Ventilation en pression contrôlée

À présent que la ventilation en volume contrôlé a été approfondie, penchons-nous sur le mode en pression contrôlée. Tous les principes appris jusqu’à maintenant sont toujours pertinents. Voici la principale différence entre les deux types de ventilation contrôlée : le mode en volume contrôlé permet de régler le volume, alors que le mode en pression contrôlée ne permet pas de régler directement le volume, mais plutôt la pression.

La ventilation en pression contrôlée (VPC, PCAC, PC-CMV) est un mode entièrement contrôlé : le respirateur contrôle toutes les étapes de la respiration en fonction des paramètres définis. L’expiration demeure toutefois passive. Le prestataire de soins détermine la fréquence minimale des respirations ainsi que la pression positive appliquée (pression contrôlée) aux poumons pour qu’ils se gonflent en conséquence. La pression est constante et ne varie pas d’une respiration à l’autre, à moins qu’elle ne soit modifiée.

Application des apprentissages

Donc, si la pression est constante, que se passe-t-il en cas de variation? C’est là que la relation entre pression, volume et temps entre en jeu. Si l’on augmente la pression appliquée à un ballon, comment le gonflement change-t-il? (Bien joué si vous avez compris que le volume augmente! )

Le volume variera en fonction des modifications apportées à la pression contrôlée. Plus la pression est élevée, plus le volume est important.  Cela dit, tout comme en mode volume contrôlé où la pression peut varier d’une respiration à l’autre selon l’état des poumons, le même phénomène se produit en pression contrôlée où le volume varie d’une respiration à l’autre en fonction de la compliance et de la résistance pulmonaires. Si la compliance s’accentue, une même pression contrôlée permettra d’obtenir un volume plus important. À l’inverse, si la résistance augmente, le volume de l’air contenu dans les poumons diminue.

Vous vous rappelez l’analogie du ballon et du pneu? Si aucun ajustement de la pression n’est effectué, lequel des deux se gonfle davantage à une pression identique?

Revenons à l’analogie comparant la fermeture de voies de circulation sur une autoroute et la résistance des voies respiratoires. Comment la réouverture d’une voie (diminution de la résistance) affecterait-elle la circulation routière?

Avec la même pression, le ballon se gonfle plus rapidement et plus facilement qu’un pneu, ce qui se traduit par un plus grand volume. Il en est de même pour les poumons. En présence des mêmes paramètres de pression contrôlée, les tissus pulmonaires plus rigides présentant une mauvaise compliance et une résistance accrue accueilleront un volume d’air plus petit que des poumons en santé présentant une compliance et une résistance normales.

Deux pneus prêts à l’usage sur un circuit automobile.

Tout comme les pneus doivent être gonflés avec un compresseur d’air à cause de leur grande résistance, les tissus pulmonaires peuvent être plus rigides chez les personnes souffrant de certaines maladies.

Appliquons le concept à une personne asthmatique. En cas de crise aiguë d’asthme, les voies respiratoires opposent une résistance accrue à l’entrée de l’air. Toute pression exercée à l’intérieur se traduit par une diminution du volume des poumons par rapport à des poumons en santé, dont la résistance est normale. Les voies respiratoires d’une personne asthmatique réduisent le débit d’air entrant dans les poumons et résistent au gonflement. Si des bronchodilatateurs sont administrés et que les voies commencent à s’ouvrir, le volume pulmonaire augmente, car la résistance revient à la normale.

Application des apprentissages

Prenons l’exemple d’une ventilation en pression contrôlée sans modification de la pression programmée. Qu’advient-il du volume acheminé si la compliance des poumons diminue et que survient une rigidité nuisant à l’élasticité?

En mode pression contrôlée, le volume acheminé au fil du temps représente un indicateur crucial supplémentaire à surveiller afin de vérifier s’il y a amélioration ou détérioration. Le volume doit être contrôlé en permanence pour ventiler adéquatement et efficacement le patient, sans dépasser un plafond qui pourrait provoquer des dommages. La pression contrôlée (ou pression inspiratoire) doit être limitée afin d’acheminer un volume courant dans une plage de valeurs sécuritaires pour les poumons. Le chapitre 5 couvre ce concept, lorsqu’il sera question des paramètres de la pression contrôlée.

Notions à retenir

Une surdistension et des dommages aux alvéoles surviennent en cas de pression accrue, mais également lorsque le volume d’air est élevé. La pression contrôlée (ou pression inspiratoire) doit être limitée afin d’acheminer un volume courant dans une plage de valeurs sécuritaires pour les poumons.

Résumé des paramètres de base

En mode A/C en pression contrôlée, on peut programmer directement :

  • la fréquence respiratoire (FR)
  • la pression contrôlée (PC)
  • le temps inspiratoire (Ti)
  • la PEP (à configurer systématiquement sur chaque respirateur)
  • la FiO2 (à configurer systématiquement sur chaque respirateur)
En mode A/C en pression contrôlée, on peut surveiller, mais sans régler directement :

  • le volume courant (Vc)
  • le débit inspiratoire
  • la pression inspiratoire maximale (Pinsp max)
  • le ratio I:E

Le prestataire de soins détermine la fréquence des respirations par minute, la pression de travail de l’air dans les poumons ainsi que la durée d’application de la pression (Ti). En revanche, le volume précis d’air administré au patient n’est pas programmé dans la ventilation en pression contrôlée (VPC). Le volume est un produit direct de la pression de travail (PC) et du temps d’application de cette pression (Ti). Autrement dit, les paramètres de pression et de durée sont déterminés, tandis que le volume découle de la force et de la durée auxquelles le respirateur achemine l’air dans les poumons.

Le débit inspiratoire n’est pas non plus un paramètre défini. Le prestataire de soins fixe le temps inspiratoire (Ti) pendant lequel l’air est acheminé. Cela dit, la personne ventilée peut modifier le débit fourni par le respirateur, en inspirant au débit nécessaire pendant la durée prescrite par le Ti.

Cette précision est importante à retenir dans le cas de toute personne dont la commande respiratoire est intacte, mais qui présente des symptômes « d’essoufflement » (exacerbations de la MPOC, respirations de Kussmaul, respirations de Cheyne-Stoke). En cas de cycles respiratoires neurologiques anormaux, si les besoins respiratoires sont très élevés, un débit inspiratoire fixe peut entraîner un inconfort chez le patient. Ce dernier pourrait respirer à un rythme qui surpasse le débit fourni par le respirateur, ce qui entraîne un double déclenchement des respirations, un asynchronisme et des alarmes du respirateur. Un mode en pression contrôlée permettant un débit qui s’ajuste aux besoins respiratoires de la personne ventilée peut dans ce cas être légèrement plus efficace, sans que vous ayez à modifier les réglages du respirateur pour tenter de répondre aux besoins du patient.

En ventilation en pression contrôlée, la pression inspiratoire maximale (Pinsp max) n’est pas programmée, mais elle demeure constante et très contrôlable, car elle est le résultat de toutes les pressions supportées par les poumons (PEP + PC). La pression inspiratoire maximale désigne la pression la plus élevée appliquée aux alvéoles. Puisque la pression (PC) appliquée aux poumons est programmée, la pression inspiratoire maximale correspond à la somme de la PC et de la valeur de pression initiale (PEP). Pensez à l’analogie de la chaîne de montagnes. Au pied d’une montagne, vous n’êtes pas au niveau de la mer. Quelle est la hauteur du sommet? Il n’est pas seulement question de la hauteur de la montagne. L’altitude au sommet serait l’altitude totale au-dessus du niveau de la mer, c’est-à-dire l’altitude au pied de la montagne (PEP) additionnée à l’altitude de la montagne (PC). Prenons deux exemples :

  • PEP de 5 + PC de 10 = Pinsp max de 15
  • PEP de 8 + PC de 12 = Pinsp max de 20

Application des apprentissages

À vous de jouer! La PEP du respirateur est de 6 et la PC est de 15. Quelle est la Pinsp max? Quelle serait la Pinsp max si on diminue la PC à 12?

Le ratio I:E expliqué dans le chapitre précédent doit être pris en considération, afin de laisser suffisamment de temps au patient pour expirer et de réduire le risque de piégeage gazeux (auto-PEP). Le prestataire de soins règle le temps inspiratoire et la fréquence respiratoire, mais pas le ratio I:E. Le ratio I:E découle de ces réglages et demeure constant tant que la FR et le Ti ne varient pas. Si la respiration d’une personne dépasse la FR programmée, le ratio I:E changera à mesure que la FR totale augmentera avec les respirations déclenchées.

Par ailleurs, le Ti permet d’assurer que le ratio I:E ne soit pas un rapport inversé. Le temps expiratoire doit toujours être supérieur au temps inspiratoire. Au besoin, la FR ou le Ti peuvent toujours être ajustés pour garantir un délai d’expiration adéquat.

Notions à retenir

Aussitôt qu’un patient est branché à un respirateur, il faut obligatoirement régler la FiO2 et la PEP. Par conséquent, en mode A/C en pression contrôlée, le prestataire de soins doit les programmer. En mode contrôlé, il faut déterminer la fréquence respiratoire en plus de ces deux réglages, afin de contrôler le déclenchement des respirations. Par conséquent, il faut programmer la FR. En mode A/C en pression contrôlée, il faut ajuster la pression à laquelle l’air est acheminé à chaque respiration. La pression est toujours constante et ne change pas. Le volume, quant à lui, n’est pas programmé, car il découle de la pression de l’air acheminé et du fonctionnement des poumons ventilés.

Lorsque vous réfléchissez à l’interrelation entre pression et volume et à la manière dont la compliance pulmonaire les affecte, pensez toujours aux ballons. Lorsque vous réfléchissez à la manière dont un réglage modifié affecte l’autre, pensez à deux ballons identiques et au changement dans la manière dont vous y soufflez (le respirateur pulse l’air en fonction des paramètres). Lorsqu’il est question des répercussions de la compliance et de la résistance pulmonaires sur la pression ou le volume, pensez à un ballon et à un pneu. Rappelez-vous les paramètres constants (volume ou pression) en fonction du mode choisi. Par la suite, réfléchissez à la manière dont vous devez modifier les paramètres réglés pour obtenir le gonflement souhaité.

Que vous utilisiez le mode en pression contrôlée ou en volume contrôlé, il est important de surveiller en permanence le volume d’air acheminé et la pression maximale subie par les poumons. Si les deux valeurs ne sont pas contrôlées, elles peuvent provoquer une distension excessive des alvéoles et causer des lésions. Une pression élevée peut entraîner un barotraumatisme, tandis qu’un volume élevé peut causer des dommages appelés volutraumatisme.

Quand opter pour la pression contrôlée ou le volume contrôlé? Techniquement, les deux modes permettent d’obtenir des résultats similaires tant que le prestataire de soins règle avec précision les paramètres du respirateur selon les besoins du patient et les paramètres qui en découlent afin que les poumons ne soient pas exposés à une distension excessive par barotraumatisme ou volutraumatisme. Le confort du patient doit également être surveillé de près et les paramètres comme la FR, le débit et le Ti doivent être modifiés afin de répondre efficacement à ses besoins. L’approche permet d’éviter tout inconfort et assure le synchronisme du respirateur, c’est-à-dire que l’administration des respirations correspond au moment de l’effort physiologique du patient.

Dans certains hôpitaux, il existe des préférences concernant l’utilisation des respirateurs, selon des politiques et des procédures. Veuillez consulter les politiques propres à l’hôpital pour connaître les modes privilégiés.

Attribution des éléments visuels

Licence

L’ABC de la ventilation mécanique© par Melody Bishop, B.Sc., thérapeute respiratoire, assistante en anesthésie clinique certifiée (AACC). Tous droits réservés.

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