Modes spontanés ou contrôlés

Tel qu’expliqué au chapitre 3, en mode spontané, le patient amorce une respiration et le respirateur intervient dans un rôle de soutien. L’appareil peut réduire l’effort que le patient doit déployer pour respirer en appliquant une pression supplémentaire. L’effort respiratoire peut être évalué subjectivement en examinant la vitesse de la respiration et en vérifiant si des muscles accessoires sont mobilisés.

Une prestataire de soins ajuste le tube d’un respirateur.

Une prestataire de soins calibre un respirateur à bord de l’USNS Mercy.

La clé de ce processus est que le patient doit envoyer un signal neurologique pour respirer. Le patient déclenche sa respiration lui-même en mobilisant le diaphragme pour faire entrer l’air dans ses poumons et expirer. Il décide aussi de la fréquence de ses respirations. Le respirateur détecte l’effort respiratoire à l’aide d’un dispositif de déclenchement (trigger) en débit ou en pression (voir le chapitre 3) et fournit une quantité d’air déterminée pour augmenter la respiration spontanée du patient. Si la fréquence respiratoire spontanée n’est pas suffisante pour maintenir de bons taux de CO2 et d’oxygène, la commande respiratoire du patient n’est pas intacte. Le mode contrôlé est alors indiqué, sans quoi l’état du patient risque de se détériorer.

Les respirations physiologiques normales ne sont pas uniformes. La plupart des gens prennent différentes respirations chaque minute, en plus de faire de nombreux soupirs, ou ont une fréquence respiratoire variable. Le mode contrôlé ne permet aucune de ces variations, et l’amplitude ou la fréquence des respirations ne changent que si le clinicien modifie les paramètres. Cette rigidité peut rapidement entraîner une asynchronie gênante pour le patient. Cependant, en mode spontané, le diaphragme déclenche la respiration, contribue à la dilatation des poumons et se relâche à l’expiration une fois que le volume d’air désiré est atteint. Ces variables sont contrôlées par les neurotransmetteurs du cerveau et peuvent changer d’une respiration à l’autre si nécessaire.

Le mode ventilatoire spontané permet de retrouver certains processus respiratoires physiologiques normaux. Les chimiorécepteurs du cerveau déclenchent la respiration et la contraction du diaphragme. Cette approche maintient un certain travail des muscles respiratoires et réduit le risque d’atrophie musculaire.

L’intérêt du mode spontané réside dans la réduction du risque d’atrophie musculaire.  Ce mode est bénéfique, car il mobilise toujours les muscles respiratoires, comme le diaphragme. Vous souvenez-vous du chapitre 1? Nous avons discuté du rôle important du diaphragme dans la création de la pression négative qui remplit les poumons d’air. Le diaphragme est le muscle le plus important dans la respiration spontanée. Comme tous les muscles, s’il n’est pas mobilisé, il commence à s’affaiblir.

Le mode ventilatoire contrôlé ne permet pas au diaphragme d’être pleinement sollicité pendant la respiration, ce qui peut en entraîner l’atrophie et l’affaiblissement. Cet affaiblissement peut faire en sorte que le patient ait du mal à prendre en charge sa respiration et à respirer sans aide. Plus vite le prestataire de soins peut laisser le patient respirer par ses muscles respiratoires, mieux c’est. Un changement rapide de mode ventilatoire permet d’atténuer le risque d’atrophie musculaire. Le mode spontané est la principale technique pour maintenir la contraction du diaphragme. Il aide aussi le patient à prendre en charge ses besoins respiratoires sans l’aide d’un respirateur.

Bien qu’elle n’ait pas permis d’éliminer totalement le besoin de ventilation mécanique, la création du mode spontané a grandement aidé à régler ces problèmes.

Concept clé

Le mode ventilatoire spontané est déterminant pour limiter les lésions causées par la ventilation en pression positive, en réduisant l’asynchronisme et en reproduisant un schéma respiratoire plus naturel que le patient peut contrôler. Il contribue aussi à maintenir la force des muscles respiratoires, ce qui facilite le retrait du respirateur.

Résumé des modes contrôlé et spontané

Le tableau suivant résume les principales différences entre les modes contrôlé et spontané :

Mode contrôlé Mode spontané
Commande respiratoire Aucune respiration spontanée Respiration spontanée requise
Oxygène Fournir un apport d’oxygène Fournir un apport d’oxygène
Taux élevé de CO2 Utilisé pour corriger une gazométrie anormale Peut seulement intensifier la respiration normale; contre-indiqué si le taux de CO2 est très élevé
Sédation Sédation importante généralement requise Beaucoup plus confortable, moins de sédation
Travail respiratoire Patient sous sédation et respirateur qui prend la relève complète des muscles Soutien ventilatoire qui atténue le travail respiratoire; maintien d’une certaine mobilisation des muscles
Maintien de la force musculaire Diaphragme non impliqué dans la respiration Diaphragme mobilisé; bon pour maintenir la force musculaire et atténuer l’atrophie musculaire
Caractère invasif Plus invasif, moins physiologique Plus physiologique; mode spontané utilisé pendant la transition vers l’arrêt de la ventilation (sevrage)
Une idée très répandue en soins intensifs est que le repos sous ventilation contrôlée est essentiel au rétablissement et idéal les premiers jours de ventilation, lorsque le patient a connu une défaillance suffisante pour avoir besoin d’une ventilation mécanique. Cependant, de plus en plus de recherches la contredisent. Le mode contrôlé nécessite souvent de grandes quantités de sédatifs et, dans certains cas, de paralysants. Chaque jour d’inactivité du diaphragme contribue directement à la perte musculaire et à l’atrophie musculaire. Le maintien de l’effort respiratoire réduit considérablement le nombre de jours sous ventilation et la durée de l’hospitalisation. Au fil des nouvelles recherches réalisées, le mode contrôlé est utilisé pendant des durées de plus en plus courtes, et le mode spontané devient la norme de soins de plus en plus tôt dans le processus ventilatoire.

Attribution des éléments visuels

Licence

L’ABC de la ventilation mécanique© par Melody Bishop, B.Sc., thérapeute respiratoire, assistante en anesthésie clinique certifiée (AACC). Tous droits réservés.

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