Bref historique des modes contrôlés et spontanés

Explorons l’origine des modes ventilatoires en commençant par un retour sur l’arrivée de la ventilation et sur quelques innovations incontournables qui ont déjà été évoquées au chapitre 2. Nous aborderons les modes ventilatoires plus en profondeur après le visionnement de la vidéo de TED-Ed How do Ventilators Work? (Fonctionnement d’un respirateur).

 

Pour obtenir la transcription de la vidéo, cliquez sur « Regarder sur YouTube » pour accéder à la source. Vous pourrez accéder à la transcription sur YouTube.

La première version des modes ventilatoires modernes était le mode de ventilation obligatoire continue (CMV). Il a été conçu pour faire respirer le patient de façon artificielle au moyen d’une pression positive, mais uniquement selon les paramètres réglés sur le respirateur. Le respirateur n’avait pas la capacité de percevoir ce que le patient faisait ou « demandait ». Autrement dit, si le patient commençait à déclencher des inspirations et voulait respirer à une fréquence respiratoire plus rapide que le permettaient les paramètres, le respirateur ne pouvait obtempérer. Les besoins du patient n’étaient aucunement pris en compte.

Les problèmes associés à ce mode sont évidents. Imaginez que vous vous éveillez branché à une machine qui ne vous laisse pas respirer comme bon vous semble : non seulement vous tentez d’inspirer sans avoir accès à une seule molécule d’air, mais en plus, de l’air est poussé dans vos poumons quand vous n’y êtes pas préparé! Le mode CMV occasionnait beaucoup d’inconfort chez le patient puisque le respirateur n’était pas synchronisé avec son corps. On appelle ce problème l’asynchronisme. Pour atténuer l’asynchronisme, il fallait administrer aux patients de puissants sédatifs, ce qui, dans bien des cas, les paralysait temporairement. Cet état de sédation profonde et de paralysie compliquait considérablement l’évaluation de la commande respiratoire autonome du patient, de sorte qu’il était difficile de savoir quand interrompre la ventilation.

À mesure que la technologie progressait, les problèmes associés à la ventilation obligatoire continue ont rapidement été soulevés, ce qui a donné lieu à l’amélioration des respirateurs en vue de les rendre plus sensibles aux efforts des patients. Des microprocesseurs peuvent maintenant sentir les légers changements dans le débit aérien lorsque le patient fournit un effort inspiratoire. Puisque les respirateurs peuvent maintenant percevoir les efforts inspiratoires, ils peuvent administrer une ventilation selon une fréquence « minimale » réglée. Lorsqu’un patient crée une différence de débit que l’ordinateur reconnaît comme étant une « demande », le respirateur peut dépasser cette fréquence et administrer une ventilation. Pour le distinguer de l’ancien mode CMV, on appelle souvent ce nouveau mode le mode « ASSISTÉ/CONTRÔLÉ », ou ventilation assistée contrôlée (VAC), puisqu’il a la capacité d’induire des respirations selon les paramètres réglés ou plus fréquemment, lorsque le patient le demande.

Respirateur Puritan Bennett, modèle 7200.

Le respirateur Puritan Bennett 7200 a fait son entrée sur le marché en 1983 et était acclamé comme l’un des premiers respirateurs à utiliser un système avancé d’air comprimé combiné à la technologie de microprocesseur, ce qui le dotait d’une excellente capacité en matière de surveillance du patient et d’acheminement de gaz pour son époque (Squire, 2013). Au fil des années, le PB 7200 a été remplacé par des appareils plus petits dotés de technologies plus efficaces.

L’ancien mode contrôlé (CMV) qui ne permettait pas au patient de déclencher lui-même les cycles respiratoires est maintenant complètement obsolète et n’existe plus en ventilation moderne. La VAC a entièrement remplacé le mode CMV pour devenir le seul type de mode contrôlé. Même les modes portant encore la désignation CMV sur certains respirateurs ne sont plus comme la version de l’époque; ils permettent aussi au patient de respirer au-delà de la fréquence respiratoire définie dans les paramètres.

Auparavant, lorsque l’état d’un patient s’améliorait, le clinicien diminuait la FR du respirateur pour permettre au patient de déclencher toutes ses inspirations. Cette pratique n’a pourtant pas réglé les problèmes d’asynchronisme. De petites pauses ou variations dans les cycles physiologiques de la respiration du patient pouvaient déclencher une poussée d’air par le respirateur, ce qui faisait respirer le patient au même moment que le respirateur poussait l’air dans ses poumons; c’est ce qu’on appelle le double déclenchement. D’autres formes d’asynchronisme pouvaient se produire lorsque le patient souhaitait respirer à un débit différent ou pour une durée différente. Ces problèmes ont révélé la nécessité de concevoir un mode qui permettait au patient de contrôler entièrement son cycle respiratoire et la durée de ses inspirations, ce qui a entraîné la mise en marché du mode spontané.

Le mode spontané a été conçu pour les patients qui possèdent une commande respiratoire efficace et qui peuvent continuellement déclencher leurs propres inspirations. Ce mode a permis d’atténuer l’asynchronisme, puisqu’il permet au patient de contrôler lui-même son débit d’air et permet au respirateur de s’adapter continuellement aux différentes étapes de la respiration. Ces changements cruciaux sont parmi les plus importants et les plus historiques de la ventilation mécanique moderne et ont amené les respirateurs à imiter de plus en plus la respiration physiologique et les cycles respiratoires physiologiques normaux.

Contrairement aux modes contrôlés, le mode spontané demeure très semblable à sa version originale. Même s’il existe maintenant de nouveaux modes offrant des options supplémentaires à la ventilation spontanée, ils sont peu utilisés et ne seront pas couverts dans ce manuel.

Pour connaître plus en détail l’historique des modes ventilatoires et pour alimenter la discussion sur de possibles innovations futures pour les respirateurs, lisez l’article « The Mechanical Ventilator: Past, Present, and Future » (Ventilation mécanique : hier, aujourd’hui et demain), par Robert M. Kacmarek (2011).

Attribution des éléments visuels

  • PB 7200, de Kacmarek, 2011

Licence

L’ABC de la ventilation mécanique© par Melody Bishop, B.Sc., thérapeute respiratoire, assistante en anesthésie clinique certifiée (AACC). Tous droits réservés.

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