Chapitre 4 : La lutte contre le racisme et la communication du personnel infirmier

Le pouvoir des mots

La plupart d’entre nous ont grandi en entendant l’adage suivant : « La bave du crapaud n’atteint pas la blanche colombe. » Ce proverbe vise à nous faire sentir forts et courageux, mais il est loin d’être vrai.

Les mots sont puissants, et ils font mal.

Non seulement les mots font mal lorsqu’ils sont prononcés, mais ils peuvent aussi avoir des effets durables sur la santé et le bien-être. Dans les chapitres précédents, nous avons discuté de la façon dont les expériences de racisme peuvent mener à des problèmes physiques aigus et chroniques, ainsi qu’à des sentiments d’insuffisance dans la société. Les mots et les expressions racistes jouent un rôle important dans la perpétuation de pratiques racistes. Les propos racistes sont souvent dénoncés en raison des lois et des politiques du milieu de travail et peuvent mener à des mesures disciplinaires. Alors, comment le racisme se présente-t-il?

La réponse est que le discours raciste est facilement déguisé et est souvent accompagné de « Je ne savais pas que je ne pouvais pas dire ça! » Beaucoup de gens ne prennent pas le temps de penser au-delà des mots ou de la phrase et de la douleur émotionnelle qu’ils peuvent causer à une personne noire et racialisée. Ce type de douleur émotionnelle est souvent appelé traumatisme racial, c’est-à-dire les effets cumulatifs et traumatisants du racisme et sa récurrence continuelle qui peut comporter des effets psychologiques et physiques comme du stress, des cauchemars, des flashbacks, des maux de tête et des palpitations cardiaques. (Comas-Diaz et coll., 2019). En comprenant les traumatismes raciaux, nous pouvons prendre conscience du fait que les mots peuvent ne pas avoir une grande incidence sur une population, mais qu’ils peuvent changer la vie d’autres personnes et leur nuire. Prenons un moment pour réfléchir au pouvoir des mots.

Imaginez que vous regardez un film qui se déroule dans une campagne du Sud des États-Unis. Un jeune homme blanc interpelle un Noir plus âgé : « Mon gars! » Quel est le sens de ce terme? Il mine la maturité de l’homme noir et signifie à l’homme noir qu’il n’est pas un adulte, qu’il est moins intelligent, et tout simplement « moins que » l’homme blanc, ce qui a des effets durables sur l’estime de soi de l’homme noir. Un autre exemple est qu’après le 11 septembre, les communautés musulmanes ont été étiquetées comme des terroristes, ce qui a créé de la peur et de la méfiance à leur égard. Lorsque des suprémacistes blancs ont pris part à une émeute à Charlottesville en réponse au retrait proposé de la statue du général Robert E. Lee, le président des États-Unis de l’époque les a publiquement qualifiés de « bonnes personnes ». Ces exemples illustrent le pouvoir des mots et la façon dont ils peuvent criminaliser un groupe et en exonérer un autre.

L’histoire du racisme envers les Noirs reflète l’influence des mots utilisés à l’égard des Noirs, des Autochtones et d’autres communautés racialisées; certains de ces mots ont également été étendus à certains groupes d’immigrants blancs considérés comme inférieurs. Ces mots continuent d’influencer les croyances et la façon dont certaines populations sont perçues– , car les mots ont du pouvoir.

 

Vidéo : Le pouvoir des mots [8:03]

Références

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