts, ce qui facilite l’analyse d’événements ou de tâches spécifiques.
    • La segmentation permet aux chercheurs de se concentrer sur des périodes d’intérêt, telles que la présentation d’un stimulus ou les réponses motrices.
  4. Correction de la ligne de base :
    • Ajuster le signal EEG pour obtenir une ligne de base cohérente, souvent en soustrayant le signal moyen sur une période pré-stimulus spécifique.
    • La correction de la ligne de base permet de comparer les changements relatifs des amplitudes EEG dans différentes conditions expérimentales.
  5. Référencement :
    • Choisissez une référence appropriée pour les données EEG. Les références les plus courantes sont la référence moyenne ou les mastoïdes liés.
    • La référence garantit que les signaux enregistrés reflètent l’activité par rapport à un point défini.
  6. Interpolation :
    • Traiter les canaux manquants ou de mauvaise qualité en interpolant leurs valeurs sur la base des informations relatives aux électrodes environnantes.
    • Cette étape permet de maintenir l’intégrité spatiale des données EEG.
  7. Normalisation :
    • Normaliser les amplitudes EEG si nécessaire, afin de faciliter les comparaisons entre différents sujets ou conditions expérimentales.

En mettant en œuvre ces étapes de prétraitement, les chercheurs peuvent améliorer la qualité des données EEG, réduire le bruit et améliorer la précision des analyses ultérieures, ce qui permet d’obtenir des informations plus fiables sur les fonctions cérébrales et la cognition.

Analyse statistique des données EEG

L’analyse statistique des données EEG (électroencéphalographie) est essentielle pour tirer des conclusions significatives des résultats expérimentaux. Les expériences EEG impliquent souvent la comparaison de conditions, de groupes ou de points dans le temps afin de découvrir des modèles d’activité cérébrale associés à des processus cognitifs spécifiques ou à des manipulations expérimentales. Voici un aperçu des principales considérations et méthodes d’analyse statistique des données EEG :

  1. Statistiques descriptives :
    1. Utiliser des mesures telles que la moyenne, la médiane et l’écart-type pour fournir un résumé de la tendance centrale et de la variabilité des signaux EEG.
    2. Les statistiques descriptives permettent une compréhension préliminaire des caractéristiques des données.
  2. Statistiques inférentielles :
    1. Appliquez les statistiques inférentielles pour faire des prédictions ou des déductions sur la population dans son ensemble, sur la base des données EEG observées.
    2. Les tests courants comprennent les tests t, l’ANOVA et l’analyse de régression pour évaluer l’importance des différences entre les conditions ou les groupes.
  3. Analyse temps-fréquence :
    1. Utilisez des techniques telles que la transformée de Fourier rapide (FFT) pour analyser le contenu en fréquence des signaux EEG dans le temps.
    2. L’analyse temps-fréquence permet de comprendre les changements dynamiques de l’activité cérébrale associés à différentes tâches ou stimuli.
  4. Potentiels liés à l’événement (PFE) :
    1. Extraire et analyser les ERP pour examiner les réponses neuronales associées à des événements ou des stimuli spécifiques.
    2. Les méthodes statistiques permettent d’identifier les composantes significatives des ERP et les différences entre les conditions expérimentales.
  5. Regroupement et classification :
    1. Utilisez des algorithmes de clustering pour regrouper les modèles EEG et révéler les structures cachées dans les données.
    2. Les méthodes de classification, telles que les algorithmes d’apprentissage automatique, permettent de distinguer différents états ou conditions cognitifs.
  6. Analyse des corrélations :
    1. Explorer les relations entre les caractéristiques de l’EEG et les variables comportementales ou cliniques.
    2. L’analyse des corrélations permet d’identifier les associations qui contribuent à une compréhension globale des relations entre le cerveau et le comportement.
  7. Correction des comparaisons multiples :
    1. Mettre en œuvre des méthodes de correction, telles que Bonferroni ou le taux de fausse découverte (FDR), pour résoudre le problème des taux d’erreur de type I gonflés lors de la réalisation de tests statistiques multiples.
  8. Cartographie topographique :
    1. Créez des cartes topographiques pour visualiser les distributions spatiales de l’activité EEG.
    2. Les analyses statistiques peuvent mettre en évidence des différences significatives entre les régions du cerveau dans diverses conditions expérimentales.

En utilisant ces approches statistiques, les chercheurs peuvent tirer des conclusions solides des données EEG, découvrir des modèles et élucider les mécanismes neurophysiologiques qui sous-tendent les processus cognitifs ou les conditions cliniques.

Utilisation de eegkit pour l’analyse des données EEG en R.

# Install eegkit package
install.packages("eegkit")
# Load eegkit package
library(eegkit)
# Load EEG data
data("eegdata")
# View the first 5 rows of the data
head(eegdata)

eegsmooth Lissage de l’électroencéphalographie (EEG) à un ou plusieurs canaux dans l’espace et/ou le temps.

  • Exemple : Lissage des données dans le temp
    
    ## get "PZ" electrode of "c" subjects 
    idx <- which(eegdata$channel=="PZ" & eegdata$group=="c")
    eegdata1 <- eegdata[idx,]
    
    ## Lissage temporal
    eegmod <- eegsmooth(eegdata1$voltage,time=eegdata1$time)
    
    ## Définir les données pour la prédiction
    time <- seq(min(eegdata1$time),max(eegdata1$time),length.out=100) yhat <- predict(eegmod,newdata=time,se.fit=TRUE) ## visualiser les résultats avec eegtime eegtime(time*1000/255,yhat$fit,voltageSE=yhat$se.fit,ylim=c(-4,4),main="Pz")

`eegtime` Creates plot of single-channel electroencephalography (EEG) time course with optional confidence
interval. User can control the plot orientation, line types, line colors, etc.
Example: Plotting a single channel
## get "PZ" electrode from "eegdata" data
idx <- which(eegdata$channel=="PZ")
eegdata2 <- eegdata[idx,]

## get average and standard error (note se=sd/sqrt(n))
eegmean <- tapply(eegdata2$voltage,list(eegdata2$time,eegdata2$group),mean)
eegse <- tapply(eegdata2$voltage,list(eegdata2$time,eegdata2$group),sd)/sqrt(50)

## plot results with legend
tseq <- seq(0,1000,length.out=256)
eegtime(tseq,eegmean[,2],voltageSE=eegse[,2],ylim=c(-10,6),main="Pz")
eegtime(tseq,eegmean[,1],vlty=2,vcol="red",voltageSE=eegse[,1],scol="pink",add=TRUE)
legend("bottomright",c("controls","alcoholics"),lty=c(1,2),
       lwd=c(2,2),col=c("blue","red"),bty="n")
 

Références et lectures complémentaires : 

  • L’atelier en ligne EEGLAB propose un tutoriel sur l’analyse des données EEG dans MATLAB.
  • Des informations plus détaillées sur l’analyse des données EEG en R sont disponibles dans la documentation eegkit.
  • Pour plus d’informations sur l’analyse des données EEG en Python, consultez la documentation MNE.
  • Pour plus d’informations sur l’analyse des données EEG en MATLAB, consultez la documentation EEGLAB

Exemple d’étude EEG statistique : Différences de niveau de tension entre les groupes

Dans une étude portant sur des enregistrements EEG, les données de 10 alcooliques et de 10 sujets témoins ont été recueillies au cours d’une expérience de 10 secondes. L’ensemble de données comprend quatre colonnes : “ID”, “Groupe”, “Temps” et “Tension”.

Analyse exploratoire en R

  • Chargez l’ensemble de données EEG à l’aide de la commande read.csv() dans R.
  • Dans l’ensemble de données, le groupe est un facteur à deux niveaux : Contrôle et Alcool.

Analyse statistique en R

Effectuez les analyses suivantes à l’aide des données chargées :

  1. Visualisation de la tension lors du EEG :
    1. Créez un tracé linéaire pour visualiser la tension EEG au fil du temps pour le participant avec l’ID 1.
  2. Statistiques descriptives :
    1. Calculer les statistiques descriptives (moyenne, écart-type, etc.) pour la colonne “Voltage” au sein de chaque groupe (alcooliques et sujets témoins).
  3. Test T :
    1. Effectuez un test-t sur  des échantillons indépendants pour évaluer s’il existe une différence significative dans les valeurs moyennes de tension entre les alcooliques et les sujets témoins. Tirer des inférences basées sur les résultats.
  4. Analyse ANOVA :
    1. Effectuez une analyse de la variance (ANOVA) pour évaluer s’il existe des différences significatives dans les valeurs moyennes de tension entre les groupes. Faites des déductions sur la base des résultats.

Cette étude vise à explorer et à analyser statistiquement les données EEG afin de déterminer s’il existe des différences perceptibles dans les niveaux de tension entre les alcooliques et les sujets témoins. La combinaison de la visualisation exploratoire et des tests statistiques permet une compréhension globale des schémas EEG et des distinctions potentielles entre les groupes.

Fichiers à télécharger :

  1. eeg.csv

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N01 : L'Électroencéphalogramme Copyright © 2024 by Matin Yousefabadi is licensed under a Creative Commons Attribution-NonCommercial-ShareAlike 4.0 International License, except where otherwise noted.

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