Aide inspiratoire : Configuration des paramètres

Les valeurs normales de l’aide inspiratoire (AI) se situent entre 5 et 20 cmH2O, selon les besoins du patient. Dans la plupart des cas, ce paramètre n’est jamais sous le seuil de 5 cmH2O. Le seuil minimal de 5 cmH2O est largement considéré comme nécessaire pour surmonter la résistance que le tube endotrachéal ajoute artificiellement.

Exemple pratique

Une petite fille souffle dans une paille sur de la peinture à l’eau pour créer une œuvre d’art.

L’intubation équivaut à « respirer par une paille ». Imaginez que vous essayez de respirer (inspiration et expiration) par une paille pendant plus de deux minutes. Au bout d’un certain temps, il peut devenir difficile d’aspirer l’air assez vite pour bien remplir les poumons.

L’AI de 5 cmH2O donne une petite poussée à l’air pour l’aider à entrer plus rapidement et compenser la difficulté supplémentaire que représente le tube endotrachéal. Ce seuil minimal est souvent appelé « paramètre minimal ». Il n’y a donc pas lieu de configurer l’AI en deçà de 5 cmH2O, sauf en cas d’avis contraire du médecin.

Comme la VSAI vise à permettre au patient de déclencher les cycles respiratoires à sa propre vitesse, la surveillance de la tolérance commence par la surveillance de la respiration. Lorsque le patient se fatigue ou que son travail respiratoire augmente, la fréquence respiratoire augmente normalement et le volume courant peut être insuffisant pour combler ses besoins physiologiques. Ces effets peuvent être observés assez rapidement après l’apport d’un changement. Si la fréquence respiratoire dépasse les valeurs moyennes physiologiques (12-25 resp./min), ce peut être un signe que le patient ne tolère pas le niveau d’aide programmé. Il serait alors indiqué d’augmenter l’AI. De plus, il convient d’examiner le volume courant administré au patient. Si ce paramètre est bien en deçà des valeurs normales (6-8 ml/kg) pour son poids idéal (comme indiqué au chapitre 5), il s’agit d’un autre signe que l’aide est insuffisante. La fréquence cardiaque et la pression artérielle sont d’autres paramètres pouvant indiquer que l’assistance ventilatoire est insuffisante. Une augmentation de 20 % par rapport aux valeurs initiales après le changement peut indiquer que le patient ne le tolère pas.

Il est important de se rappeler que certaines populations de patients ont des fréquences respiratoires plus élevées que les valeurs normales. Dans certains cas, le maintien d’une fréquence respiratoire élevée peut être autorisé. Il y a lieu de suivre les directives du médecin pour une population de patients donnée.

Une fois l’aide inspiratoire augmentée, on peut observer le patient pour voir si le travail respiratoire s’améliore, si la fréquence respiratoire diminue ou si le volume courant augmente. Une gazométrie artérielle peut être envisagée pour s’assurer que l’état du patient s’améliore.

Inversement, une aide inspiratoire configurée à une valeur plus élevée que nécessaire peut se traduire par une fréquence respiratoire trop faible (moins de 12 resp./min) ou un volume courant qui dépasse les valeurs sécuritaires de 4 à 8 ml/kg. La section sur le calcul du poids idéal est utile pour valider les valeurs adéquates du volume courant. Il faut augmenter ou diminuer rapidement l’aide inspiratoire, et ce, en quelques minutes seulement, jusqu’à ce que le volume courant se situe dans la plage de valeurs normales pour le poids idéal du patient et que la fréquence respiratoire soit dans les valeurs normales. L’aide inspiratoire ne doit pas être maintenue à un niveau plus élevé que nécessaire pendant une longue période, car cette situation peut conduire à une surassistance ou, dans des cas extrêmes, à l’asynchronisme ou à des respirations manquées.

Remarque : Si vous diminuez l’AI en raison d’un volume courant élevé, ne descendez pas sous le seuil minimal de 5 cmH2O. Une fois ce seuil atteint, restez-y. La pression subie par les poumons est très faible et sécuritaire. Si le volume courant est encore trop élevé, ce pourrait être un signe que le patient est prêt pour l’extubation, le retrait du tube endotrachéal et l’arrêt de la ventilation mécanique.

Paramètres initiaux de l’aide inspiratoire

Paramètre Configuration de départ Instructions supplémentaires
PEP Utiliser la même PEP que celle utilisée dans le mode contrôlé précédent
ou
Commencer par une PEP de 5 cmH2O et l’augmenter de 1 à 2 cmH2O au besoin pour faciliter l’administration d’oxygène. Remarque : 5 cmH2O est le seuil minimal; une valeur supérieure à 10 cmH2O doit être approuvée par un médecin.
La modification de la PEP doit se faire en tandem avec la FiO2, et ce, environ toutes les 30 minutes. Il faut du temps pour que les effets du changement de la PEP soient visibles, car la modification de la pression de distension s’accompagne du recrutement d’alvéoles collabées au fil du temps.
FiO2 Utiliser la même FiO2 qu’au mode de contrôle précédent
ou
Commencer à 100 % et diminuer rapidement afin de maintenir la SpO2 souhaitée. Si le patient n’a pas besoin d’un grand apport d’oxygène avant l’AI, commencer à 50 % et augmenter ou diminuer le pourcentage jusqu’à atteindre la SpO2 cible de 92 à 99 %.
La FiO2 peut être ajustée dans les 3 à 4 minutes qui suivent le monitorage de la SpO2. Il faut viser la FiO2 minimale pour atteindre une SpO2 se situant dans les valeurs normales.
AI (aide inspiratoire) Il est raisonnable de commencer par 10 cmH2O et d’ajuster l’AI en quelques minutes après avoir surveillé la FR et le Vc du patient, sans dépasser les seuils décrits ci-dessus. Remarque : AI minimale de 5 pour surmonter la résistance imposée par le tube. Ne pas descendre sous ce seuil, sauf avis contraire d’un médecin.
En cas d’ajustement de l’AI, toujours réaliser une gazométrie artérielle dans les 30 à 60 minutes pour valider la tolérance du patient.
Seuils de déclenchement et autres paramètres Aucun changement des réglages par défaut, sauf avis contraire du médecin ou d’un praticien compétent en ventilation. Les paramètres par défaut conviennent à 95 % des patients. Pour les stratégies de ventilation de base, aucun ajustement n’est nécessaire. Les prestataires de soins compétents peuvent modifier ces paramètres.

Examinons quelques cas!

Étude de cas A

Un patient est sous ventilation assistée contrôlée (VAC). Les cliniciens ont commencé à diminuer la sédation et veulent essayer de passer à un mode spontané pour commencer à sevrer le patient de la ventilation mécanique. Voici les paramètres de la VAC :

  • FR : 14 resp./min (FR du patient : 18 resp./min)
  • Vc : 380 ml (6 ml/kg)
  • PEP : 8 cmH2O
  • FiO2 : 0,40

Ce patient est-il un bon candidat à la VSAI?

Oui! Il a des respirations spontanées et sa FR est supérieure aux paramètres configurés. Avant de passer à la VSAI, le praticien doit faire une gazométrie pour s’assurer que le taux de CO2 est dans les valeurs normales. Si les résultats sont normaux et que les signes vitaux sont stables, le patient est considéré comme un bon candidat.

Quels seraient les paramètres de départ?

Changez de mode pour mettre le patient sous VSAI. Avant d’accepter les changements, sélectionnez les réglages choisis pour la PEP, la FiO2 et l’AI. Pour ce patient, les réglages initiaux de la VSAI pourraient être les suivants :

  • PEP : 8 cmH2O (identique au mode contrôlé précédent)
  • FiO2 : 0,40 (identique au mode contrôlé précédent)
  • AI : 10 cmH2O

Rappel : La « normalité » varie d’un patient à l’autre. Avant de passer à la VSAI, il convient d’examiner le travail respiratoire, la FR (18 resp./min) et les signes vitaux (fréquence cardiaque et pression artérielle) pour établir les valeurs de référence.

Que faites-vous maintenant?

Surveillez le patient pendant environ 5 minutes pour évaluer la FR, le volume courant, le travail respiratoire et les signes vitaux.

Le clinicien doit viser une FR de 12 à 25 resp./min et un volume courant à peu près identique au volume du mode VAC précédent. Surveillez les signes d’augmentation du travail respiratoire et les signes vitaux pour détecter tout changement de 20 % ou plus par rapport aux valeurs de référence. Si l’état du patient s’aggrave, augmentez l’AI de 1 à 2 cmH2O et poursuivez l’observation pour déceler une amélioration. Si le volume courant est plus élevé qu’en mode VAC ou si la FR se situe dans les plus faibles valeurs normales, essayez de diminuer l’AI de 1 à 2 cmH2O et procédez aux mêmes évaluations que celles mentionnées ci-dessus. N’oubliez pas! Nous visons l’AI minimale tolérée pour permettre au patient de respirer confortablement sans augmenter le travail respiratoire.

Le patient semble tolérer le changement. Quelle est la suite?

Refaites une gazométrie après 30 minutes et si tout semble bon, envisagez de diminuer l’AI dans les heures qui suivent jusqu’à atteindre les paramètres minimums. À ce moment, le patient pourrait être candidat à l’extubation.

Étude de cas B

Un patient souffrant d’hypoxie sévère est intubé en raison de besoins croissants en oxygène. Après l’intubation initiale, avant d’être mis sous respirateur, il se réveille et respire spontanément. Le thérapeute respiratoire a essayé de mettre le patient sous ventilation en pression contrôlée (VPC), mais le patient cause le double déclenchement du cycle respiratoire et a des problèmes d’inconfort. Au lieu d’instaurer une sédation profonde, le thérapeute respiratoire tente de mettre le patient sous ventilation spontanée avec aide inspiratoire pour voir s’il peut continuer à respirer par lui-même.

Ce patient est-il candidat à la VSAI?

Peut-être. Il a une commande respiratoire intacte et l’aide inspiratoire lui offrirait probablement un meilleur confort, mais l’hypoxie peut indiquer que le patient ne sera pas stable en mode spontané. Il y a lieu de surveiller de près l’état d’oxygénation du patient et d’analyser ses résultats de gazométrie pour détecter toute détérioration, auquel cas le patient doit être mis sous sédation et ventilation contrôlée.

Quels seraient les paramètres de départ?

Puisque le patient est intubé principalement pour un problème d’oxygénation, la FiO2 doit être configurée à 1,0 avec une PEP plus élevée (si le médecin le juge acceptable), probablement à 10 cmH2O pour commencer. L’AI peut être configurée à 10 cmH2O au départ, puis augmentée si la FR est élevée ou si le volume courant est faible.

Que faites-vous maintenant?

La FiO2 peut être diminuée en surveillant la SpO2 dans les minutes suivantes. Il faut surveiller les signes vitaux, la FR et le travail respiratoire pour déterminer s’il faut augmenter le niveau d’aide inspiratoire. Si le volume courant est trop élevé et que le patient ne tolère pas l’aide inspiratoire, l’AI peut être diminuée jusqu’à ce que le volume revienne dans les valeurs normales de 4 à 8 ml/kg, tant que le patient ne présente pas de signes d’intolérance comme une augmentation du travail respiratoire (rappelez-vous le moyen mnémotechnique DiapHRaGM).

Le patient semble tolérer l’aide inspiratoire. Quelle est la suite?

Il faut surveiller les résultats de la gazométrie pour s’assurer que le patient tolère ce mode. Si l’état du patient change, les paramètres doivent être augmentés au niveau précédent mieux toléré. En cas de changement important, il y a lieu d’envisager la sédation et la ventilation contrôlée si les résultats de la gazométrie sont préoccupants.

Il est important de se rappeler que, comme la VSAI implique un cycle respiratoire déclenché par le patient, le fait de changer le niveau de l’aide inspiratoire ne modifiera pas nécessairement le volume courant ou la fréquence respiratoire du patient. Parfois, le contrôle neurologique de la respiration reste inchangé. Voici deux situations courantes qui correspondent à ce scénario :

Exemple no 1 : Acidocétose diabétique

Le patient est susceptible d’être tachypnéique (respiration rapide) et de présenter un volume minute (volume insufflé par minute, calculé en multipliant le volume courant par la fréquence respiratoire) élevé. La tachypnée pourrait être interprétée par certains comme une augmentation du travail respiratoire. Augmenter le niveau d’aide inspiratoire ne diminuera pas la fréquence respiratoire. Le patient restera probablement tachypnéique, peu importe le mode utilisé ou les paramètres configurés. La tachypnée n’indique pas que la ventilation est inefficace, Il s’agit plutôt d’un symptôme de la physiopathologie de la maladie.

Exemple no 2 : Sédation excessive et réveil anesthésique

Un patient qui a reçu une grande quantité de sédatifs ou de narcotiques respire généralement très lentement et présente un volume courant élevé. Parfois, la fréquence respiratoire peut être inférieure à 10 resp./min avec un volume courant bien au-delà des valeurs indiquées d’après le poids idéal du patient. La diminution de l’AI jusqu’au minimum peut parfois encore révéler un volume courant trop élevé et une fréquence respiratoire en deçà des valeurs normales. Ces effets se résorbent normalement lorsque la sédation s’estompe. Il y a lieu d’envisager de diminuer encore plus la sédation ou de permettre au patient de se réveiller davantage.

Attribution des éléments visuels

Licence

L’ABC de la ventilation mécanique© par Melody Bishop, B.Sc., thérapeute respiratoire, assistante en anesthésie clinique certifiée (AACC). Tous droits réservés.

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