6. Étiquettes et contextes
1. Introduction
Cette semaine, nous terminons les relations lexicales avant d’aborder de manière explicite la notion de position dans la phrase. Nous pourrons alors manipuler le code (orale et écrit) et la sémantique dans des contextes de phrase.
La première section définit la relation d’hyperonymie comme une relation entre deux étiquettes ayant des domaines différents appliqués à une réalité, la section suivante discute du rôle des champs sémantiques et du contexte d’énonciation pour l’établissement d’une relation d’hyperonymie. Dans la deuxième partie, nous introduisons des notions qui seront travaillées dans les trois prochains cours, qui mettent en contexte de phrases les formes du code oral et du code écrit et leur domaine d’application (leur sens). Nous discutons de la forme [koz] en code écrit, qui peut apparaître dans différents contextes syntaxiques: les formes nous voyons que les formes correspondantes en code écrit reflètent dans certains cas la valeur grammaticale de la forme. Cette discussion met en évidence la correlation entre les marques d’accord, la distribution des formes (leur position dans la phrase), et la morphologie des mots (leur composition interne).
2. Hyperonymie et hyponymie
Après une brève introduction des points mis en évidence dans cette section et la section suivante, l’exercice suivant présente la relation d’hyperonymie et d’hyponymie.
Exercice 1 : hyperonymie: étiquettes avec des domaines d’application différents
Points à retenir
- La relation d’hyperonyme à hyponyme est une relation entre des étiquettes appliquées à des réalités du monde.
- Il y a hyperonymie-hyponymie lorsque:
- deux étiquettes sont applicables à une même réalité et
- une de ces étiquettes (l’hyperonyme) a un domaine d’application plus large que l’autre (l’hyperonyme). (HYPER = plus large!)
- Pour démontrer qu’il y a hyperonymie-hyponymie, on doit MINIMALEMENT avoir deux étiquettes et deux réalités.
- Une des étiquettes s’applique aux deux réalités (l’hyperonyme) et
- L’autre étiquette (l’hyponyme) s’applique à seulement une des deux réalités.
- Deux hyponymes d’un même hyperonyme sont en opposition dans le domaine d’application de l’hyperonyme.
3. Hyperonymie, champs sémantiques et contexte
L’application de deux étiquettes à deux réalités n’est pas toujours suffisante pour déterminer s’il y a une relation d’hyperonyme-hyponymie. Celle-ci dépend aussi de considérations sémantiques et discursives. Notamment, et c’est le sujet du prochain exercice, les champs sémantiques auxquels appartiennent les entités étiquetées par une forme jouent un rôle significatif.
Exercice 2 : catégorisation et champs sémantiques
Points à retenir
- L’étiquetage de réalités du monde avec des formes linguistiques donne une expression concrète de régularités dans le monde.
- La catégorisation est effectivement exprimée par des hyperonymes – le nom de la catégorie – et les hyponymes – le nom des membres de la catégorie.
- La relation d’hyperonymie est une relation entre étiquettes et non une relation entre réalités du monde.
- Ceci permet une catégorisation qui est dépendante du contexte de la conversation.
- Une communication effective n’est pas directement dépendante de ce qu’on sait à propos d’une réalité: ce qui compte est de reconnaître la réalité en question et l’entente tacite entre locuteurs et locutrices qu’une forme donnée s’y applique.
Les circonstances spécifiques qui entourent la discussion (par exemple où on se trouve exactement, de quoi il est question dans la conversation) sont aussi significatives pour l’établissement d’une relation d’hyperonyme-hyponyme.
Exercice 3 : hyperonymie, synonymie et contexte
Points à retenir
- Dans un contexte d’utilisation particulier, deux formes peuvent être dans une relation d’hyperonymie-hyponymie (une des deux formes a un domaine d’application plus large que l’autre).
- Les mêmes deux formes dans un autre contexte peuvent être dans une relation de synonymie relative au contexte (dans ce contexte, les deux formes ont le même domaine d’application)
- Deux formes sont dans une relation de synonymie absolue si elles s’appliquent à la même réalité dans tous les contextes d’utilisation.
Conclusion sur l’hyperonymie-l’hyperonymie
Tout ce que nous venons de voir semble indiquer que la catégorisation du monde avec des expressions linguistiques est une chose complexe. Il n’en est rien: tout ceci est très simple. La difficulté vient du fait que les choses les plus simples sont parfois les plus difficiles à mettre en mots!
Points à retenir
- La relation d’hyperonyme à hyponyme est une relation entre des étiquettes appliquées à des réalités du monde.
- Il y a hyperonymie-hyponymie lorsque
- deux étiquettes qui sont applicables à une même réalité et
- une de ces étiquettes (l’hyperonyme) a un domaine d’application plus large que l’autre (l’hyperonyme). (HYPER = plus large!)
- Deux étiquettes hyponymes d’un hyperonyme sont en opposition dans le domaine d’application de cet hyperonyme.
- La relation d’hyperonyme-hyponyme permet de nommer des catégories utiles aux domaines d’activités humains.
- La catégorisation est établie sur les champs sémantiques sur lesquels les formes s’appliquent.
- Une même réalité peut être catégorisée différemment selon le champ sémantique dont il est question dans la conversation.
- Des individus peuvent avoir une catégorisation différente pour une même réalité: ceci n’affecte pas la communication dans la mesure ou ceux-ci s’entendent sur l’applique de la forme à cette réalité.
- L’établissement d’une relation d’hyperonymie est aussi sensible au contexte d’utilisation des mots.
- Une paire de mots peut être dans une relation de synonymie relativement à un contexte d’utilisation spécifique.
- La même paire peut être dans une relation d’hyperonymie si le contexte change.
- Une paire de mot est dans une relation de synonyme absolue si leur domaine d’application est identique dans tous les contextes d’utilisation.
Cette section termine la discussion du sens des mots (de leur domaine d’application dans nos termes) pour maintenant aborder le contexte de la phrase.
4. La cause de toutes les causes
Nous avons constaté dans les semaines précédentes que les formes linguistiques sont extrêmement polyvalentes, c’est-à-dire qu’elles peuvent avoir plusieurs emplois. Considérez le cas de la forme [koz] discutée dans l’exercice suivant:
Exercice 4 : la forme [koz] dans différents contextes
Points à retenir
On confirme ce qu’on sait déjà: il y a beaucoup plus de marques d’accord en code écrit qu’en code oral, et ce autant pour les verbes que pour les noms.
- Il y a beaucoup plus de formes différentes pour un verbe donné que pour un nom.
- la forme cause utilisée comme nom a une forme à l’oral et deux formes à l’écrit,
- la forme utilisée comme verbe peut apparaître avec l’ensemble des terminaisons associées au conjugaison des verbes du premier groupe en français.
5. Homonymie, polysémie ou autre?
Les divers emplois de cause qui viennent d’être discutée: s’agit-il d’homonymie ou de polysémie? C’est le sujet de la prochaine série d’exercices.
Exercice 5 : la forme [koz] à toutes les sauces
Points à retenir
Nous avons identifié aux moins trois emplois différents de la forme cause, qui s’applique à chaque cas à des réalités différentes:
- comme nom: qui s’applique à une affaire judiciaire/intérêt (l’équivalent de case en anglais). La juge entend la cause
- comme verbe: parler de, discuter. Il cause, il cause, mais il ne dit pas grand chose.
- comme verbe et nom: événement qui entraîne une conséquence dans la relation de cause à effet. Si la tempête cause des dégâts, elle est donc la cause des dégâts.
Dans les relations de cause à effet, la position de cause permet une description complète ou partielle:
- la forme cause en position de verbe permet une description complète de la relation de cause à effet, l’événement qui entraîne une conséquence étant exprimée par le sujet (la tempête dans la tempête cause des dégâts);
- utilisée comme nom, la forme cause donne une description partielle, dans la mesure où cause s’applique directement à l’événement qui entraîne la conséquence.
Il faut faire attention: on ne peut pas généraliser le comportement de cause dans les positions nominale et verbale à toutes les formes de la langue. Il y a beaucoup de cas différents, comme l’exercice suivant le montre.
Exercice 6 : d’autres cas
Points à retenir pour le chapitre 6
- La relation d’hyperonyme à hyponyme est une relation entre des étiquettes appliquées à des réalités du monde.
- Les relations d’hyperonymie impliquent des différences de domaine d’application de formes appliquées à une même réalité.
- Deux étiquettes hyponymes d’un hyperonyme sont en opposition dans le domaine d’application de l’hyperonyme.
- Pour établir une relation d’hyperonyme-hyponyme, on doit prendre ce deux points en considération:
- des champs sémantiques sur lesquels les étiquettes d’appliquent.
- le contexte d’utilisation de la phrase.
- Un mot peut apparaître dans différentes positions dans la phrase.
- Les formes possibles du mot dépendent de sa position dans la phrase.
- Le mot peut parfois s’appliquer à la même réalité indépendamment de sa position dans la phrase.
- Il peut aussi s’appliquer à des réalités différentes selon qu’il est en position de nom, de verbe ou même d’adjectif.