Administration d’oxygène : Régler la FiO2

L’oxygène est toujours réglé sur un respirateur, quels que soient le mode ou le type de ventilation. Étant donné que l’air acheminé par respirateur représente la totalité de l’air respiré par le patient, la composition ou le pourcentage d’oxygène doivent être paramétrés sur l’appareil. Sur le respirateur, le taux d’oxygène est déterminé par la FiO2, laquelle doit être réglée entre 0,21 et 1,0 pour que le patient reçoive suffisamment d’oxygène.

Notions à retenir

Il faut toujours régler la FiO2 sur un respirateur, peu importe le mode ventilatoire.

Les principes de l’évaluation des besoins en oxygène présentés dans les autres sections peuvent s’appliquer au réglage des paramètres sur le respirateur. Si la SpO2 est inférieure à 92 %, il faut augmenter la FiO2 fournie par le respirateur afin d’augmenter la quantité d’oxygène disponible et ainsi la quantité d’oxygène dans l’organisme. L’augmentation de la FiO2 fait monter la pression partielle de l’oxygène dans les alvéoles pulmonaires, ce qui augmente la quantité d’oxygène se diffusant à travers la membrane alvéolocapillaire pour se fixer à l’hémoglobine et augmente également la quantité d’oxygène se dissolvant dans la circulation sanguine. Il convient de rappeler que l’air circule de la pression élevée à la pression basse. Par conséquent, si la pression partielle de l’oxygène est plus élevée dans les alvéoles que dans le sang, une telle différence favorisera la diffusion de l’oxygène à travers la membrane alvéolocapillaire dans le sens du gradient (de la concentration la plus forte à la plus faible), soit des alvéoles vers la circulation sanguine (voir l’animation).

Échange gazeux dans la circulation sanguine

Lonely Teeming Billygoat, via GfyCat

Radicaux libres oxygénés

Cependant, le processus n’est pas aussi simple! On ne peut quitter le chevet du patient après avoir réglé l’oxygène. D’abord, il est important de noter que l’oxygène est considéré comme un médicament. À l’instar des autres médicaments, des effets indésirables y sont associés. La recherche médicale a conclu que l’exposition à de grandes quantités d’oxygène pendant des périodes prolongées peut endommager les poumons. Un taux élevé d’oxygène dans l’organisme crée des radicaux libres oxygénés, un sous-produit qui provoque la cicatrisation et le durcissement de la délicate membrane alvéolocapillaire et complique ainsi la diffusion de l’oxygène. La meilleure façon de limiter l’exposition aux radicaux libres oxygénés est d’administrer le strict nécessaire afin d’éviter tout surplus d’oxygène circulant dans l’organisme.

Pour en savoir plus, visitez cette page sur les radicaux libres et l’oxygène réactif.

Il paraît inconcevable que l’oxygène cause des dommages. Le « danger » d’administrer de l’oxygène est largement incompris et incite bon nombre de prestataires de soins à éviter cette option. Cependant, rappelons que l’oxygène est vital pour toutes les cellules de l’organisme. Sans oxygène, les cellules mourraient! L’hypoxie peut causer des lésions cérébrales en près de quatre minutes. Les dégâts causés par une exposition à une trop grande quantité d’oxygène se manifestent plus lentement. Il est essentiel de comprendre qu’il faut administrer plus d’oxygène si le taux est bas et poursuivre l’oxygénation même si la SpO2 semble baisser. Il faut simplement éviter de fournir une concentration d’oxygène trop élevée pendant une période prolongée.

Notions à retenir

Devant le dilemme entre le traitement de l’hypoxie (faible taux d’oxygène) ou de l’hyperoxie (taux d’oxygène trop élevé), il est toujours préférable, à court terme, de traiter l’hypoxie, car elle peut menacer le pronostic vital. Les traumatismes cérébraux et les lésions hypoxiques peuvent survenir en quelques minutes, alors que la libération de radicaux libres oxygénés se produit plus lentement, en quelques heures ou quelques jours.

Exemple pratique

Couverture d’un livre pour enfants représentant Boucle d’or et les trois ours

Qui se rappelle le conte pour enfants « Boucle d’or et les trois ours »? En ce qui se rapporte à l’oxygène, il ne faut surtout pas en administrer trop peu, ce qui entraînerait une hypoxie et des lésions tissulaires. Il ne faut pas non plus trop en administrer, surtout pendant trop longtemps, pour éviter l’hyperoxie, la libération de radicaux libres oxygénés et les dommages aux membranes cellulaires. Il faut un « juste dosage », avec une SpO2 supérieure à 92 %, mais inférieure à 100 %. La concentration d’oxygène administrée peut être ajustée en l’augmentant ou en la diminuant lentement et progressivement jusqu’à obtenir une SpO2 de 92 à 99 % chez les personnes en bonne santé.

La SpO2 n’atteint 100 % que lorsque toute l’hémoglobine est liée à l’oxygène. L’excédent d’oxygène présent dans les poumons n’est pas capté par l’hémoglobine. Donc, si la SpO2 est de 100 % et la FiO2 est de 0,60, cette personne pourrait tout de même avoir une SpO2 de 100 % avec une FiO2 de 0,50. Il pourrait y avoir un surplus d’oxygène qui entraînerait l’augmentation de la PaO2 au-delà des valeurs normales de 80 à 100 mmHg, car la concentration élevée d’oxygène dans les alvéoles favorise une plus grande diffusion dans le plasma.

Il est possible de vérifier la présence d’un excès d’oxygène en effectuant une gazométrie artérielle et en mesurant la PaO2. Les valeurs normales se situent entre 80 et 100 mmHg. Si la SpO2 est de 100 %, la PaO2 pourrait être de 100 mmHg ou supérieure à 400 mmHg. Une PaO2 supérieure à 100 mmHg indique une suroxygénation ou une hyperoxie. Un taux élevé supérieur à 100 mmHg augmente le risque de radicaux libres oxygénés et de lésions pulmonaires.

Comme il n’est pas possible de savoir si une SpO2 de 100 % est le signe que la personne reçoit assez ou trop d’oxygène, un moyen facile d’éviter tout doute est de viser une SpO2 de 92 à 99 % et de ne pas laisser la SpO2 à 100 % à moins que l’oxygène soit au minimum (c’est-à-dire une FiO2 de 0,21).

Repensons à l’équation de la concentration d’oxygène (CaO2). La PaO2 fait partie de l’oxygène dissous. Tant que l’hémoglobine remplit bien son rôle, une PaO2 élevée ne contribue pas à l’apport d’une quantité significative d’oxygène en comparaison à une PaO2 de 100.

Comparons deux exemples de concentration d’oxygène dans le sang. La quantité d’hémoglobine saturée est la même dans les deux cas et respecte les seuils sécuritaires. Le patient X reçoit « juste assez » d’oxygène pour saturer l’hémoglobine à 97 % (taux sécuritaire), mais sans excès d’oxygène avec une pression partielle d’oxygène de 100 mmHg. À l’inverse, le patient Y reçoit trop d’oxygène. L’hémoglobine est entièrement saturée et la pression partielle d’oxygène dans le sang est supérieure aux valeurs normales. Comparez la concentration d’oxygène entre les deux patients.

Patient X – FiO2 administrée : 0,40
Hb : 85; SpO2 : 97 %; PaO2 : 100 ⇒ PaO2 normale cible
CaO2 = (85)(1,34)(0,97) + (0,003)(100)
= 110,5 + 0,3
= 110,8
Patient Y – FiO2 administrée : 1,00
Hb : 85; SpO2 : 100 %; PaO2 : 400 ⇒ Hyperoxie, trop d’oxygène
CaO2 = (85)(1,34)(1,00) + (0,003)(400)
= 113,9 + 1,2
= 115,1

Comparez la concentration d’oxygène (CaO2) calculée pour les deux patients. La CaO2 calculée pour les deux patients est très proche, bien qu’ils reçoivent des quantités d’oxygène très différentes. Le modèle montre que, si l’hémoglobine est normale, l’aspect le plus important de l’oxygénation du sang consiste à fournir le strict nécessaire pour saturer l’hémoglobine de manière adéquate. L’administration excessive d’oxygène ne contribue pas de manière significative à l’amélioration de l’oxygénation si la saturation de l’hémoglobine ne change pas. Par conséquent, les dommages liés à l’apport de quantités élevées d’O2 et à la création de radicaux libres oxygénés dépassent largement les avantages de la dissolution d’une plus grande quantité d’oxygène dans le sang. Il convient donc d’éviter cette pratique.

Attribution des éléments visuels

Licence

L’ABC de la ventilation mécanique© par Melody Bishop, B.Sc., thérapeute respiratoire, assistante en anesthésie clinique certifiée (AACC). Tous droits réservés.

Partagez ce livre