Paramètres initiaux en mode contrôlé

Lors du réglage du respirateur, il n’y a pas d’approche universelle possible. La ventilation mécanique peut causer des lésions. Chaque patient est différent et doit être traité en fonction de ses besoins individuels et de la physiopathologie sous-jacente. Le clinicien doit tenir compte du patient et de la raison de son intubation au moment de configurer les paramètres initiaux. Voyons un processus systématique pour bien configurer les paramètres du mode contrôlé en fonction du patient et de son état de santé.

PEP et FiO2

Ce manuel a expliqué l’importance de maintenir une SpO2 supérieure à 92 %, mais inférieure à 100 %, afin d’éviter la suroxygénation et la libération des radicaux libres de l’oxygène (voir le chapitre 2). La relation entre la PEP et la FiO2 y a aussi été abordée, en plus de leur rôle dans l’oxygénation (voir le chapitre 2). La FiO2 peut être augmentée ou diminuée pour fournir une concentration d’oxygène plus élevée dans les poumons à chaque inspiration. Plus le taux d’oxygène insufflé est élevé, plus il y a d’oxygène disponible pour la diffusion dans le sang en passant à travers la membrane alvéolocapillaire. La PEP contribue à recruter (ouvrir) les alvéoles collabés, ce qui augmente la surface pulmonaire pour l’échange gazeux à chaque respiration et la quantité d’oxygène se diffusant dans le sang à chaque respiration, tout en augmentant la pression de travail qui pousse l’oxygène à travers la membrane alvéolocapillaire. La FiO2 et la PEP peuvent toutes deux augmenter directement la quantité d’oxygène qui entre dans le sang pour circuler vers les organes vitaux. Si ces concepts ne sont pas clairs, relisez le chapitre 2 avant de relire cette section.

Comment configurer la FiO2 et la PEP? La façon la plus simple d’aborder la FiO2 est de commencer à 0,5 (50 %) ou à 1,00 (100 %). Si le patient avait besoin d’une grande quantité d’oxygène avant l’intubation, commencez à 1,00. Si le patient n’avait pas besoin de beaucoup d’oxygène ou pas du tout besoin d’oxygénothérapie avant l’intubation, commencez à 0,50. Ce n’est pas terminé! Dans les minutes qui suivent le début de la ventilation, ajustez (augmentez ou diminuez) la FiO2 de 10 % en fonction de la SpO2, comme expliqué au chapitre 2. Dans un délai de 5 minutes, vous devriez être en mesure de régler une FiO2 correspondant à une SpO2 d’au moins 92 % (et < 100 %). Ne modifiez plus la FiO2 jusqu’à ce que vous obteniez les résultats de la gazométrie artérielle afin d’apporter des ajustements à la lumière de ces résultats.

Concept clé

La FiO2 est le seul paramètre que vous modifierez fréquemment lors du réglage initial du respirateur. Il est courant qu’un clinicien commence à 1,00 et, en l’espace de 5 minutes, réduise la FiO2 à 0,4 pour atteindre la SpO2 cible. En ce qui concerne l’ajustement des autres paramètres à la suite du réglage initial, il faut attendre d’obtenir les résultats de la gazométrie artérielle réalisée après un délai d’au moins 30 minutes. La gazométrie est examinée en détail aux chapitres 8 et 9.

Le réglage initial de la PEP doit être compris entre 5 et 10 cmH2O. N’oubliez pas que le seuil minimal est de 5 cmH2O. Il est toujours préférable de commencer par une valeur faible et de l’augmenter après avoir effectué une gazométrie et laissé le patient s’acclimater un certain temps au respirateur. En présence de poumons sains, il faut commencer par une PEP de 5 cmH2O. Pour les cliniciens n’ayant pas suivi une formation avancée en ventilation mécanique, une PEP initiale de 8 ou 10 ne doit être envisagée qu’en cas d’atélectasie (affaissement d’alvéoles), d’œdème pulmonaire ou de signes d’épaississement de la membrane alvéolocapillaire.

N’oubliez pas que l’augmentation de la PEP n’est pas sans danger (voir le chapitre 2). Si la PEP est trop élevée, elle peut nuire au retour du sang vers le cœur et réduire la compliance pulmonaire. On doit d’abord s’assurer qu’une PEP initiale de 8 à 10 cmH2O est indiquée au regard de la physiopathologie sous-jacente. On peut toujours augmenter la PEP après avoir reçu les résultats de la gazométrie. Il est préférable de laisser le patient s’acclimater au respirateur en configurant une PEP initiale plus faible et de l’augmenter progressivement par la suite, si rien n’indique clairement qu’une PEP élevée serait préférable.

Ce tableau résume les réglages initiaux de la FiO2 et de la PEP :

Paramètre État du patient Réglage initial
FiO2 Hypoxie avant l’intubation 1,0 (100 %)
Peu ou pas besoin d’oxygénothérapie 0,5 (50 %)
PEP Plupart des patients 5 cmH2O
Confirmation d’atélectasie ou d’épaississement de la membrane alvéolocapillaire 8-10 cmH2O

Fréquence respiratoire

Les deux modes contrôlés (à volume contrôlé et à pression contrôlée) reposent notamment sur le fait que c’est la configuration de la fréquence respiratoire minimale qui détermine le nombre de respirations par minute. N’oubliez pas que le patient peut déclencher lui-même des cycles respiratoires plus fréquents, mais chaque ventilation sera conforme aux autres paramètres réglés.

Pour déterminer la fréquence respiratoire d’un patient adulte, il faut toujours respecter les valeurs normales de la fréquence respiratoire physiologique. Chez l’adulte, la respiration normale au repos se situe généralement entre 12 et 20 resp./min en l’absence de problème pulmonaire. Il faut donc régler la fréquence respiratoire initiale de la ventilation mécanique en respectant ces seuils.

Comment choisir la valeur initiale? La meilleure façon de procéder est d’analyser la respiration avant l’intubation et de réfléchir au processus physiologique en cours. Le patient a-t-il un problème pulmonaire? Pourquoi est-il intubé?

Si le patient respirait normalement et que l’intubation ne visait qu’à protéger ses voies respiratoires, mais que sa fréquence respiratoire était dans les valeurs normales les plus faibles, on peut configurer une faible FR initiale en toute sécurité (toujours en respectant les valeurs normales).

Si le patient présentait une atteinte pulmonaire ou s’il respirait rapidement avant l’intubation et qu’il a été intubé pour un problème d’oxygénation ou de ventilation, on sait que les chimiorécepteurs dans son cerveau le stimulaient à respirer rapidement, très probablement en raison d’un taux élevé de CO2 ou d’un manque d’oxygène. Le patient est alors tachypnéique et sa FR est plus élevée que la normale (> 25 resp./min en général). Il peut aussi montrer des signes d’augmentation du travail respiratoire en utilisant ses muscles accessoires. En cas de signes de tachypnée avant l’intubation, il est très probable que le patient ait besoin d’une FR plus élevée pour corriger une anomalie dans son taux de CO2 ou d’O2. Même si la gazométrie artérielle ne permet pas de confirmer ce diagnostic, on peut tenir compte de cette observation pour établir le réglage initial. La ventilation mécanique doit reproduire la respiration physiologique du patient.

Il ne faut pas pour autant toujours copier la fréquence respiratoire du patient. La fréquence respiratoire de certains patients est supérieure à 30 resp./min. La ventilation en pression positive est complexe, car elle risque de causer des lésions aux poumons. Rappelez-vous que l’air est alors poussé dans les poumons et que le patient n’inspire pas par lui-même. La respiration spontanée est moins dommageable que la ventilation pour les alvéoles (voir le chapitre 1). Il ne faut donc pas reproduire une fréquence respiratoire trop élevée pour éviter de causer des lésions. Il faut plutôt choisir une FR dans les valeurs normales les plus élevées. Ainsi, si les valeurs normales sont entre 12 et 20 resp./min, la FR initiale doit être entre 18 et 20 resp./min.

En contexte de ventilation en pression positive, une FR supérieure à 24 resp./min peut causer un asynchronisme et contribuer potentiellement au piégeage gazeux et aux lésions pulmonaires. Il faut un œil averti pour observer les formes d’ondes sur l’écran du respirateur et les efforts respiratoires du patient pour s’assurer que cette situation ne se produise pas. Les cliniciens ayant peu d’expérience en ventilation doivent essayer de rester en dessous de 24 resp./min. Il convient de vérifier auprès d’un médecin ou thérapeute respiratoire autorisé si une FR plus élevée est indiquée.

N’oubliez pas qu’il s’agit uniquement des paramètres initiaux. Après 30 à 60 minutes suivant la configuration initiale, la gazométrie artérielle évaluera les taux de CO2 et d’O2 et orientera les ajustements nécessaires (abordés aux chapitres 8 et 9).

Paramètre État du patient Réglage initial
FR Poumons sains et intubation uniquement pour protéger les voies respiratoires
ou
FR faible avant l’intubation
14 resp./min
Atteinte pulmonaire ou intubation uniquement en raison de problèmes d’oxygénation ou de ventilation
ou
Tachypnée avant l’intubation
18-20 resp./min

Concept clé

Pour les modes à pression contrôlée et à volume contrôlé, on doit régler la FiO2, la PEP et la FR. Les autres paramètres diffèrent selon le mode choisi.

Paramètres propres au mode : volume courant ou pression contrôlée

Nous avons examiné les réglages de la PEP, de la FiO2 et de la FR. En mode contrôlé, le dernier paramètre à déterminer est la quantité d’air dont le patient aura besoin. Il faut donc contrôler le volume courant (Vc) qui sera insufflé à chaque cycle respiratoire.

Le chapitre 4 a expliqué comment le volume courant est déterminé physiquement en ventilation à volume contrôlé. En ventilation à pression contrôlée, le volume insufflé est alors contrôlé par la pression appliquée pendant une durée déterminée. Vous vous souvenez de l’exemple pratique avec le ballon? Si l’on souffle de l’air dans le ballon pendant une durée déterminée, le ballon se gonflera jusqu’à un volume déterminé. Si ce concept est un peu flou, retournez au chapitre 4 pour revoir les relations entre le volume et le débit, la pression et le temps inspiratoire en ventilation.

Le volume approprié est abordé dans les prochaines sections, car c’est ce paramètre qui dicte la configuration des paramètres, soit le volume courant ou la pression contrôlée et le temps inspiratoire.

Un respirateur

Un respirateur prêt à recevoir les réglages initiaux. Remarquez la mention « Standby » (en attente) qui apparaît à l’endroit où l’on verrait normalement les ondes correspondant aux respirations du patient.

Attribution des éléments visuels

Licence

L’ABC de la ventilation mécanique© par Melody Bishop, B.Sc., thérapeute respiratoire, assistante en anesthésie clinique certifiée (AACC). Tous droits réservés.

Partagez ce livre