3 Travailler dans des milieux autochtones et collaborer avec des chef.fe.s autochtones

Anthony de Padua et Norma Rabbitskin

Le leadership signifie s’appuyer sur des principes enracinés dans les valeurs et les pratiques de notre culture.

– Norma Rabbitskin, 2017

Introduction

Pour être un leader efficace, il faut développer des compétences, connaissances et attitudes qui favorisent de bonnes relations de travail avec les communautés, les chef.fe.s et les personnes autochtones. Nichols (2004) souligne que les programmes de soins infirmiers préparent les futur.e.s membres du personnel infirmier au rôle de leader dans leur profession, mais omettent de les former à assumer ce rôle à la manière autochtone (p. 177). Julien, Wright et Zinni (2010) reconnaissent par ailleurs que les théories actuelles sur le leadership reflètent souvent des idées culturelles des sociétés occidentales et ne tiennent pas compte des visions autochtones du monde. Ce chapitre présente une sélection de défis et visions autochtones que la population étudiante pourra comparer avec ses propres interprétations des cultures autochtones. Il fournit aussi des recommandations et des exemples qui indiquent comment les leaders peuvent manœuvrer dans les différents mondes culturels dans lesquels ils vivent et travaillent, et comment ils peuvent les déchiffrer. Bien que ce chapitre aborde les points de vue autochtones, il est important de reconnaître que les cultures autochtones au Canada sont extrêmement diversifiées, non seulement entre les différents territoires visés par un traité, mais aussi entre les communautés voisines. Il existe cependant des normes communes qui s’appliquent à de nombreuses communautés autochtones. Dans ce chapitre, les auteur.e.s présentent certains récits ainsi que leurs connaissances sur le leadership en soins infirmiers dans le but d’aider la population étudiante à mieux comprendre comment remplir son rôle de responsable en soins infirmiers en collaboration avec les chef.fe.s autochtones.

Objectifs d’apprentissage

  1. Relever les différences entre vos propres visions du monde et celles des Autochtones.
  2. Réfléchir de façon critique aux façons dont les différentes visions peuvent influencer les décisions en matière de leadership.
  3. Reconnaître au sein des communautés autochtones les structures de leadership qui leur sont propres.
  4. Définir les avantages d’une collaboration avec les membres des communautés autochtones.

3.1 Regard sur la littérature

Plusieurs différences distinguent les styles de leadership autochtones des autres types de leadership. L’utilisation d’une imagerie et de récits traditionnels en est un bon exemple (Julien et coll., 2010; Nichols, 2004). Les histoires deviennent des vecteurs pour l’apprentissage de leçons qui ont également un lien avec la terre et l’identité autochtone (Nichols, 2004; Wolfgramm, Spiller et Voyageur, 2016).

Expérience sur le terrain

Pensons à l’importance de s’ouvrir aux différents styles d’apprentissage et de rester à l’écoute du point de vue des autres.

Je me rappelle ma première discussion en tant que non-Autochtone avec un aîné autochtone. Nous explorions sa vision des gens et d’une situation particulière que je jugeais importante dans le milieu correctionnel. Au fil de notre discussion, il m’a demandé de m’asseoir avec lui autour d’une tasse de thé. Je croyais au départ qu’il s’agirait d’une entrevue où j’interrogerais cette personne, mais en fin de compte, ce fut une conversation avec un homme humble ayant des dizaines d’années d’expérience à son actif. Sa nature modeste m’a aussitôt mis à l’aise et la manière dont il parlait et me considérait m’a fait réaliser à quel point j’avais encore beaucoup à apprendre. Lorsque je lui posais des questions, il me racontait des histoires qui m’ont fait comprendre que je devais voir ces questions sous un angle différent.

– Anthony de Padua, IA, Ph. D.

Nichols (2004) a organisé des groupes de discussion avec des responsables autochtones en soins infirmiers qui lui ont permis de conclure que le point de référence de ces professionnel.le.s autochtones était les personnes qu’ils desservent : leurs familles et leurs communautés tribales. Les responsables autochtones en soins infirmiers étaient étroitement liés à leurs communautés et leur vision du leadership consistait à mener l’organisation et la communauté en un même ensemble.

Felicity (1999) et Nichols (2004) ont renchéri que les leaders autochtones ont une vision holistique du leadership et se préoccupent de la communauté. Julien et coll. (2010) ont approfondi cette notion de leadership holistique en expliquant que la spiritualité est au centre des pratiques et croyances des leaders autochtones :

Un des participants a souligné que ses collègues non autochtones se concentraient généralement sur les processus et étaient fortement motivé.e.s par les résultats purement axés sur les profits, tandis qu’il voyait son travail comme une réalisation spirituelle. Il a exprimé sa pensée comme suit : « Le travail que nous faisons n’est pas une question d’éducation ni de recherche, mais plutôt de spiritualité; les choses qui l’entourent ne sont qu’une partie du processus global. » (p. 119-120.)

Julien et coll. (2010) ont également mentionné l’importance du temps pour les leaders autochtones. Le savoir transmis par nos défunt.e.s aîné.e.s doit être pris en compte, exploité et reconnu. Il est également important de penser aux répercussions que nos résolutions auront sur les générations futures (les sept prochaines générations).

Comme l’explique Madeleine Leininger, théoricienne des soins infirmiers, les responsables en soins infirmiers doivent penser à la population qu’ils desservent. Sa théorie sur les soins infirmiers transculturels englobe le concept de sensibilité culturelle, c’est-à-dire la capacité du personnel infirmier à prendre en compte le contexte culturel d’une personne dans sa pratique [et son leadership] en soins infirmiers (Johnson et Webber, 2015, p. 207).

3.2 Vie au sein de la communauté : comprendre la vision du monde et les structures de leadership des Autochtones

La section 3.2, racontée par Norma Rabbitskin de la Première Nation Big River, se fonde sur le savoir traditionnel. Norma est une gardienne du savoir des coutumes de la Première Nation Big River. Ce savoir traditionnel N’EST PAS soumis à une licence Creative Commons Attribution 4.0 International. Veuillez respecter le protocole de transmission du savoir traditionnel autochtone et communiquer avec Norma Rabbitskin, au Sturgeon Lake Health Centre, si vous souhaitez utiliser ce contenu à d’autres fins.

Norma Rabbitskin s’est naturellement engagée dans une carrière de soins. Membre de la Première Nation de Big River, elle parle couramment le cri. Son expérience professionnelle compte plus de 29 ans à titre d’IA. Elle a passé la majorité de sa carrière auprès des communautés autochtones. Dans la section qui suit, elle transmet ses diverses connaissances en soins infirmiers et les enseignements qu’elle a acquis auprès de sa famille, de responsables de cérémonies, de gardiens du savoir et de divers dirigeant.e.s. Norma fait part de son expérience de travail auprès des communautés autochtones et des compétences essentielles en leadership requises pour superviser un programme de soins infirmiers.

D’abord et avant tout, à titre de membres des Premières Nations, nous reconnaissons le Créateur et les principes de la création. Nous défendons la loi naturelle, notre façon d’être et de vivre en harmonie avec l’askîy pimâtisiwin (la vie terrestre). Les connaissances sont transmises d’une génération à l’autre par la tradition orale et sont renouvelées lors de cérémonies, en commençant par l’histoire de la création. La culture est un mode de vie; elle maintient et préserve le caractère sacré de la vie et enseigne comment vivre en harmonie dans le cercle de la vie et avec toutes les relations sur Terre. Le rôle des keytayak (les anciens) modélise un processus d’intégration doux où chaque personne imagine sa pleine capacité et son bien-être pour réaliser tout son potentiel.

Modèle holistique de leadership d’après les enseignements du cercle de la vie

En tant que responsables du personnel infirmier, nous devons trouver des moyens efficaces d’outiller les personnes et leurs familles et nous devons comprendre ce qu’est la santé pour une communauté autochtone. Pour ce faire, nous participons à un apprentissage par l’expérience de la culture et de la vision du monde autochtones.

Enseignements du cercle de la vie

Nos aîné.e.s nous disent que le processus de maturation et d’apprentissage de l’être humain n’est pas linéaire, mais que la vie est plutôt un cercle, nous rappelant que, où que nous allions et quoi que nous vivions, le moi demeure présent, nous ramenant à nous-mêmes, à nos familles et à notre communauté avec tout ce que nous sommes devenus pendant le processus d’apprentissage. Les enseignements des lois naturelles créent une base pour la guérison et la compréhension de l’interconnexion de notre développement autochtone (mental, émotionnel, physique et spirituel) et de nos relations humaines (famille, communauté). Les enseignements du cercle de la vie représentent un mode de vie qui favorise la santé et le bien-être. Cette vision reflète une philosophie de vie et de guérison holistique et centrée sur la terre que l’on ne trouve pas souvent dans les approches occidentales de la santé. Les aîné.e.s disent que le cercle de la vie nous enseigne l’interdépendance : si on prend le temps de se guérir soi-même en tant que personne, on aide sa famille à guérir. Lorsque les familles commencent à changer ou à guérir, les communautés changent également. Plus les communautés tendent vers le bien-être, plus les personnes trouveront la voie de la guérison. Au moment de planifier ou d’élaborer des programmes, nous devons tenir compte de tout le monde, dans une optique holistique : la personne, la famille et la communauté.

La personne

Nos aîné.e.s enseignent le principe selon lequel tous les aspects d’une personne, physique, mental, émotionnel et spirituel, doivent être pris en compte et en harmonie afin de promouvoir une santé et une guérison holistiques. Une bonne santé exige un état de bien-être optimal dans ces quatre domaines. Le bien-être découle du maintien de l’équilibre et de l’harmonie entre tous ces domaines et avec la nature. Une approche holistique de la santé prend également en compte l’importance de la culture, de la langue et de la tradition. Les aîné.e.s sont sollicités pour leurs conseils sur le plan émotionnel.

La santé mentale fait référence à la façon de penser et aux pensées, y compris les connaissances, l’éducation, la lecture et l’apprentissage au sujet des maladies chroniques. Les personnes apprennent à s’autodiscipliner, à prendre des décisions saines, à résoudre des problèmes et à changer les choses. Une santé mentale optimale se traduit par des choix sains.

La santé émotionnelle fait référence à la reconnaissance et à l’acceptation des sentiments : la peur, la colère, la confusion, la tristesse, la dépression, la solitude, l’inquiétude et l’anxiété. Apprendre à exprimer ses sentiments de manière adéquate au moyen de compétences d’adaptation efficaces qui aident à maintenir l’équilibre conduit à un sentiment de bien-être dans les périodes difficiles. Une santé émotionnelle optimale se traduit par une amélioration de l’estime de soi, de la conscience de soi, du positivisme, de la confiance, de l’honnêteté et de l’espoir.

La santé physique consiste à prendre soin de son corps : manger sainement et de manière équilibrée, maîtriser son poids, faire de l’exercice et bouger tous les jours et se reposer. Les personnes apprennent à développer des habitudes saines et à éviter les habitudes destructrices telles que le tabagisme, la toxicomanie et l’alcoolisme. Le fait de prendre soin de soi peut se concrétiser lorsque les personnes apprennent à prendre la responsabilité de leur santé, à être bonnes et bienveillantes et à s’aimer et à se respecter.

La santé spirituelle fait référence à la volonté de vivre en harmonie avec une puissance supérieure et à trouver un sens à sa vie. En adoptant des valeurs, les personnes peuvent alors choisir des activités et des comportements en cohérence avec elles. Les personnes cherchent des conseils spirituels auprès des aîné.e.s et participent à des cercles de partage, de guérison et de discussion. Une santé spirituelle optimale se traduit par une vie de prière, de foi, de croyance, d’espoir, d’amour, d’acceptation, de pardon et de respect.

Aujourd’hui, le personnel de la santé identifie de manière active les attributs de la santé ou du bien-être tels que les personnes desservies les définissent. Afin d’outiller efficacement la clientèle, nous devons, en tant que personnel infirmier, comprendre ce qu’est la santé pour une communauté autochtone. Il faut être attentif à la population desservie et aux pratiques culturelles de guérison. Auparavant, les communautés autochtones observaient un modèle holistique qui oriente la manière de réagir aux maux. Par exemple, la clientèle obtient des résultats de santé différents :

  • selon le point de vue, notamment s’il est axé sur le bien-être ou sur la maladie;
  • si le travail se fait avec la famille plutôt qu’avec la personne seulement;
  • si l’on adopte une perspective à long terme ou ponctuelle.

La famille

La famille est le plus beau cadeau qui soit. Les aîné.e.s nous enseignent que le Créateur nous a donné un système familial. Il s’agit du lieu où tous les enseignements sont transmis des grands-parents aux parents et aux enfants. Dans cette perspective, tous les membres de la famille sont responsables de soutenir la santé et le bien-être des autres. Dans votre rôle à titre d’infirmier.ère, il est important que vous établissiez une relation entre vous et la personne soignée et entre vous et la famille. Ces relations sont essentielles à la qualité des soins holistiques prodigués à la personne et à la famille. Ces relations favorisent une expérience positive fondée sur la communication et la compréhension des besoins physiques, émotionnels, mentaux et spirituels et respectent les droits de la personne et de sa famille dans les décisions qu’elles prennent. À titre de membres du personnel infirmier, nous favorisons le changement qui les aide à atteindre leur vision de la santé et du bien-être.

Le travail auprès des communautés autochtones exige que le personnel infirmier fasse preuve d’esprit critique et de compétences en évaluation. L’intégration d’outils efficaces, tels que le modèle intégré d’évaluation et d’intervention familiale, qui s’appuie sur les points forts de la famille pour l’aider à trouver des stratégies pour résoudre des problèmes (Kaakinen et coll., 2014, p.92.), est essentielle. L’emploi de cet outil exige du personnel infirmier qu’il acquière des connaissances à la fois sur la personne et sur sa famille par l’entremise du génogramme familial (arbre généalogique). Il s’agit là de soins personnalisés qui témoignent de respect envers la clientèle et sa famille.

De solides compétences en communication et en relations interpersonnelles sont essentielles à la qualité des soins infirmiers dans une communauté autochtone. Si le personnel infirmier ne possède pas ces compétences, il aura une incidence négative sur une situation déjà délicate pour la clientèle et les familles autochtones. Un autre outil efficace pour la clientèle et les familles autochtones est le relevé des forces et des facteurs de stress des systèmes familiaux. Il s’agit d’un outil d’évaluation qui guide le personnel infirmier auprès des familles qui vivent des événements stressants en matière de santé… . pour miser sur les forces de la famille (Kaakinen et coll., 2014, p.93).

En tant que membre du personnel infirmier, nous devons créer des interventions qui mènent à des soins holistiques pour la clientèle et leurs familles selon une bonne évaluation. Les soins prodigués à la personne reposent sur une relation thérapeutique respectueuse entre le personnel infirmier, la personne et sa famille. Ce n’est que par une réflexion critique que nous pouvons examiner nos valeurs et nos croyances ainsi que nos connaissances en soins infirmiers dispensés aux familles pour entraîner un changement d’attitude et développer une relation thérapeutique de confiance avec la clientèle et les familles. Les relations solides reposent sur le fait de prendre le temps d’écouter les personnes, de planifier des visites à domicile, d’appeler les personnes et de maintenir la famille active dans le processus. Une composante essentielle des évaluations cliniques et communautaires consiste à poser des questions sur les préoccupations de santé et à demander à la clientèle comment les aider à atteindre leurs objectifs.

La communauté

Les Premières Nations ont accepté des visions élargies de la santé en s’appuyant sur leur culture et en tenant compte de paradigmes holistiques qui prêtent attention aux modes d’interconnexion de l’esprit, du corps et de l’âme. Dans une telle perspective inclusive, la culture des croyances, les coutumes et les pratiques en tant que fondements de la société autochtone dans laquelle les personnes baignent, s’ouvrent comme des sites pour des services intégrés et réactifs pour les personnes dans les milieux communautaires. Certains modes de culture, par exemple, comme la valorisation de la terre en tant que lieu de santé, l’établissement de relations et le développement d’esprits forts et déterminés grâce au savoir autochtone, sont reconnus comme des facteurs permettant de construire des personnes fortes ou comme des déterminants de la santé localisés bien réels. L’évaluation de l’état de santé et de bien-être des communautés passe nécessairement par l’examen de l’éthique communautaire qui incarne les croyances, les valeurs et les pratiques jugées essentielles à la vitalité de la communauté (Willie Ermine, Indigenous Knowledge Keeper, communication personnelle, avril 2017).

En tant que grand-mère et en tant que personne ayant choisi une profession en soins infirmiers, j’aime la façon dont les décisions de leadership sont prises dans la communauté autochtone. La base de la communauté est façonnée par les conseils que fournissent les gardien.ne.s du savoir, les guérisseur.euse.s, les responsables de cérémonies, les leaders et les aîné.e.s de la communauté. Par leur exemple, j’ai pu comprendre le spectre entier du leadership en matière de services. Ces gardien.ne.s du calumet, les responsables de cérémonies qui ont consacré leur vie au maintien de la médecine et des traditions culturelles, m’ont aidée à m’intégrer parfaitement dans un rôle de leadership infirmier. De plus, mes processus décisionnels sont issus de mon éducation crie et de cette expérience vécue, et ils sont fondés sur l’inclusivité, en toute reconnaissance du caractère sacré de toutes formes de vie.

Dans ma vision du monde, les décisions sont prises dans un esprit de réciprocité, c’est l’épine dorsale de ma vision du monde nehiyaw (crie) . Dans un esprit de réciprocité, nous donnons avant de prendre, et c’est le véritable partenariat du partage de l’espace et des ressources, c’est la manière dont nous interagissons. Je reconnais l’humanité de chacun et que personne n’est parfait. Je pense que les cérémonies et pratiques traditionnelles sont le fondement qui permet aux personnes d’assumer leurs responsabilités et d’aider autrui.

Pour jouer un rôle de leadership en soins infirmiers dans les communautés autochtones, il faut être conscient des systèmes de leadership qui coexistent. Les élus, qui ont des mandats définis par les différents paliers gouvernementaux, doivent rendre des comptes à la population. Je travaille dans une communauté autochtone située sur le territoire visé par le Traité no 6. Cette communauté a sa propre approche souveraine et cette population contrôle son propre système de santé. Le chef et le conseil votent sur les décisions qui sont par la suite présentées comme des résolutions du conseil de bande, selon un processus hautement politique dirigé par des membres élus de la réserve. Ces personnes assument ces rôles pour lesquels elles ont été élues parce qu’ils veulent servir la communauté en menant les membres dans un processus officiel organisé. Les protocoles et les cérémonies servent à inspirer les personnes à travailler au bien-être de la communauté.

Pour comprendre les structures de leadership autochtones en vigueur dans les diverses communautés autochtones, il faut d’abord créer un processus de dialogue qui s’appuie sur la réciprocité et le maintien d’un équilibre dans la coexistence. Le respect est au cœur de nos vies. Notre tradition orale en tant que peuple nehiyaw est un exemple des valeurs indiquant la façon de vivre en équilibre et en harmonie avec la loi naturelle. Il s’agit d’un véritable leadership ancré dans le territoire. Il existe deux grands types d’onikaniwak (pour ceux qui dirigent) dans les communautés autochtones et ce sont les suivants : (1) le leadership axé sur le service et (2) le leadership à la suite de l’élection du chef et du conseil. Il faut toutefois savoir que les aîné.e.s et les membres de la communauté pratiquent les deux types d’onikaniwak, mais ils le font selon différentes approches.

3.3 Histoire du système de santé dans les communautés autochtones

Dans l’esprit et l’intention des négociations des traités, les peuples autochtones ont négocié l’accès aux remèdes médicinaux et à l’expertise médicale requise pour traiter les nouvelles maladies dans la clause sur le buffet à médicaments du Traité 6 afin de fournir tout le nécessaire au maintien d’une bonne santé (Bureau du commissaire aux traités, 2000). Le gouvernement fédéral est responsable de la fourniture et du maintien des services de santé auprès des Autochtones. Depuis l’époque des traités, ces remèdes médicinaux comprennent les hôpitaux autochtones, les médicaments, les médecins, les examens et le traitement des malades, les rayons-X et la technologie médicale.

Par le passé, les relations entre les Autochtones et les colons ont été caractérisées par nombre d’expériences négatives et les deux sociétés se sont développées séparément. Pour la majorité des Canadien.ne.s, la Loi canadienne sur la santé et les lois provinciales ou territoriales garantissent les services de santé. Les Autochtones peuvent accéder aux mêmes services, mais dans des mesures différentes.

En 1989, le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social et le Conseil du Trésor du Canada ont commencé à travailler sur le transfert des services de santé pour les communautés autochtones du fédéral au palier communautaire. Le transfert des services de santé est un mécanisme administratif qui permet de transférer l’allocation de ressources financières de la Direction générale de la santé des Premières nations et des Inuits (DGSPNI) aux communautés autochtones pour un certains programmes de santé. Ce transfert aide les communautés autochtones à exercer une grande gouvernance sur le système de soins de santé de la communauté et à faire pression pour imposer des changements au besoin dans le système de santé.

Les buts et objectifs de la politique de transfert de santé étaient les suivants :

  • offrir aux populations autochtones la possibilité de participer activement à la planification, à l’administration et à la prestation de services de santé dans les réserves, à l’élaboration de politiques et à la recherche;
  • améliorer la santé des populations autochtones;
  • veiller à ce que les populations autochtones profitent de la même qualité de soins continus que le reste des Canadien.ne.s ;
  • permettre aux communautés de concevoir des programmes de santé, mettre en place des services et allouer des fonds en fonction des priorités de la communauté en matière de santé;
  • renforcer et améliorer la reddition de comptes des leaders devant les membres;
  • veiller à ce que la santé et la sécurité publiques soient préservées par l’adhésion à des programmes obligatoires (ministère de la Santé nationale et du Bien-être social et Conseil du Trésor du Canada, 1989; Smith et Lavoie, 2008).

Le tableau ci-dessous décrit les modèles de prestation de services selon un accord de contribution avec Santé Canada sous la DGSPNI.

Tableau 3.3.1 Modèles de prestation des services de santé (Source des données : Tableau selon les données de Lavoie et coll., 2005.)

Transfert à la communauté

Intégration dans la communauté

Communauté sous le contrôle de la DGSPNI

  • Les programmes de santé publique transférés sont déployés auprès de la communauté ou par le conseil tribal.
  • La responsabilité financière incombe à la communauté ou au conseil tribal.
  • Un financement quinquennal est versé pour les programmes.
  • Les programmes de santé publique sont guidés par les éléments suivants : (1) un cadre de mise en œuvre du transfert; (2) un plan de santé communautaire; et (3) un plan d’évaluation.
  • La DGSPNI fournit des programmes non transférables.
  • La DGSPNI assure le semi-transfert des programmes de santé publique.
  • Les communautés peuvent engager leur propre personnel infirmier.
  • La DGSPNI propose aux communautés des programmes de santé publique non transférables.
  • La DGSPNI fournit directement aux communautés des programmes de santé de deuxième ou de troisième niveaux.
  • La DGSPNI fournit des politiques et des services de santé spécialisés.
  • La DGSPNI affecte le personnel infirmier.

Le tableau ci-dessus présente les différences entre les systèmes de prestation de soins de santé que les communautés peuvent choisir d’adopter selon leur état de préparation, leurs besoins et les recommandations dans l’évaluation. Cette méthode leur permet de répondre aux tendances en santé en évolution dans la communauté.

La communauté où je travaille profite d’un transfert complet. Par conséquent, elle met en œuvre les programmes suivants dans la communauté et un soutien de deuxième ou de troisième niveau assure la prestation de certains services :

  • programmes de santé communautaire (promotion de la santé et prévention)
  • soins primaires communautaires
  • programmes de surveillance et de contrôle des maladies transmissibles (Northern Intertribal Health Authority, soutien de troisième niveau)
  • programmes communautaires de vaccination
  • Programme de santé environnementale et publique des Premières Nations (conseil tribal, soutien de deuxième niveau)
  • Programme national de lutte contre l’abus de l’alcool et des drogues chez les Autochtones (PNLAADA)
  • Programme de soins à domicile et de proximité (semi-transféré)

Les services communautaires sont fournis dans la communauté par le personnel infirmier et des représentant.e.s en santé communautaire, lesquel.le.s comprennent des travailleur.euse.s en toxicomanie et en soins maternels et infantiles. Les services de santé environnementale sont dispensés par des agent.e.s dans le domaine au deuxième niveau d’organisation (conseil tribal) et sont soutenus par le troisième niveau (province ou région sanitaire).

Le modèle de prestation des services de proximité transférés est guidé par le cadre de mise en œuvre du transfert, qui décrit la manière dont les services doivent être fournis et évalués. Les communautés respectent des critères stricts de déclaration avant que les fonds ne soient versés. Ces renseignements sont indiqués dans les accords de contribution de la DGSPNI. La prestation de services de santé pour le modèle de prestation intégrée diffère considérablement du modèle de soins de proximité transférés et a été approuvée en 1994 en vertu d’autorités distinctes du Conseil du Trésor. Un modèle intégré est considéré comme une étape vers le modèle de transfert complet. Les communautés peuvent sélectionner une série de programmes communautaires dans le cadre d’un accord de contribution unique qui peut durer jusqu’à cinq ans. Le financement est fondé sur les plans de travail communautaire et la communauté ou le conseil tribal doit demander la permission à la DGSPNI pour y apporter des changements. Le epport de fonds n’est pas autorisé et tout financement non dépensé doit être renvoyé.

La DGSPNI a une responsabilité fiduciaire (obligation légale d’agir dans l’intérêt de la communauté) et est responsable de l’ensemble du système de prestation de soins de santé pour les personnes vivant sur une réserve, une communauté autochtone. Le Conseil national du Trésor transfère des fonds à la région pour veiller à ce que les besoins en santé de tous les Autochtones soient satisfaits. De nos jours, la DGSPNI continue de surveiller la qualité des services que les Autochtones dispensent afin de veiller à ce que les accords de contribution soient respectés. Le type de financement de la santé de chaque communauté dépend de la désignation particulière de l’établissement. S’agit-il d’un bureau de la santé, d’un poste sanitaire, d’un centre de santé, d’un centre de santé avec traitement ou d’un poste de soins infirmiers. Chaque type d’établissement se différencie par le type et l’étendue des services qu’il fournit. C’est une préoccupation constante pour certaines communautés, car elle affecte le degré de financement auquel une organisation peut avoir accès.

Expérience sur le terrain

Pour moi, en tant que responsable autochtone du personnel infirmier qui travaille dans une communauté autochtone, il est essentiel d’enseigner au nouveau personnel infirmier la complexité du modèle de prestation de services et de les sensibiliser aux événements historiques qui constituent la base des stéréotypes négatifs et des attitudes racistes actuels au sujet des Autochtones. De nombreux progrès ont été réalisés pour établir des relations positives dans le système.

—Norma Rabbitskin, inf. aut., B. Sc. inf.

Pour obtenir de plus amples renseignements sur l’histoire de la santé et des maladies des Autochtones au Canada, voir le livre Aboriginal Health in Canada: Historical, Cultural, and Epidemiological Perspectives (2006) de Waldram, Herring et Young ou consulter le document Évaluation de la Politique de transfert des services de santé aux Premières Nations et aux Inuits (2004) de Lavoie et coll.

3.4 Structures de leadership

Au fil des ans, depuis que le système de transfert a été mis en place, des leçons importantes ont été tirées et nommées par les Premières Nations et les Inuits qui continuent à ce jour de combler les lacunes en plaidant pour des soins de santé équitables et unifiés, dans le respect des droits issus des traités. Les communautés autochtones travaillent avec des organismes qui les aident à mettre en œuvre les politiques et à protéger les droits issus des traités. La Federation of Sovereign Indigenous Nations (FSIN) représente 74 Premières Nations en Saskatchewan, et l’Assemblée des Premières Nations (APN) est l’organisation nationale représentative de 630 Premières Nations au Canada. Ces organismes travaillent avec les Premières Nations, par l’intermédiaire de leurs leaders, pour promouvoir, protéger et mettre en œuvre les promesses des traités dans des domaines tels que les droits autochtones et issus des traités, le développement économique, l’éducation, les langues et l’alphabétisation, la santé, le logement, le développement social, la justice, la fiscalité, les revendications territoriales et l’environnement ainsi que toute une série de sujets d’intérêt commun. Les communautés des Premières Nations font partie de 50 groupes distincts sur le plan culturel et linguistique dispersés partout au Canada. Il y a un certain nombre d’autres organismes politiques qui représentent aussi les différentes Premières Nations à différents degrés, notamment les conseils de bande locaux, les conseils tribaux et les organisations provinciales.

Le tableau suivant présente les niveaux de leadership dans la structure de leadership des Premières Nations et les responsabilités qui leur incombent. En tant que responsable du personnel infirmier, il est important de comprendre les structures de leadership des Premières Nations afin de savoir qui est responsable des domaines que le personnel infirmier pourrait vouloir aborder.

Tableau 3.4.1 Niveaux de leadership dans la structure de leadership des Premières Nations

Responsable de la gestion, du maintien et de la prestation
de services en soins de santé pour les points suivants  :

Premier et deuxième niveaux

(premier niveau – communauté de Premières Nations;

deuxième niveau – conseil tribal ou organisation de plusieurs communautés)

  • Gestion de dossiers (y compris les dossiers d’activité du personnel)
  • Système d’administration pour l’embauche et la supervision du personnel
  • Soutien professionnel
  • Conception et prestation du programme
  • Direction du programme
  • Soutien au programme
  • Évaluation du programme
  • Achat de matériel pédagogique
  • Supervision des éducateurs et des professionnels
  • Défense des intérêts
  • Collecte de données et préparation de rapports
  • Établissement de liens entre les programmes et coordination de ces derniers afin d’offrir un accès aux programmes sociaux pour les enfants et les familles à partir d’une seule source
  • Renforcement des capacités, notamment par la formation, l’éducation, le développement communautaire, le soutien par les pairs et le réseautage
  • Recherche communautaire

Troisième niveau

(régional ou provincial)

  • Maintien d’une relation de travail avec Santé Canada, Service Canada, Affaires autochtones et du Nord Canada (AANC) et l’Assemblée des Premières Nations (APN)
  • Représentation dans des groupes consultatifs et de travail régionaux, provinciaux et nationaux
  • Planification stratégique régionale pour le Nord
  • Intendance des données pour les partenaires, comme indiqué
  • Collecte de données et coordination avec les partenaires
  • Établissement de liens entre les programmes et coordination de ces derniers afin d’offrir un accès aux programmes et aux services
  • Renforcement des capacités, notamment par la formation, l’éducation, le développement communautaire, le soutien par les pairs et le réseautage
  • Soutien pour les programmes, comme la distribution d’information et de documents pertinents
  • Expertise clinique et des programmes
  • Coordination de la formation
  • Surveillance et évaluation des programmes
  • Recherche et évaluation

Quatrième niveau

(national)

  • Soutien à la recherche
  • Maintien d’une relation de travail entre Santé Canada, la Direction générale des services médicaux (DGSM), l’APN, Inuit Tapiriit Kanatami et AANC
  • Coordination des activités du comité directeur national et suivi des orientations
  • Communication continue d’information aux Premières Nations sur les avancées nationales
  • Élaboration des normes de programmes pour la formation et les soins
  • Analyse des données et préparation de rapports d’un point de vue national
  • Activités nationales d’évaluation et de reddition de comptes
  • Facilitation des programmes d’élaboration et de mise en œuvre

En tant que responsable du personnel infirmier qui travaille auprès de leaders et de communautés autochtones, il est important de revenir au modèle de planification et de politiques holistiques des Premières Nations (Reading, Kmetic, & Gideon, 2007), lequel a été créé pour mieux comprendre la structure des politiques, la planification et les interventions associées aux indicateurs de performance réalistes pour les communautés. Ce modèle tente de révéler la complexité du travail avec les communautés autochtones d’un point de vue autochtone. Il a les caractéristiques clés suivantes (p. 30) :

  • la communauté est au centre du modèle;
  • les quatre composantes de la roue de médecine (spirituelle, physique, émotionnelle et mentale);
  • les quatre cycles de la vie (enfance, jeunesse, âge adulte et âge d’or);
  • les quatre dimensions clés de l’autonomie des Premières Nations (autonomie/compétence, relations fiscales/responsabilité, droits collectifs et individuels, capacités/négociations);
  • les déterminants sociaux de la santé;
  • les trois composantes du capital social (les liens intracommunautaires, les liens intercommunautaires et liens entre les communautés et les institutions).

Activité d’apprentissage essentielle 3.4.1

Pour obtenir de plus amples renseignements sur le modèle de planification et de politiques holistiques des Premières Nations, voir la page 5 du document First Nations’ Wholistic Approach to Indicators. Il s’agit d’un document que l’Assemblée des Premières Nations (Canada) a présenté au congrès sur la recherche sur les politiques autochtones qui s’est tenu à Ottawa, en Ontario, les 22 et 23 mars 2006. Le rapport a été préparé pour la réunion sur les Autochtones et les indicateurs de bien-être qui a eu lieu pendant le congrès.

Une fois que vous aurez examiné le document du lien ci-dessus, décrivez le lien entre la roue de la médecine et le diagramme complet à la page 7 du document First Nations’ Wholistic Approach to Indicators.

3.5 Recommandations sur le travail auprès des communautés autochtones

Lignes directrices en matière d’éthique et de recherche

Les études sur les communautés et peuples autochtones pullulent et, lorsque des personnes non autochtones interagissent avec eux ou ont besoin de leur aide, les Autochtones sont symbolisés (Campbell, 2014; First Nations Centre, 2007). Par conséquent, des organismes de recherche, tels que les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) (2007), le Conseil de recherches en sciences humaines (2015) et le First Nations Centre (2007), ont dû rédiger des lignes directrices à l’intention des personnes qui font de la recherche sur les Autochtones. La première série de principes des IRSC (2007) est un ensemble collectif de lignes directrices pour aider les chercheur.euse.s et les établissements à effectuer des recherches éthiques et empreintes d’une sensibilité culturelle sur les Autochtones (p. 259). Selon Ramsden et coll. (2017), les lignes directrices indiquent ce qui suit :

les interactions avec les Premières Nations sont décrites dans le chapitre 9 de l’Énoncé de politique des trois conseils : Éthique de la recherche avec des êtres humains… . où tout projet de recherche sur les Premières Nations, les Inuits et les Métis ainsi que sur leurs populations et communautés doivent jouer un rôle pour façonner et co-créer toute recherche qui les touche [Traduction] (p. 2).

Cette façon de faire respecte certainement l’autonomie des patients autochtones, de leurs familles et des communautés qui prennent part aux recherches (Campbell, 2014).

Le First Nations Centre (2007) a créé le principe OCAP (propriété [Ownership], contrôle [Control], accès [Access] et possession [Possession]). La propriété remet en question la notion de la propriété intellectuelle et décrit la propriété communautaire des données. Le contrôle remet en question la notion du contrôle du processus de recherche. Les principes qui guident l’accès et la possession de la communauté exigent que la communauté ait un accès complet aux renseignements de la recherche et qu’elle en ait la possession. Dans les postes de leadership, il est important de comprendre comment appliquer ces principes au travail et dans les projets auxquels les populations autochtones prennent part.

Activité d’apprentissage essentielle 3.5.1

Veuillez lire les Lignes directrices des IRSC pour la recherche en santé chez les peuples autochtones (2007-2010) et répondre aux questions suivantes :

  1. Pourquoi était-il important pour les IRSC de rédiger ces lignes directrices?
  2. Qu’est-ce que la recherche participative et pourquoi est-elle importante?
  3. Que signifie la « collaboration » pour vous?

En plus des lignes directrices susmentionnées, les chercheur.euse.s ont nommé l’importance des questions qui sont soulevées dans le travail avec d’autres cultures (Clandinin et Connelly, 2000; Ermine, 2007). Ermine (2007) souligne l’importance de créer une relation de recherche respectueuse et demande aux chercheur.euse.s de prendre en compte l’espace éthique de l’interaction :

Cet espace éthique se concrétise lorsque deux sociétés, aux visions du monde différentes, interagissent l’une avec l’autre. La réflexion sur les sociétés diverses et l’espace entre elles façonne le cadre de dialogue entre les communautés humaines. L’espace éthique de l’interaction propose un cadre qui permet d’examiner la diversité et le positionnement des peuples autochtones et de la société occidentale dans la poursuite d’une discussion pertinente sur les questions juridiques autochtones et en particulier sur la délicate intersection entre le droit autochtone et les systèmes juridiques canadiens (p. 193).

Il soutient que les chercheur.euse.s doivent examiner l’influence qu’ont les points de vue occidentaux sur leur compréhension du monde et reconnaître qu’ils n’offrent souvent qu’une seule perspective. Il est important de faire un examen élargi des facteurs culturels, sociaux et politiques lorsque l’on travaille avec les personnes autochtones et que l’on se soucie d’elles. Il est essentiel que les chercheur.euse.s reconnaissent et critiquent les relations antérieures entre les visions du monde autochtones et la pensée occidentale (Barlow, 2009; Ermine, 2007; Patterson, Jackson et Edwards, 2006).

Note de recherche

Ramsden, V., Rabbitskin, N., Westfall, J., Felzien, M., Braden, J. et Sand, J. (2017). Is Knowledge translation without patient or community engagement flawed? Family Practice, 34(3), p. 259-261.

But

L’objectif de l’article est d’entamer la discussion sur une « participation authentique » dans la rédaction de manuscrits et de présentations qui émanent de la recherche à laquelle des patient.e.s, personnes ou communautés autochtones ont participé.

Discussion

Au Canada, l’Énoncé de politique des trois conseils précise que les Premières Nations, les Inuits et les Métis ont un rôle à jouer pour façonner et co-créer la recherche qui les touche.

Application à la pratique

En tant que responsables du personnel infirmier, nous devons tenir compte des cadres de recherche tels que ceux mentionnés ci-dessus (IRSC, OCAP) et veiller à ce que ces principes soient respectés afin de maintenir une participation éthique et significative des Autochtones du Canada à la fois dans la recherche et dans la pratique.

Commission de vérité et réconciliation du Canada

Il est bien établi que la culture et l’identité autochtones ont été perdues dans la foulée des pensionnats et de l’institutionnalisation (Adelson, 2000; Barlow, 2009; Comack, 2008; King, Smith et Gracey, 2009; Laliberte et coll., 2000; Commission de vérité et réconciliation du Canada, 2015). Adelson (2000) affirme que, si le colonialisme et le néocolonialisme ont entraîné une privation des droits et des tentatives d’éradiquer l’histoire culturelle, alors la reconstitution et la réaffirmation de l’identité (p. 30) sont peut-être ce qu’il faut pour contrecarrer ces actes. La Commission de vérité et réconciliation du Canada (2015) propose un document détaillé qui présente non seulement l’histoire des effets du colonialisme au Canada, mais aussi un appel à l’action pour lutter contre les tentatives de l’Église et du gouvernement d’assimiler les peuples autochtones au Canada. Le document contient des « appels à l’action » pour « effacer les séquelles laissées par les pensionnats ».

Note de recherche

Sasakamoose, J., Bellegarde, T., Sutherland, W., Pete, S. et McKay-McNabb, K. (2017). Miýo-pimātisiwin Developing Indigenous Cultural Responsiveness Theory (ICRT): Improving Indigenous Health and Well-Being, The International Indigenous Policy Journal, 8(4), p. 1-16.

But

L’objectif de l’article est de décrire l’élaboration théorique de la théorie de la sensibilité à la culture autochtone pour améliorer la santé et le bien-être des Autochtones.

Discussion

L’article s’appuie sur le cadre de sensibilité à la culture de la Federation of Sovereign Indigenous Nations (FSIN) et sur les connaissances des leaders autochtones, des gardien.ne.s du savoir, des universitaires et des professionnels de la santé pour étudier un modèle qui porte sur et insiste sur l’importance de faire participer les communautés, érudit.e.s et personnes autochtones à tout travail effectué avec les Autochtones. En tant que responsable du personnel infirmier, il est important d’être conscient et de comprendre ses propres points de vue et ses propres préjugés et de les comparer à ceux des personnes avec qui vous travaillez.

Application à la pratique

La Commission de vérité et réconciliation du Canada demande à ceux qui peuvent faire évoluer les systèmes canadiens de reconnaître la valeur des pratiques de guérison autochtones et de collaborer avec les guérisseur.euse.s, aîné.e.s et gardien.ne.s du savoir autochtone lorsque les Autochtones le demandent. Les pratiques de décolonisation consistent à privilégier et à observer les philosophies, croyances, pratiques et valeurs autochtones qui vont à l’encontre du colonialisme et rétablissent le bien-être. La théorie de la sensibilité à la culture autochtone soutient l’établissement de relations de collaboration entre les peuples autochtones et les allié.e.s non autochtones qui cherchent à améliorer l’état de santé et de bien-être des Premières Nations (Sasakamoose et coll., 2017).

Résumé

Les responsables du personnel infirmier doivent apprendre à travailler efficacement dans les communautés autochtones et avec les leaders autochtones. La première étape consiste à être ouvert et disposé à comprendre les visions du monde des Autochtones. Pour ce faire, les infirmier.ère.s doivent reconnaître l’histoire des peuples autochtones au Canada et la spécificité des structures de leadership et de prise de décisions des communautés autochtones. Enfin, si le personnel infirmier s’ouvre à la collaboration avec les leaders autochtones et les membres de la communauté, il peut établir des relations respectueuses, éthiques et significatives qui, en fin de compte, bénéficieront à la santé de tous.

À la fin du chapitre, vous devriez être en mesure de faire ce qui suit :

  1. Relever les différences entre vos propres visions du monde et celles des Autochtones.
  2. Réfléchir de façon critique aux façons dont les différentes visions peuvent influencer les décisions en matière de leadership.
  3. Reconnaître au sein des communautés autochtones les structures de leadership qui leur sont propres.
  4. Définir les avantages d’une collaboration avec les membres des communautés autochtones.

Exercices

  1. Imaginez que vous êtes un leader non autochtone qui souhaite apporter un changement dans une communauté autochtone. Lisez le concept d’espace éthique d’Ermine (2007) et discutez avec vos camarades de classe de la manière dont vous négocieriez respectueusement le travail que vous souhaitez effectuer avec l’équipe de leadership de la communauté.
  2. Lisez le résumé des Lignes directrices des IRSC pour la recherche en santé chez les peuples autochtones (2007-2010) et discutez avec vos camarades de classe de la façon dont les 15 articles du document peuvent être appliqués dans un contexte de leadership.
  3. Dans le résumé du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, Honorer la vérité, réconcilier pour l’avenir, trouvez la section sur la santé (p. 218-226) et discutez avec vos camarades de classe de la manière dont vous pouvez concrétiser ces appels à l’action dans vos travaux futurs en tant que responsable du personnel infirmier.
  4. Déterminez le nombre de traités au Canada. Quel traité portait sur la négociation du droit inhérent à la santé conféré par traité?

Références

Adelson, N. (2000). Re-imagining Aboriginality: An Indigenous peoples’ response to social suffering. Transcutural Psychiatry, 37(1), p. 11-34.

Barlow, J. K. (2009). Residential schools, prisons, and HIV/AIDS among Aboriginal people in Canada: Exploring the connections. Ottawa: Aboriginal Healing Foundation.

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