8 Fabriquer la tradition canadienne-française : le tabac canadien et la construction de l’identité canadienne-française, 1880-1950

Jarrett Rudy

Traduit de l’anglais par Hélène Paré[1]

Au Québec, de la fin du XIXe siècle à la fin de la Seconde Guerre mondiale, plusieurs compagnies de tabac ont fabriqué, emballé et mis en marché du tabac à pipe domestique destiné plus spécifiquement aux Canadiens français. Leurs produits, connus sous le nom générique de « tabac canadien », ont occupé une place particulière au sein des rituels d’usage du tabac de cette partie de la population. En effet, au moins jusqu’à la fin des années 1920, la manière la plus répandue de consommer du tabac au Québec était de fumer la pipe[2]. Même s’il n’a pas été le tabac le plus populaire auprès des fumeurs de pipe, le tabac canadien mérite tout de même notre attention, car l’examen de son utilisation et de sa commercialisation fournit de précieuses indications sur le passage d’une culture préindustrielle et rurale à une culture moderne et industrialisée[3]. Tout d’abord, l’étude du tabac canadien permet de mettre en lumière les rituels et les traditions qui ont rassemblé les gens en groupes distinctifs ou en « communautés imaginées » (souvent appelées « nations »). Les rituels aidant à « imaginer » la communauté étaient particulièrement importants à cette époque au Québec, alors que l’identité nationale était remise en question et que l’urbanisation et le capitalisme industriel s’attaquaient aux fondements des rapports sociaux et des catégories culturelles[4]. L’histoire du tabac canadien permet en second lieu de comprendre le rôle que les entreprises et l’État ont joué dans la transformation et l’abandon de ces rituels culturels[5]. Enfin, cette étude permet d’éclairer la conception de la respectabilité qui encadrait les traditions liées à l’usage du tabac et de comprendre comment ces traditions étaient imbriquées dans la construction plus large des identités de race, de classe et de genre[6].

Même si les marques de tabac canadien trouvent leurs origines dans la vie économique et culturelle de la société canadienne-française préindustrielle, au moment où l’on a commencé à commercialiser ce tabac traditionnel, les rituels entourant son usage avaient déjà été modifiés par la séparation entre la production et la consommation ainsi que par l’association de plus en plus exclusive entre le tabagisme et la masculinité. Par ailleurs, la concomitance des processus d’urbanisation de la population francophone et de l’industrialisation de la production de tabacs étrangers a conféré au tabac canadien-français un nouveau symbolisme national. L’État, tout comme les compagnies qui produisaient ce tabac, a joué un rôle important dans la promotion de la consommation domestique du tabac canadien. La politique tarifaire, le rôle des anciens marchands de tabac canadien-français et l’implantation de l’American Tobacco Company of Canada, propriété de James Buchanan Duke, représentent, à cet égard, autant d’éléments clés. Les compagnies de tabac canadien, attentives aux critiques des connaisseurs, ont alors cherché à présenter leur tabac comme un produit authentiquement canadien-français, tout en se dissociant des conditions économiques préindustrielles dans lesquelles le tabac canadien était fabriqué[7]. D’une compagnie à l’autre, divers moyens de promotion ont été utilisés selon le degré d’association de chacune d’elles avec les origines du tabac canadien. Ultimement, le déclin de ces marques est lié à la fois à la promotion, par les entreprises, d’une taxe gouvernementale sur le tabac canadien et à un changement plus large de la culture canadienne-française après la Seconde Guerre mondiale.

Le goût de la patrie

La consommation de tabac canadien est une tradition ancienne qui s’enracine dans l’économie canadienne-française préindustrielle[8]. De nombreux écrits historiques sur le tabac du Québec rédigés au tournant du XXe siècle soutiennent que ce tabac était cultivé selon les méthodes autochtones locales[9]. Cependant, même si le tabac cultivé par les habitants a pu ressembler à celui des Autochtones, les transformations de l’économie domestique des agriculteurs canadiens-français ont contribué à établir des traditions et à développer leur goût pour leur propre tabac canadien. En plus de leurs principales cultures, les agriculteurs canadiens-français faisaient pousser de petites quantités de tabacs forts comme Quesnel, Parfum d’Italie, Big Havana ou Canelle qui étaient souvent mélangés pour la consommation familiale ou pour la vente dans les marchés locaux quand il y avait des surplus. Ce tabac était aussi transformé en un certain nombre de produits finis si les agriculteurs en avaient le temps. Par exemple, pour faire un Canada Twist, un Canadian Roll, ou une « carotte », le tabac était étroitement tordu, puis compressé dans une presse à tabac[10]. La plupart du temps, le tabac était fumé par l’agriculteur et sa famille qui le hachaient eux-mêmes quotidiennement, une tradition qui a été maintenue dans de nombreux ménages québécois jusqu’au XXe siècle. De plus, puisque le tabac était cultivé à des fins de consommation domestique, le gouvernement fédéral exemptait les fermiers de la taxe d’accise, à condition qu’ils ne vendent pas leurs récoltes à des fabricants licenciés[11].

C’est vers le début du XXe siècle que la production domestique du tabac s’est commercialisée alors qu’une division entre la production locale de tabac et sa consommation s’est opérée. Des intermédiaires ont également commencé à acheter le tabac exonéré de taxes des agriculteurs pour le revendre à de plus grands fabricants, ouvrant ainsi un important marché canadien-français. Ces intermédiaires ont mis en place des infrastructures pour distribuer le tabac canadien dans les marchés agricoles et chez les marchands de tabac des zones urbaines du Québec. Le négociant de tabac Charles Frenette de Saint-Charles de Bellechasse en est un exemple. En 1902, année où il est entré en affaires, il négociait 50 000 livres de tabac, contre 950 000 en 1933. Il n’était pas le seul à faire ce type de commerce, car cette même année, lors de son témoignage devant la Commission royale d’enquête sur les écarts de prix, il rapportait qu’il y avait entre vingt-cinq et trente autres négociants seulement dans sa région[12]. D’ailleurs, dans les années 1930, des représentants du gouvernement fédéral estimaient qu’environ dix millions de livres de tabac canadien-français, exonéré d’impôt, circulaient dans les marchés du Québec[13].

Durant le XIXe siècle, non seulement la production et la consommation de tabac canadien sont devenues distinctes, mais le tabagisme est devenu une pratique genrée, car désormais, seuls les hommes pouvaient fumer tout en demeurant respectables. On ne sait pas avec certitude si tel était le cas avant les années 1850, car de nombreuses sources montrent qu’au début du XIXe siècle, en milieu rural, au moins quelques Canadiennes françaises fumaient en public sans être stigmatisées. Vers la fin du siècle, toutefois, les femmes qui osaient défier l’étiquette[14] étaient considérées comme des prostituées, des barbares ou encore, dans le cas de fumeuses canadiennes-françaises âgées, comme des attardées tout droit sorties d’une autre époque[15]. De fait, l’association exclusive entre l’usage du tabac et le genre masculin n’a pas été le résultat d’un règlement gouvernemental ou de campagnes antitabac, mais est plutôt survenue dans le contexte de transformations culturelles plus larges touchant à la différenciation des genres[16]. Cette nouvelle sexualisation des rituels liés au tabac dans la société rurale canadienne-française est perceptible, par exemple, dans les récits décrivant les veillées d’hiver de la fin du XIXe et du début du XXe siècle, alors que familles et amis se rendaient visite pour danser au son du violon, jouer aux cartes et se courtiser. En fin de soirée, le groupe se séparait : les femmes socialisaient dans une pièce, tandis que les hommes se rassemblaient dans une autre pour fumer leur pipe de tabac canadien[17]. Ainsi, en termes genrés, les rituels liés au tabac considérés acceptables par les Canadiens français ressemblaient à ceux de la majorité du monde occidental[18].

Au-delà de la sexualisation de ces rituels, il s’est également opéré une transformation du symbolisme culturel associé aux fumeurs de tabac domestique canadien-français. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, alors que les Canadiens français s’urbanisaient et que les hommes étaient confrontés à l’arrivée de nouveaux tabacs industriels étrangers dont le goût et l’odeur différaient de leur tabac traditionnel, le tabac canadien a commencé à prendre une nouvelle signification nationale[19]. Fumer du tabac canadien était devenu une façon de proclamer son allégeance envers le Canada français, un moyen utilisé par les hommes pour se démarquer des autres fumeurs. Pour certains, ce tabac représentait tout simplement le goût de la patrie. C’est ainsi que, probablement pour tenter d’attirer de nouveaux membres francophones récemment émigrés de la campagne, des syndicats de Montréal qui annonçaient leurs activités sociales dans les journaux spécifiaient que du tabac canadien serait distribué gratuitement lors de ces rassemblements[20]. Le tabac local était aussi utilisé comme symbole d’appartenance à la nation canadienne-française, comme l’illustrent deux exemples tirés d’un article publié dans un périodique montréalais destiné à la classe moyenne, Le Monde illustré. Peu après les élections de 1891, le journaliste Léon Ledieu rapportait les propos d’un agriculteur canadien-français au sujet de l’homme politique élu dans sa circonscription : « J’ai observé notre député. Je pensais qu’il était différent de nous jusqu’à ce que je m’aperçoive qu’il fumait du tabac canadien-français », aurait-il affirmé. Non seulement le politicien était racheté, mais il était considéré comme faisant partie des « leurs », parce qu’il fumait du tabac canadien. Même si les préférences en matière de tabac relevaient d’une décision privée, elles pouvaient être interprétées comme une déclaration publique voulant que ce politicien fasse partie de la collectivité locale. Du même souffle, l’éditeur urbain Léon Ledieu utilisait cette histoire pour s’associer lui-même avec le monde rural canadien-français, foyer idéologique de cette nation durant cette période. Judicieusement intitulé « Entre nous », l’article de Ledieu montre une des façons dont les choix en matière de tabac ont contribué à construire le « nous » canadien-français[21].

Il est fort probable que des politiciens aient volontairement utilisé le symbole du tabac canadien-français à des fins nationalistes. Le plus éminent nationaliste canadien-français de l’époque, Henri Bourassa, était effectivement un grand amateur de tabac canadien, qu’il fumait en public et au sujet duquel il a écrit dans son propre journal[22]. Après la mort de Bourassa, de nombreux amis se sont souvenus de lui fumant ce tabac fort dans des pipes en argile et ont, d’ailleurs, trouvé cette habitude suffisamment légendaire pour y faire allusion dans un recueil de souvenirs à sa mémoire[23]. Sans aucun doute, Bourassa aurait pu s’offrir des pipes et du tabac beaucoup plus coûteux, mais peu importe ses intentions, les gens ont essayé de construire son identité à travers ses choix en matière de tabac et de pipe, tout comme les habitants et Léon Ledieu l’ont fait avec l’homme politique évoqué plus haut. Quand, en 1907, lors d’un rassemblement nationaliste à Rimouski, Bourassa est monté sur l’estrade en fumant du tabac canadien dans sa petite pipe d’argile en attendant de prononcer son discours, son oraison nationaliste avait probablement déjà commencé bien avant qu’il n’ouvre la bouche[24].

Durant cette même période, il faut toutefois souligner que pour de nombreuses personnes, l’usage du tabac canadien ne constituait pas un fier symbole de patriotisme et représentait plutôt le retard du milieu rural canadien-français. Cette opinion n’était pas fonction de l’ethnicité, car aussi bien des anglophones que des francophones ont exprimé leur dégoût pour le tabac canadien, même s’il est probable que davantage d’anglophones le méprisaient. Les critiques du tabac canadien adhéraient à des normes hiérarchiques en matière de goût, qu’ils considéraient comme les références incontournables des fins connaisseurs. Ces derniers se définissaient comme des « hommes rationnels » en matière de consommation du tabac, soit l’antithèse des consommatrices, considérées comme des acheteuses irrationnelles et même hystériques[25]. Ces hiérarchies de goût permettaient également de distinguer les hommes de la classe « supérieure » des pauvres et des nouveaux riches, et de différencier les hommes « civilisés » des « non-civilisés » dans la construction d’idéologies basées sur l’ethnicité[26]. La supériorité de l’agriculture moderne guidée par la logique du marché capitaliste et les idées sur la race de la fin du XIXe siècle étaient au centre des croyances des fins connaisseurs[27]. L’argumentation contre le tabac canadien reposait sur trois principes. Tout d’abord, les connaisseurs considéraient qu’il ne s’agissait pas d’une souche pure de tabac, car non seulement son goût variait, mais son rendement était moins élevé que celui du tabac cultivé aux États-Unis[28]. Deuxièmement, d’autres croyaient que son odeur et son goût particulièrement forts et distinctifs étaient attribuables à un mode de séchage et à un processus de préparation non systématiques. Il est vrai que dans l’économie rurale, la culture du tabac était une activité accessoire et que sa production dépendait toujours des conditions météorologiques, des variations saisonnières et du temps consacré aux cultures les plus importantes. Par conséquent, les agriculteurs, qui étaient très occupés, étaient souvent obligés de récolter le tabac soit trop tôt, soit trop tard. Le séchage, la préparation ou tout autre processus de transformation effectué avant la vente aux consommateurs demeuraient ainsi souvent inachevés, d’où l’odeur parfois âcre du tabac à pipe[29]. La troisième raison pour dénigrer le tabac canadien était liée au caractère supposément douteux du terroir où il était produit. Les connaisseurs, les experts et les fabricants de tabac insistaient sur le fait qu’un tabac de qualité exige un travail, un climat et un sol « intelligents », le terroir étant la condition sine qua non de sa valeur[30]. Le terroir canadien-français était jugé inadéquat au prétexte que les agriculteurs avaient adopté des pratiques autochtones pour cultiver leur tabac, pratiques considérées non civilisées et incompatibles avec la production de tabacs fins. Ces croyances sur la façon « appropriée » de cultiver le tabac étaient fondées sur des préjugés au sujet de l’intelligence innée de certaines « races » qui reléguaient les Canadiens français, les Autochtones nord-américains, les Mexicains et les cultivateurs de tabac non blancs dans la même catégorie dénigrée des agriculteurs ignorants et dépassés[31].

À la fin du XIXe siècle, la plus grande partie du tabac cultivé au Canada n’était presque pas utilisé par les fabricants canadiens de tabac à pipe, car la plupart d’entre eux adhéraient à une ou plusieurs de ces croyances. Par conséquent, les tabacs importés de Virginie, du Kentucky et du Missouri sont devenus la référence en matière de normes de qualité[32]. Ainsi, l’industriel du tabac montréalais William Macdonald, qui dominait l’industrie canadienne au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, refusait d’utiliser le tabac canadien-français à cause de son terroir. Par l’intermédiaire de son système de distribution massif, il a fixé des normes qui ont fait du tabac industriel américain la référence en matière de goût dans la plus grande partie du Canada[33].

Pour les fumeurs de tabac canadien, le sens rattaché à leur rituel culturel ne sera plus jamais le même. Non seulement les méthodes de production de tabac canadien-français étaient considérées comme archaïques, mais les fumeurs de tabac canadien étaient vus comme des consommateurs de mauvais goût, incapables de discernement et dont les choix médiocres trahissaient des insuffisances de caractère. Par exemple, John Todd, un étudiant en médecine de McGill qui expédiait régulièrement du tabac soigneusement sélectionné à son père en Ontario, décrivait dans une lettre envoyée à sa mère les habitudes à son avis « dégoûtantes » des fumeurs canadiens-français de la campagne. Lors du passage du cirque « Barnum and Bailey » à Montréal tous les « paysans et paysannes canadiens-français pouvant réunir tout le « nécessaire » s’étaient rendus au cirque », racontait-il, avant de se plaindre d’une famille « composée d’un père, d’une mère, d’un bébé ainsi que de deux petites filles et de quatre garçons, dont l’aîné pouvait avoir quinze ans. Le père et ses fils fumaient ensemble des pipes en argile bourrées d’un ‘tabac rouge’ qui avait une odeur abominable[34] ». Comme l’illustre une caricature de L’Album Universel (Figure 1), certains Canadiens français étaient également dégoûtés par ce rituel[35]. Le dessin intitulé « Une bonne pipe de tabac canadien! » associe sa forte odeur à l’attitude négligée d’un itinérant. La caricature joue ainsi sur la respectabilité, car elle montre que le tabac canadien donne à l’itinérant fainéant les moyens de s’approprier l’espace public de la classe moyenne (symboliquement évoqué à travers les vêtements de ceux qui sont assis).

 

Figure 1 : L’Album Universel, 20 octobre 1906, p. 845.
Une production de masse 

Au tournant du XXe siècle, en dépit de ces croyances dominantes, de nombreux fabricants ont tenté de courtiser les fumeurs de tabac canadien-français. L’industrialisation du tabac canadien a été influencée par trois facteurs : la régulation des prix par l’État au moyen de tarifs, l’expansion des entreprises familiales déjà existantes dans l’industrie du tabac et l’arrivée de multinationales produisant du tabac américain. L’industrialisation du tabac canadien-français a commencé en 1897 au moment où le gouvernement fédéral a imposé des taxes élevées sur le tabac importé, un avantage considérable pour les compagnies de tabac qui s’étaient tournées vers des fournisseurs locaux[36]. Les fabricants de tabac qui refusaient d’utiliser du tabac cultivé au Canada (y compris le chef de file de l’industrie canadienne, William Macdonald) se sont plaints amèrement que l’utilisation de tabac étranger réduisait leur marge bénéficiaire, car pour demeurer concurrentiels, ils ne pouvaient augmenter leurs prix[37]. Tout au long de cette période, les produits manufacturés de tabac canadien se vendaient effectivement beaucoup moins cher que ceux fabriqués au Canada avec du tabac américain[38].

Les fabricants canadiens de tabac canadien ont adopté deux approches différentes pour la production et la publicité de leur produit. D’abord, plusieurs compagnies ont fait la promotion de nouvelles variétés de tabac et de nouvelles méthodes de culture auprès des agriculteurs ontariens et québécois, remplaçant progressivement le tabac américain qu’elles utilisaient jusqu’alors par du tabac canadien, mais sans le dire ouvertement, car ce tabac ressemblait à celui cultivé aux États-Unis[39]. La deuxième approche (et le sujet de cet article) a consisté en une campagne de marketing agressive pour de nouvelles marques de tabac « canadien-français ».

Parmi les compagnies qui ont lancé leur marque de tabac canadien-français, trois en particulier se détachent du lot[40], dont Forest Frères Limitée de Montréal. Les frères Forest sont nés et ont grandi à Saint-Jacques de l’Achigan, au cœur des terres québécoises de culture du tabac, un peu au nord de Montréal. En 1893, Roch, l’instigateur de la compagnie, déménage à Montréal et s’établit comme acheteur de tabac canadien. En 1899, peu après l’entrée en vigueur du tarif protectionniste, Roch et ses frères Narcisse, Georges et Alfred forment un partenariat. Privilégiant probablement à la fois le commerce du tabac en feuilles et celui plus industriel du tabac canadien, l’entreprise demeure de petite envergure jusqu’en 1916, au moment de son incorporation. Le financier Gaspard De Serres devient alors président de l’entreprise et J.O. De Serres, le directeur général. Des trois frères, seul Roch demeure dans la compagnie, à titre de vice-président et responsable des opérations. Au tournant des années 1920, Forest Frères Limitée fait une abondante publicité de ses marques, emploie sept vendeurs ambulants en Ontario et au Québec, accorde des permis de commerce de tabac canadien non manufacturé et vend cinq sortes de tabac canadien industriel. En 1936, la compagnie signe un accord de distribution avec Benson and Hedges avant d’être finalement entièrement acquise par cette société britannique. Vers la fin des années 1950, Benson and Hedges continue d’offrir un nombre réduit de marques de tabac canadien[41].

Les deuxième et troisième producteurs de tabac canadien industriels les plus importants étaient originaires de la ville de Québec. La Rock City Tobacco Company s’est développée à partir de l’épicerie et du commerce en gros, y compris le commerce de tabac, de la famille Drouin. L’entreprise s’est constituée en compagnie en 1899 avec le projet de produire du tabac canadien. Durant la même période, Joseph Picard s’y est joint, devenant sa figure de proue, bientôt suivi par ses fils. La compagnie est demeurée indépendante jusqu’en 1936, lorsque Carreras de Londres a acheté 70 % des actions de Rock City Tobacco, continuant de vendre des marques de tabac canadien jusque dans les années 1950[42]. Enfin, mentionnons la B. Houde & cie créée par Barthélemi Houde en 1841, mais dirigée par J. Alphonse et J. Ernest Dussault vers la fin des années 1890. Lorsque la réglementation sur la protection tarifaire a été modifiée, B. Houde, en plus de fabriquer un vaste assortiment de cigarettes, a commencé à produire plusieurs marques de tabac canadien. Au début du XXe siècle, il affirmait être le plus gros manufacturier de tabac coupé au Canada[43].

Outre la modification législative des droits de douane sur le tabac, un autre événement marquant a façonné le marché industriel du tabac canadien : l’arrivée de l’American Tobacco Company au Canada. Cette multinationale, propriété de James Buchanen Duke, s’est établie au Canada en 1895 et a fait l’acquisition de deux manufacturiers de tabac et de cigarettes montréalais, la D. Ritchie and co. et l’American Cigarette Company, pour fonder l’American Tobacco Company of Canada (ATCC). Dirigée par Mortimer Davis, ancien président de la compagnie D. Ritchie and co. et troisième fils d’une famille depuis longtemps engagée dans la fabrication de cigares, cette exploitation était relativement indépendante de la maison mère américaine, bien que Davis utilisait fréquemment le même genre de stratégies que celles adoptées par Duke aux États‑Unis[44]. Ce fut d’ailleurs le cas lorsque l’entreprise a tenté de percer le marché du tabac canadien-français à Québec. En avril 1899, l’ATCC essaie d’acheter B. Houde, mais devant le prix trop élevé, Davis menace le propriétaire, Alphonse Dussault, « de l’écraser[45] ». L’ATCC réintroduit alors une ancienne marque, Brown Shag, pour concurrencer Carillon, une marque de B. Houde et fait campagne en bradant les prix sur le marché même de B. Houde à Québec. Le prix du Brown Shag chute alors de 30 à 20 cents la livre, tandis que Carillon se maintient à 40 cents la livre[46]. La compagnie fait également la promotion du Brown Shag en distribuant des échantillons gratuits aux coins des rues et aux portes de la manufacture[47].

La réaction la plus importante à l’arrivée de l’ATCC à Québec est venue du mouvement syndical de la ville. Ernest Cinq-Mars, journaliste et premier vice-président du Conseil des métiers et du travail de Québec, interviewe alors les directeurs des compagnies de tabac Rock City et B. Houde, et rédige une brochure sur les dangers d’un monopole du tabac. Cinq-Mars demande un boycottage du Brown Shag, faisant valoir que dans une situation de monopole, les consommateurs auraient moins de choix de variétés de tabacs. Il va même plus loin en soutenant que l’industrie locale pourrait être menacée, évoquant le spectre des fermetures d’usines et des pertes d’emplois. Rock City et B. Houde ont ensuite financé l’impression de cette brochure, distribuée lors de réunions de travail et devant les églises[48]. Un représentant de l’ATCC est allé jusqu’à prétendre que dans un certain nombre d’endroits, ses représentants de commerce étaient contraints de quitter les lieux de distribution quand ils essayaient de vendre le tabac Brown Shag, arguant même que « c’était une véritable guerre[49] ». Même si l’ATCC n’a pas gagné cette guerre immédiatement, la victoire était à portée de main. Les dates diffèrent selon les sources consultées, mais à un certain moment, entre 1905 et 1908 (lorsque l’ATCC a changé son nom pour Imperial Tobacco), elle a effectivement pris le contrôle de B. Houde. Imperial a cependant conservé le nom de B. Houde pour commercialiser ses marques de tabac canadien[50], car la capacité de revendiquer le statut de « fabricant local » était primordiale. En effet, durant les années 1920 et 1930, beaucoup de ses concurrents au Québec, y compris L.O. Grothé (fabricant de cigares, de cigarettes, de tabac à chiquer et à pipe de Virginie) et Rock City Tobacco, se présentaient et faisaient la promotion de leurs produits dans le cadre de campagnes d’Achat chez nous. Pour Imperial, avoir un nom canadien‑français avec une longue histoire dans l’industrie du tabac s’avérait donc certainement utile pour faire face à la concurrence[51].

Les marques de tabac canadiens

Les fabricants de tabac qui ont cherché à conquérir le marché du tabac canadien ont dû convaincre les fumeurs de produits non manufacturés que ces nouveaux produits étaient « authentiquement » canadiens. On pouvait difficilement cacher le fait que ce tabac était fabriqué de manière industrielle, surtout à cause de son empaquetage. En effet, ces nouveaux produits étaient vendus dans des emballages cartonnés ou dans des boîtes métalliques, alors que le tabac canadien traditionnel était habituellement offert en vrac. L’emballage, un élément clé de la transformation du marketing de masse vers la fin du XIXe siècle, a été utilisé par les fabricants pour apaiser les craintes de maladies transmises par les produits de consommation et a permis aux commerçants de les exposer de manière plus attrayante. L’emballage facilitait également l’entreposage du produit et, finalement, braquait le projecteur sur le manufacturier, dont la réputation était en jeu quant à sa qualité, plutôt que sur le détaillant[52]. Contrairement au tabac de l’ère préindustrielle qui pouvait être visuellement inspecté par les fumeurs potentiels, le tabac canadien manufacturé était protégé par un emballage scellé. Les fumeurs devaient donc se fier au bouche-à-oreille et à la bonne réputation de la marque pour faire leur choix. Les fabricants de tabac canadien ont donc essayé de convaincre les fumeurs que leurs paquets contenaient de l’authentique tabac canadien‑français par des campagnes publicitaires massives dans les plus grands quotidiens francophones : La Presse et La Patrie à Montréal, et Le Soleil à Québec[53]. Au même moment, notons que d’autres marques de tabac à pipe de Virginie, de cigares et de cigarettes faisaient également l’objet de publicités dans les mêmes journaux, mais aussi dans Le Devoir et L’Action nationale, deux quotidiens nationalistes qui ne s’encombraient manifestement pas de politiques nationalistes en matière de publicité[54].

Dans ces campagnes publicitaires, les manufacturiers proclamaient, de différentes façons, que leurs fournisseurs de tabac étaient « authentiquement » canadiens-français. Certaines compagnies soutenaient cette affirmation en soulignant leurs liens étroits avec l’agriculture locale. Par exemple, en 1905, l’une des premières publicités de la compagnie Rock City prétendait que son tabac Rose Quesnel provenait d’un seul agriculteur dont l’énorme récolte annuelle se serait élevée à 300.000 livres — la seule ampleur de la récolte étant présentée comme un signe certain de réussite[55]. À une époque où les liens entre consommateurs et producteurs étaient de plus en plus ténus en raison des nombreux intermédiaires, cette stratégie publicitaire cherchait à rassurer les fumeurs sur la constance de la qualité du tabac. La campagne rappelait un passé récent, quand les fumeurs de tabac canadien s’approvisionnaient directement auprès des agriculteurs qui avaient des surplus de tabac, écartant ainsi les risques qu’il soit dénaturé par le mélange avec celui d’un autre agriculteur.

À bien des égards, cette référence passéiste à la relation entre le consommateur et le producteur était toutefois atypique. La plupart des publicités de tabac canadien industriel affirmaient au contraire que leur produit était grandement amélioré par rapport à celui de la période préindustrielle. Selon Luc Côté et Jean‑Guy Daigle, les discours sur les progrès scientifiques étaient d’ailleurs fréquents dans les publicités au Québec durant une grande partie de cette période[56]. Selon ces publicités, le nouveau tabac canadien industriel avait été standardisé et scientifiquement amélioré en isolant différentes souches de tabac, fournissant ainsi un plus grand choix de goûts aux fumeurs. Le fait que différentes variétés pouvaient enfin être identifiées et isolées (contrairement aux pratiques de culture antérieures où des variétés différentes de tabac poussaient l’une à côté de l’autre, rendant la pollinisation inévitable), permettait d’affirmer que le nouveau tabac canadien était complètement différent de celui cultivé de manière artisanale. Ainsi, la publicité pour le tabac Alouette de la compagnie B. Houde (appartenant à Imperial) était accompagnée de l’explication suivante : « Ce fameux tabac naturel est le produit de trois siècles de culture et de sélection »; « [Il a été] trié, mûri et mélangé par les soins de spécialistes[57] ». Les frères Forest annonçaient aux détaillants que leur tabac était : « cultivé, scientifiquement affiné, puis mélangé avec soin sous la supervision des Frères Forest qui ont spécialement étudié le tabac canadien », tandis que Rock City annonçait son tabac Rose Quesnel comme étant « produit et scientifiquement traité en des ateliers propres et bien aménagés[58] ».

Bien que toutes ces compagnies affirmaient avoir amélioré le tabac canadien d’origine, toutes ont aussi insisté sur le côté « canadien-français » de leurs produits. Les prétentions des frères Forest voulant que leurs marques étaient authentiques reposaient sur une logique différente de celle des deux autres compagnies en raison de ses racines rurales. Les Forest avaient développé leur compagnie en faisant la promotion de leurs liens avec les terres traditionnellement attribuées à la culture du tabac au Québec et en insistant sur le fait que, même lorsque la compagnie s’était alliée à de nouveaux partenaires à partir de 1916 et jusqu’à sa fusion avec Carreras, elle n’avait jamais rien vendu d’autre que du tabac canadien. Ce lien avec l’agriculture canadienne‑française (quoiqu’« améliorée » et « rationalisée ») était souligné par les noms de marques adoptés par les frères Forest qui mettaient l’accent sur la force ou encore le type de tabac.

Les publicités de Forest Frères cherchaient à montrer la diversité de l’expérience canadienne-française à travers de nombreuses représentations d’environnements modernes et industriels. Les annonceurs ont compris que leurs clients savaient ce qu’était le « tabac canadien » et qu’ils le relieraient directement avec leur ancien mode de vie aussi bien qu’avec les transformations de leurs conditions de vie et de leurs traditions. Certaines de ces publicités représentaient des agriculteurs, comme dans une annonce pour le tabac « Fort » où on pouvait voir le croquis d’un homme âgé avec une pipe en maïs (une référence au fermier) et le slogan suivant : « Le préféré des vieux fumeurs » (Figure 2)[59]. Toutefois, les agriculteurs (ou les agriculteurs retraités) ne représentaient qu’une portion du marché. Au début des années 1930, la classe ouvrière urbaine était également visée par une publicité mettant en vedette un groupe de travailleurs discutant des mérites du tabac Forest Frères et notant qu’il n’irritait pas la gorge comme les autres tabacs (figure 3)[60]. Pour atteindre un marché que la compagnie avait rapidement identifié comme urbain et nettement segmenté, Forest Frères a eu recours à d’autres types d’images, plus urbaines. Pour la plupart, les publicités de Forest Frères présentaient des illustrations hautement genrées représentant des hommes de la classe moyenne. Par exemple, la publicité de son tabac Parfum d’Italie suggérait qu’il était populaire auprès des professionnels citadins qui fumaient au bureau et à la maison. L’image d’un environnement domestique dans la publicité était utilisée pour suggérer que ce tabac avait un arôme si délicat que la maîtresse de maison ne pouvait s’opposer à ce que son mari fume à l’intérieur. D’ailleurs, le fait que les hommes fumaient à la maison, indice d’une masculinisation de l’espace domestique, a fait l’objet de fréquents débats avant qu’il devienne acceptable que les femmes puissent fumer[61]. Une autre série de publicités, toujours axée sur les hommes de la classe moyenne, les montre dans diverses situations. Dans l’une d’entre elles, un homme est sur le point de rater son tramway parce qu’il a laissé son tabac à la maison ou au travail et dans une autre, on le voit faire cirer ses chaussures et être complimenté sur l’arôme délicat de son tabac[62].

 

Figure 2 : Le Soleil, 12 avril 1924, p. 27
Figure 3 : Une publicité de Forest Frères mettant en vedette un groupe de travailleurs discutant des mérites du tabac Forest Frères et notant qu’il n’irritait pas la gorge comme les autres tabacs. Le Soleil, 20 avril 1931, p. 16.

L’arôme faisait partie d’un langage du goût qui montrait le tempérament et la respectabilité du fumeur. Comme mentionné précédemment, les connaisseurs soutenaient qu’il y avait une hiérarchie des tabacs et que la qualité du tabac fumé était directement liée à la personnalité (à la masculinité) du fumeur. Les publicités de Forest Frères mettaient en exergue une vision moins hiérarchique du connaisseur, en faisant valoir qu’il existait un tabac pour chaque type d’homme et que « les goûts ne se discutent pas ». Forest Frères indiquait ainsi clairement que le mépris d’autrui fondé sur le choix de son tabac ne méritait même pas d’être discuté. Cela dit, encore de nos jours, la représentation de la personnalité selon le tabac fumé demeure présente dans la publicité du tabac[63].

En effet, le choix du tabac était souvent perçu comme une question de force masculine. Le tabac Faible de Forest Frères était annoncé comme un tabac qui ne nuisait pas à la santé, car la publicité prétendait que : « même les malades peuvent le fumer ». Cette affirmation audacieuse reposait sur la croyance alors répandue qu’il était possible de fumer de manière saine, à condition que la force du tabac corresponde à la force physique du fumeur. Selon ce raisonnement, il aurait existé une barrière naturelle interdisant l’usage du tabac aux jeunes garçons immatures (car on estimait qu’ils tomberaient malades à cause du tabac, trop fort pour eux) alors que l’on suggérait que les femmes ne pouvaient fumer sans mettre leur santé en péril puisqu’elles n’avaient supposément pas la volonté nécessaire pour éviter une dépendance malsaine[64]. D’ailleurs, une autre annonce publicitaire pour le tabac Faible de Forest frères, montre une femme tirant une bouffée de la pipe de son mari. Le mari, un peu choqué, lève les yeux de son journal et dit : « Ah ! Ma petite femme tu fumes!… Heureusement que c’est du tabac faible Forest Frères ! » (Figure 4)[65]. Dans ces deux cas, le tabac est présenté comme étant si léger que même les personnes à la santé fragile ou de faible constitution (les hommes comme les femmes) peuvent fumer à l’envi sans crainte pour leur santé.

 

Figure 4 : Le Soleil, 15 mars 1923, p. 9.

Contrairement aux publicités des marques de Forest Frères, les compagnies B. Houde (appartenant à l’Imperial Tobacco) et, dans une moindre mesure, Rock City, faisaient référence au nationalisme canadien-français pour promouvoir leurs produits. Cette approche publicitaire est particulièrement flagrante dans les années 1920 et 1930, alors que leurs annonces comportaient davantage d’images. Cette période a connu un regain d’intérêt pour l’artisanat local, une manifestation d’une préoccupation plus vaste à l’égard de la disparition progressive des cultures régionales en raison de la concurrence exercée par la production de masse de biens manufacturés[66]. Les publicitaires ont misé sur cet intérêt pour les cultures locales, qu’elles soient authentiques ou non, pour vendre leur tabac. Mais ils ont eu recours à l’histoire et à la culture canadiennes‑françaises, et non à la culture française du XIXe siècle, comme c’était le cas avec l’invention du costume régional traditionnel[67].

Le tabac à chiquer et à fumer Donacona demeure le meilleur exemple d’une marque de Rock City qui s’appuyait fortement sur la culture canadienne-française pour asseoir son authenticité (Figure 5). Cette marque a fait l’objet de publicités dans les années 1920, au moment même où l’artisanat était mis en valeur par le gouvernement du Québec, les chemins de fer du Canadien Pacifique ou encore les Cercles de fermières[68]. Les publicités pour le tabac Donacona mettaient en vedette des illustrations d’un homme autochtone (sans doute Donacona lui-même) discutant chaleureusement avec un Européen (probablement Jacques Cartier). En effet, selon cette publicité, le chef Donacona, comme son tabac éponyme, « se fait des amis partout ». En parfaite contradiction avec la véritable histoire, tragique, du chef autochtone (d’abord retenu en captivité par Jacques Cartier puis victime d’une mort affreuse en France), cette publicité transformait un chapitre brutal des relations entre les Premières Nations et les Européens en une histoire d’Autochtones se liant d’amitié avec les Français. Même en supposant que la plupart des Canadiens français ne connaissaient pas la véritable histoire du chef Donnacona, le fait d’utiliser une icône autochtone pour personnifier le tabac canadien alors que le tabac indigène lui‑même était jugé de qualité inférieure, aurait pu s’avérer une stratégie risquée. Probablement dans un effort pour distinguer le produit du tabac indigène, la publicité soulignait également que le Donacona était fabriqué avec les meilleurs tabacs et mélangé par des experts[69].

 

Figure 5 : Le Soleil, 16 avril 1923, p. 8.

Bien que la publicité du tabac Donacona représentait les Canadiens français dans le rôle de Cartier, (évoquant leur histoire pour s’attirer leur clientèle), cette approche constituait en quelque sorte une incongruité pour Rock City. Alors que plusieurs autres marques de tabac canadien de cette compagnie évoquaient la culture et l’histoire canadiennes-françaises en utilisant des noms comme Cloche Rouge ou Champlain, celles-ci n’étaient pas largement annoncées dans la presse. Pour la plupart, les publicités pour le tabac de Rock City recouraient au même genre de scènes de la vie moderne que celles utilisées dans les annonces de Forest Frères, comme le montre l’exemple de la marque Bon Bourgeois (Figure 6). Bien qu’il soit possible que ce nom fasse référence au patron des coureurs des bois engagés dans le commerce des fourrures, l’image utilisée dans la publicité est celle d’un agriculteur moderne, bien établi, représenté sur le paquet à la fois aux champs et dans ses habits du dimanche[70]. Les caractéristiques modernes de la publicité pour le tabac canadien sont également présentes dans les réclames pour la marque vedette de tabac canadien-français de Rock City, Rose Quesnel. Le nom Quesnel suffit à l’identifier en tant que tabac canadien-français tandis que les vignettes au coin de chaque publicité dépeignent une société moderne[71]. L’exemple, datant de 1936 (Figure 7), est particulièrement représentatif, car il montre des gens qui écoutent la radio. En outre, les hommes fument en présence des femmes, pratique pourtant considérée comme un manque certain de savoir-vivre, au moins jusqu’après la Première Guerre mondiale.

 

Figure 6 : Le Soleil, 2 mai 1923, p. 2.
Figure 7 : Le Soleil, 7 mars 1936.

Imperial Tobacco a été encore plus loin dans l’évocation de « l’authenticité » canadienne‑française en utilisant l’histoire et la culture pour faire la promotion des marques Alouette, Montcalm, Richelieu et Patriote de la compagnie B. Houde. Non seulement Imperial faisait référence aux symboles nationaux canadiens-français dans sa publicité, mais elle utilisait aussi des icônes de nouveaux héros canadiens-français. Ainsi, la publicité pour le tabac Hercule de B. Houde présentait des illustrations d’hommes forts du XIXe siècle, tels que Louis Cyr (figure 8)[72]. Cependant, la majeure partie des publicités de B. Houde faisait référence à un lointain passé. Du milieu des années 1920 jusqu’au milieu des années 1930, la publicité pour la marque de tabac Alouette évoquait fréquemment le lien qui unissait le tabac canadien à la Nouvelle-France. L’origine du nom de cette marque était sans aucun doute inspirée par la chanson populaire du même nom. Une des publicités encourageait d’ailleurs les fumeurs à fredonner cette chanson, mais avec une légère variation dans les paroles : « Alouette, gentille Alouette ! Alouette, je te fumerai ! »[73]. La publicité de la marque rappelait aux Canadiens français que le tabac avait toujours eu une place dans leur histoire. Ainsi même quand leurs ancêtres portaient des perruques et des chemises à jabots, « les hommes courageux de la Nouvelle-France fumaient déjà le bon tabac de Québec[74] ». Une autre publicité affirmait que : « Quand Jacques-Cartier vint au Canada aux lointains de 1535, il trouva des plantations de tabac[75]… ». Toutes ces publicités dépeignaient les colons canadiens-français en utilisant le pluriel rassembleur « nos », la compagnie de tabac devenant ainsi partie prenante de l’identité collective canadienne-française. Plus précisément, la presque totalité des publicités Alouette ciblait des fumeurs canadiens-français qui habitaient en ville. Plusieurs publicités faisaient spécifiquement allusion à l’histoire du Québec urbain : « Quand Trois-Rivières n’était qu’un avant-poste », « Quand Montréal n’était qu’une forêt », « Quand Sherbrooke n’était qu’une bourgade », « Quand Hull n’était qu’un camp de trafiquants », « … nos vaillants ancêtres » appréciaient déjà cet excellent tabac québécois[76].

 

Figure 8 : La Presse, 27 octobre 1925, p. 20.

Pour prouver l’authenticité de son tabac canadien, la publicité de B. Houde, contrairement à celle de Forest Frères, remémorait un passé lointain. D’une façon similaire à celles de Rock City, les réclames de B. Houde mentionnaient même à l’occasion les origines autochtones du tabac. Par exemple, une publicité pour le tabac Alouette jouait sur la corde romanesque, affirmant que deux cents ans plus tôt, « nos ancêtres troquaient de la marchandise avec l’Indien pour du tabac[77] ». Comme celles conçues pour les marques de Rock City, les publicités pour le tabac Alouette précisaient que ce tabac était bien sûr « infiniment supérieur à tous les tabacs connus de nos aïeux[78] ». Cependant, dans la plupart des publicités de B. Houde, le tabac était qualifié de canadien-français et les Autochtones apparaissaient seulement comme des personnages secondaires. Un exemple de cette stratégie se retrouve dans une publicité de tabac au goût puissant, le Voyageur de B. Houde. Généralement, la publicité présentait des images évoquant la vie de coureurs des bois à la masculinité très marquée : « Il y a du roman dans le mot même » et « quelles visions d’hommes robustes et virils » sont les slogans qui accompagnaient ces images[79]. Cette série de publicités comprenait aussi des illustrations d’Autochtones et de « voyageurs » rassemblés « autour du feu de camp pour fumer le calumet de la paix » (Figure 9)[80]. Le jeu de mots dans cette annonce assimile le « voyageur » représenté dans l’annonce au nom de la marque du tabac. Le voyageur, profondément canadien‑français comme le tabac, est d’agréable compagnie pour tous ceux qui aiment le goût de « notre odorant tabac naturel », et il en revendique par ailleurs sans vergogne la propriété[81].

 

Figure 9 : La Presse, 30 juillet 1930, p. 19.
Le déclin d’une tradition déjà érodée

Alors que de nombreuses marques de tabac canadien étaient encore disponibles sur le marché dans les années 1950, les compagnies ont cessé d’en faire la publicité dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Il existe de nombreuses explications possibles pour ce changement dans leurs stratégies de marketing. On note par exemple qu’à la fin des années 1930, toutes les entreprises qui vendaient du tabac canadien étaient partenaires ou appartenaient à des multinationales. Ces dernières pourraient avoir montré moins d’enthousiasme pour la promotion d’un goût « national », bien que cela n’a certainement pas été le cas pour l’Imperial jusqu’aux années 1930.

Trois facteurs permettent d’expliquer ces changements d’une manière plus satisfaisante. Tout d’abord, de moins en moins de gens fumaient du tabac canadien non manufacturé, dont le goût particulier faisait la renommée de ces marques[82]. Puisque le goût pour le tabac canadien industriel était le plus souvent acquis à travers l’habitude de consommer le produit artisanal, une diminution de la consommation de celui-ci aurait irrémédiablement nui à la popularité des marques commerciales. Cette diminution n’était pas le fruit du hasard, mais plutôt le résultat de longues années de campagne de l’industrie du tabac, renforcées par des efforts du gouvernement fédéral pour financer la Deuxième Guerre mondiale. La campagne de l’industrie pour mettre fin à la consommation de tabac canadien a commencé dès la fin de l’année 1933, lorsqu’Imperial a essayé de faire croire que les producteurs de tabac du Québec étaient en faveur d’une taxe d’accise sur leur propre tabac. La compagnie a payé ces agriculteurs 10 cents chacun pour qu’ils signent une pétition en faveur de la taxe, tout en leur promettant qu’elle achèterait leurs récoltes s’ils signaient[83]. Peu de temps après, lors des audiences de la Commission royale sur les écarts de prix, les dirigeants d’Imperial ainsi que d’autres acteurs de l’industrie du tabac ont fait valoir que le tabac canadien non taxé était en concurrence directe et déloyale avec les tabacs manufacturés et que des emplois dans l’industrie du tabac avaient été perdus à cause de cette concurrence. À leur avis, la seule façon de remédier à cette situation était de taxer la culture locale du tabac canadien-français[84]. Le gouvernement fédéral a refusé de céder à ces pressions jusqu’en 1940, quand une taxe a été prélevée pour financer l’effort de guerre. La taxe en question a été rigoureusement appliquée et il devenait beaucoup trop compliqué pour de nombreux débits de tabac de continuer à détailler du tabac canadien. En fin de compte, ce système d’imposition a mis un terme à la capacité des producteurs du Québec de distribuer leur tabac aux détaillants de Montréal et d’autres zones urbaines[85].

Un deuxième facteur ayant contribué à la diminution des ventes de ces marques a été la popularité grandissante de la cigarette au Canada français. Comme dans ses publicités de tabac canadien, durant l’entre-deux-guerres, Imperial a utilisé des clichés et des thèmes nationalistes pour cibler sa clientèle canadienne-française consommatrice de cigarettes. Ainsi, au milieu des années 1920, la compagnie a acheté les droits d’utilisation de la marque de cigarette Millbank, une marque britannique, et a eu recours à des chansons folkloriques canadiennes-françaises pour faire la promotion de son nouveau produit. Qu’une multinationale britanno-américaine ait utilisé de la musique traditionnelle canadienne-française pour faire la promotion d’une marque de cigarettes britanniques – fabriquées à base de tabac de Virginie – est pour le moins ironique. L’exemple le plus frappant de cette campagne montre un homme, seul avec un chien, en train d’écrire une variante de la chanson folklorique canadienne-française, « Un Canadien errant ». Même si cette chanson a été reliée à de nombreux événements historiques tels que la déportation des Acadiens (à partir de 1755) ou encore la migration des Canadiens français vers la Nouvelle-Angleterre pour travailler dans les usines de textile, les paroles originales de cette chanson ont été écrites par Antoine Gérin-Lajoie peu après la déportation des patriotes impliqués dans les rébellions de 1837-1838[86]. Cependant, l’homme de la publicité Millbank, ne se lamente pas sur le triste sort de la nation canadienne-française ou ne se languit pas de sa famille et de ses amis, comme dans la chanson originale. Au lieu de cela, il désire ardemment une cigarette Millbank! (Figure 10)[87]. Dans une campagne publicitaire ultérieure, Imperial annonçait ses cigarettes Turret en reliant la popularité de la chanson folklorique canadienne-française « En roulant ma boule » avec celle de ces cigarettes. Qui plus est, Imperial promettait d’envoyer un enregistrement gratuit des chansons folkloriques canadiennes-françaises à toute personne qui lui ferait parvenir son nom, son adresse et l’affranchissement nécessaire. Ce faisant, la compagnie se positionnait comme grand chef et promoteur de la culture canadienne-française, propulsant la cigarette au rang d’icône patriotique[88].

 

Le Soleil, 21 avril 1924, p. 3.

Bien que l’on ignore si cette campagne publicitaire est parvenue à convaincre les Canadiens français de se mettre à fumer la cigarette, il reste qu’au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, la cigarette gagnait en légitimité au Québec, tandis que la symbolique nationaliste du tabac canadien s’amenuisait. Il s’agit du troisième facteur responsable du déclin de ces marques. À mesure que le Québec devenait de plus en plus urbain, la vision rurale de la société canadienne-française entretenue par des nationalistes conservateurs ne correspondait plus aux réalités des francophones comme auparavant. L’affaiblissement de la fonction symbolique du tabac canadien est particulièrement frappant dans les romans réalistes sociaux du Québec. Dans ces romans principalement urbains, ou bien le tabac canadien disparaît ou il est considéré comme un plaisir de vieillard. Seuls les hommes âgés chiquent du tabac canadien dans le roman de Roger Lemelin se déroulant à Québec, Au pied de la pente douce (1944), alors que dans Les Plouffe (1948), les vieillards fument la pipe tandis que les jeunes hommes fument la cigarette. Dans la petite ville québécoise du roman d’André Langevin Poussière sur la ville (1953) et dans celui de Gabrielle Roy Alexandre Chenevert (1954), basé à Montréal, la cigarette est omniprésente et personne ne fume de tabac canadien. Lorsque la très populaire version télévisée du roman Les Plouffe (1953) a été sur les ondes, Imperial en a été le principal commanditaire et Roger Lemelin a fait en sorte que les marques de cigarettes de la compagnie soient toujours bien visibles à l’écran[89].

La disparition du tabac canadien a fait partie d’une plus vaste transformation culturelle au Québec. Les francophones étaient de plus en plus citadins et de nouveaux symboles identitaires modernes émergeaient. Cette identité allait résonner dans le joual des Bellesœurs de Michel Tremblay, la musique de Beau Dommage, et l’utilisation d’un nouveau nom pour le peuple d’un pays en devenir : les Québécois[90].

Conclusion

L’invention et le déclin des marques de tabac canadien produits et emballés industriellement ouvrent une fenêtre unique sur la négociation de la transition vers la modernité au Québec. En effet, les fabricants de tabac canadiens-français ont su faire le lien entre le tabagisme et l’identité, dans une société transformée par l’urbanisation et l’industrialisation. Cela signifiait présenter des images de respectabilité qui s’appuyaient sur les idées dominantes au sujet du genre, de la classe sociale et de la race. Comme ailleurs dans le monde occidental à la fin du XIXe siècle, le tabagisme était devenu un rituel respectable pour les hommes seulement. Pour la plus grande part, les publicités pour ces marques montraient des fumeurs, réifiant du même coup cette prescription. Elles dépeignaient une variété d’idéaux masculins par exemple les représentations de personnages particulièrement musclés des marques de B. Houde Hercule ou Voyageur, et celles, différenciées selon la classe, des connaisseurs de tabac dans les publicités de Forest Frères. Dans le cas de la notion de connaisseur, d’expert, Forest Frères répondait à une conviction répandue que la qualité du tabac dépendait de manière significative de la « race » de l’agriculteur. Cette idée a provoqué la perte de prestige du tabac canadien puisque les Canadiens français avaient été classés parmi les soi-disant groupes de barbares, incapables de faire pousser un tabac de bonne qualité. Pourtant, avec une logique raciste similaire, la plupart de ces publicités se sont volontairement distanciées des tabacs indigènes. En soulignant que ces nouveaux tabacs étaient scientifiquement améliorés par rapport au tabac canadien-français ou autochtone traditionnel, il devenait plus difficile de proclamer qu’ils étaient authentiquement canadiens. Plus le fabricant s’éloignait des traditions rurales entourant la production de ce tabac, plus il évoquait un folklore nationaliste revendiquant son authenticité.

Bien que ces marques ont été créées à la suite d’une protection tarifaire imposée par le gouvernement canadien qui a rendu leur production rentable, elles ont également fait partie d’un mouvement pour transformer une tradition culturelle préindustrielle en un rituel davantage structuré par une économie de marché capitaliste. Pendant cette période, les multinationales du tabac ont tenté d’imposer ce genre de changement partout dans le monde, avec divers degrés de succès[91]. Le cas du tabac canadien démontre à la fois la ténacité des Canadiens français qui pendant longtemps ont refusé d’abandonner leurs traditions et la persévérance des entreprises qui étaient prêtes à aller très loin pour s’assurer qu’ils achèteraient leurs produits. En fait, l’industrie du tabac était prête à inventer de nouvelles marques qui tiendraient compte des goûts locaux. Le nationalisme canadien-français pouvait donc être rentable. Au moment même où elle commercialisait ces marques à l’aide des symboles nationaux, l’Imperial faisait également pression sur le gouvernement canadien pour en finir avec la tradition locale. En fin de compte, cependant, les activités du gouvernement et des entreprises ne peuvent entièrement expliquer la disparition de ces marques. Leur symbolisme, après tout, émanait d’une vie rurale préindustrielle, tandis que le Québec, de plus en plus industriel et urbain, montrait de moins en moins d’intérêt pour le symbolisme du tabac canadien. En effet, si la culture a joué un rôle dans la montée de ces marques, elle a également joué un rôle dans leur disparition.


  1. Traduction de « Manufacturing French-Canadian Tradition: tabac canadien and the Construction of French-Canadian Identity, 1880-1950 », Histoire Sociale/Social History, vol. 39, no 77, mai 2002, p. 205-234. L’auteur remercie Anna Shea pour son assistance à la recherche et Cynthia Kelly pour l’éditique. Les recherches pour cet article ont été réalisées grâce à une bourse postdoctorale accordée par le Fonds québécois de recherche sur la société et la culture (FQRSC) et à des subventions versées par le FQRSC ainsi que le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada (CRSH) au Groupe d’histoire de Montréal.
  2. Malgré l’absence de données permettant d’évaluer la consommation de tabac au Québec, des statistiques sur les taxes sur le tabac laissent penser que l’utilisation de la pipe a prédominé au Canada jusqu’à la fin des années 1920. Jan Rogozinski, Smokeless Tobacco in the Western World, 1550–1950, New York, Praeger, 1990, p. 129–130.
  3. Le but n’est pas de savoir si le Québec, durant la période étudiée, doit être qualifié d’industriel ou d’entrer dans les débats des dernières années qui ont tenté de catégoriser le Québec du XIXe siècle de « féodal » ou de « rural », de « pré » ou de « proto » industriel ou simplement d’industriel. Je juge plutôt nécessaire de mettre l’accent sur la transition, en particulier lorsqu’il s’agit d’examiner les traditions culturelles.
  4. Le recensement de 1921 révèle que la majorité des Québécois francophones vivaient dans un centre urbain, même si ce n’est qu’après la Seconde Guerre mondiale que la majorité d’entre eux ont habité dans une ville comptant une population importante.
  5. Benedict Anderson, Imagined Communities: Reflections on the Origin and Spread of Nationalism, London, Verso, 1982.
  6. Sur les politiques symboliques, voir John Kasson, Rudeness and Civility: Manners in Nineteenth-Century Urban America, New York, Hill and Wang, 1990; Mary P. Ryan, « The American Parade: Representations of the Nineteenth-Century Social Order » dans The New Cultural History sous la direction de Lynn Hunt, Berkeley, University of California Press, 1989, p. 131–153, Women in Public: Between Banners and Ballots, 1825‑1880, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 1990, et Civic Wars: Democracy and Public Life in the American City during the Nineteenth Century, Berkeley, University of California Press, 1997; David Scobey, « Anatomy of the Promenade: The Politics of Bourgeois Sociability in Nineteenth-century New York », Social History, mai 1992, p. 203–227.
  7. Les historiens et les anthropologues de la culture ont problématisé les déclarations « d’authenticité ». Voir T. J. Jackson Lears, No Place of Grace: Anti-modernism and the Transformation of American Culture, 1880–1920, New York, Pantheon Books, 1981; Ian McKay, The Quest of the Folk: Antimodernism and Cultural Selection in Twentieth-Century Nova Scotia, Montreal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 1994; Erik Cohen, « Authenticity and Commoditization in Tourism », Annals of Tourism Research, vol. 15, 1988, p. 371–386.
  8. Cette partie résume de façon partielle les trois premiers chapitres de mon ouvrage, The Freedom to Smoke: Tobacco Consumption and the Construction of Identity, Montréal et Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2005.
  9. F. Charlan, « Tobacco Culture in Canada », Canadian Cigar and Tobacco Journal, mai 1910, p. 31; Louis Lewis, « The World’s Tobacco Crops: A Description of the Types of Leaf Grown all over the World », Canadian Cigar and Tobacco Journal, octobre 1898, p. 359.
  10. A. D. Porcheron, « Traitement et culture du tabac canadien », Montréal, Cie d’Impr. Canadien, 1882 [Institut canadien de microreproductions historiques (ICMH) no. 12126].
  11. Au sujet de la loi qui exemptait d’impôt le tabac cultivé à des fins domestiques, voir 43 Victoria, Chapitre 19, (1880) et 60–61 Victoria, Chapitre 19 (1897).
  12. Voir son témoignage à la Commission royale d’enquête sur les écarts de prix, p. 1694–1696. Volume consulté à l’Imperial Tobacco Reading Room, Montréal; ce qui suit réfère à « Evidence, Price Spreads ».
  13. T. G. Major, « Trends in the Canadian Market », The Lighter/ Le briquet, 18 mars 1933.
  14. Les femmes qui transgressaient les normes de la respectabilité pouvaient le payer cher, surtout si elles cherchaient un emploi ou si elles comparaissaient devant un tribunal. Voir Karen Dubinsky, Improper Advances: Rape and Heteroexual Conflict in Ontario, 1880–1929, Chicago, University of Chicago Press, 1993; Reinhold Kramer et Tom Mitchell, Walk Towards the Gallows: The Tragedy of Hilda Blake, Hanged 1899, Don Mills, ON, Oxford University Press, 2002; Joan Sangster, « Softball Solution: Female Workers, Male Managers and the Operation of Paternalism at Westclox, 1923–1960 », Labour/ Le Travail, vol. 32, automne 1993, p. 167–199.
  15. Pour un exemple de ces propos voir Dr. L. J. Lemieux dans « Evidence, Price Spreads », p. 82.
  16. Il s’agit de l’argument principal de mon ouvrage, The Freedom to Smoke.
  17. Voir par exemple, Octave Cuisset, « Le père Coulange : ou, Entretiens sur la culture et la préparation du Tabac », Québec, Imprimerie A. Coté et Cie., 1876 [ICMH no. 04193]; « Les Veillées », La Presse, 28 janvier 1905, p. 1.
  18. Matthew Hilton, Smoking in British Popular Culture, 1800–2000, Manchester, University of Manchester Press, 2000. Pour les pratiques genrées liées au tabagisme dans les Maritimes canadiennes voir Separate Spheres: Women’s Worlds in the 19th-century Maritimes sous la direction de Suzanne Morton et Janet Guildford, Fredericton, Acadiensis Press, 1994, page couverture et p. 7.
  19. Dans une comparaison analogue, Eric Hobsbawm souligne que « the wigs of lawyers could hardly acquire their modern significance until other people stopped wearing wigs ». Voir son « Introduction: Inventing Traditions » dans The Invention of Tradition sous la direction de Hobsbawm et Terrance Ranger, Cambridge, Cambridge University Press, 1986, p. 4.
  20. Pour des exemples de rassemblements voir « Nouvelles Ouvrières », La Presse, 13 et 15 janvier 1913, p. 7; 27 décembre 1921, p. 3; 18 mars 1922, p. 35.
  21. Léon Ledieu, « Entre Nous », Le Monde illustré, 4 avril 1891, p. 766.
  22. « Le Tabac du Prolétaire », Le Devoir, 2 mars 1915, p. 8.
  23. Ernest Bilodeau, « Cinquante années de souvenirs », Louis Robillard, « Monsieur Bourassa, solennel et familier », et Lionel Groulx, « Henri Bourassa ou le causeur prestigieux », dans Hommage à Henri Bourassa (reproduit à partir d’une édition commémorative de Le Devoir), 25 octobre 1952, p. 158, 142 et 91, respectivement.
  24. Bilodeau, « Cinquante années de souvenirs », dans Hommage à Henri Bourassa, p. 158.
  25. Sur la création du concept de la consommatrice « femme de paille » voir Jill Greenfield, Sean O’Donnell, et Chris Reid, « Gender, Consumer Culture and the Middle-Class Male, 1918–1939 », et Christopher P. Hosgood, « Mrs. Pooter’s Purchase: Lower-Middle-Class Consumerism and the Sales, 1870–1914 », tous deux dans Civic Culture and Consumerism: Middle-Class Identity in Britain, 1800–1940 sous la direction de Alan Kidd et David Nichols, Manchester, Manchester University Press, 1999, p. 183–197 et 146–163 respectivement. Pour un exemple canadien, voir Cynthia Wright, « ‘Feminine Trifles of Vast Importance’: Writing Gender into the History of Consumption », dans Gender Conflicts: New Essays in Women’s History sous la direction de Franca Iacovetta et Mariana Valverde, Toronto, University of Toronto Press, 1992, p. 229–260.
  26. Les études sur la masculinité sont nombreuses. Cet article contribue aux discussions sur la masculinité et la consommation, qui ont largement mis l’accent sur les connaisseurs. Voir Leora Auslander, « The Gendering of Consumer Practices », dans The Sex of Things: Gender and Consumption in Historical Perspective sous la direction de Victoria de Grazia, Berkeley, University of California Press, 1996; Frank Mort, Cultures of Consumption: Masculinities and Social Space in Late Twentieth Century Britain, London, Routledge, 1996; Hilton, Smoking in British Popular Culture, p. 17–59.
  27. L’étude classique de cette dégradation de l’agriculture précapitaliste est celle de Raymond Williams, The Country and the City, London, Chatto and Windus, 1973.
  28. Charlan, « Tobacco Culture in Canada », p. 31–33. E. A. Heaman a montré que les vaches des habitants étaient critiquées pour des raisons semblables; voir The Inglorious Arts of Peace: Exhibitions in Canadian Society during the Nineteenth Century, Toronto, University of Toronto Press, 1999, p. 40.
  29. Porcheron, « Traitement et culture du tabac canadien », section I; Louis V. Labelle, « Traité de la culture et de l’Industrie du tabac » [ICMH no. 08362], Saint-Jacques, 11 avril 1898, p. 106.
  30. Le vin était évalué de la même façon. L’historienne Kolleen M. Guy avance que le concept du terroir était central au XIXe siècle dans la façon d’envisager le territoire français et était également important pour évaluer la valeur du champagne. Voir son étude intitulée « Rituals of Pleasure in the Land of Treasures: Wine Consumption and the Making of French Identity in the Late Nineteenth Century », dans Food Nations : Selling Taste in Consumer Societies sous la direction de Warren Belasco et Philip Scranton, New York, Routledge, 2002, p. 34-47 qui s’appuie sur les travaux du XIXe siècle du géographe français Vidal de La Blanche. À propos de ce dernier, consulter Jean-Yves Guiomar, « Le tableau géographique de Vidal de la Blanche », dans Les lieux de mémoire : livre 1, LA République, sous la direction de Pierre Nora, Paris, Seuil, 1986, p. 569-597.
  31. Lewis, « The World’s Tobacco Crops », p. 359; Labelle, « Traité de la culture », p. 13; Encyclopaedia Britannica, p.1039. Cette théorie raciste comporte des difficultés pour ceux qui tentent d’expliquer pourquoi Cuba produit le meilleur tabac au monde. L’Encyclopaedia Britannica contourne le problème en affirmant que le tabac cubain a été cultivé par les Blancs même pendant la période de l’esclavage. Voir « Cuba », Encyclopaedia Britannica, p. 599.
  32. Labelle, « Traité de la culture », p. 13.
  33. « The Tobacco Kings of Canada before the Tobacco Inquiry », Canadian Cigar and Tobacco Journal, décembre 1902, p. 719. Pour Macdonald, voir Stanley Brice Frost et Robert H. Michel, « Sir William Christopher Macdonald », dans Ramsay Cook et Jean Hamelin, Dictionnaire biographique du Canada, Québec, Presses de l’Université Laval, consulté 12 mai 2013 au http://www.biographi.ca/009004-119.01-f.php?id_nbr=7550
  34. Lettre de John F. Todd à Rosanna Todd, 20 juin 1895 dans John L. Todd Letters, 1876–1949, p. 62; voir aussi la lettre de John F. Todd à Rosanna Todd, 6 février 1895, p. 55.
  35. L’Album Universel, 20 octobre 1906, p. 845. Pour d’autres exemples, voir Benjamin Sulte, « Le Tabac », Le Manitoba, 15 mai 1895, p. 1.
  36. La révision particulière apportée à l’Acte du revenu de l’intérieur pour modifier ces taxes d’accise a consisté en un amendement à Victoria 60–61, chapitre 19, nº 13 (m) et (n). Cet amendement imposait une taxe d’accise de 14 cents par livre de tabac étranger équeuté et de 10 cents par livre de tabac non équeuté.
  37. Sur les plaintes de Macdonald voir : « The Tobacco Kings of Canada before the Tobacco Inquiry », Canadian Cigar and Tobacco Journal, décembre 1902, p. 719–721.
  38. Cette affirmation est fondée sur une comparaison des « prix courants » répertoriés dans le Canadian Cigar and Tobacco Journal des mois de janvier 1904, 1924, 1934, et 1944. L’année 1924 offre la comparaison la plus fructueuse des « marques nationales » et d’autres marques de tabac à fumer coupé, car les prix sont listés « par livre » plutôt que selon la taille, très variable, des emballages disponibles. Un exemple représentatif est celui de la marque populaire « Cut Brier » de Macdonald fabriqué avec du tabac de Virginie qui se vendait 1,28 $ la livre, alors qu’une livre de la marque la plus populaire de B. Houde, « Alouette », se vendait 0,76 $. Les principales marques de Forest Frères se vendaient entre 0,78 $ et 1,38 $ la livre pour la marque aromatique particulière de la compagnie. Quant à la marque la plus populaire de Rock City, « Rose Quesnel », elle se vendait 1,04 $ la livre.
  39. Pour un examen plus détaillé de cette approche, voir le chapitre 5 de Rudy, The Freedom to Smoke.
  40. D’autres s’ajoutent à ce nombre comme la Saint-Jacques Tobacco Packing Co. Limited et sa marque « Hero », mais aussi la Lemesurier Tobacco Co. de la ville de Québec et sa marque « Pioneer ». Voir Le Soleil, 8 mars 1917, p. 7; 3 mars 1926, p. 11 et 4 mars 1921, p. 3.
  41. « Forest Frères Limitée », Canadian Cigar and Tobacco Journal, février 1925, p. 2; « Benson and Hedges Sell Forest Products », Canadian Cigar and Tobacco Journal, février 1936, p. 22; « Current Trade Prices », Canadian Cigar and Tobacco Journal, janvier 1950, p. 33.
  42. Il faut mentionner que la famille Drouin a longtemps été impliquée dans les affaires politiques de la ville de Québec; Napoléon, le fils aîné a été élu au conseil de la ville en 1896, puis comme maire en 1910. Au sujet de Rock City et de la famille Drouin, voir Nathalie Bouchard et Réjean Lemoine, L'usine de Rothmans, Benson & Hedges : depuis cent ans au coeur de Québec : 1899-1999, Québec, L. G. Chabot Inc., 1999; « Current Trade Prices », Canadian Cigar and Tobacco Journal, janvier 1956, p. 25.
  43. Sur B. Houde, voir Bibliothèque et archives Canada, Commission royale pour s’enquérir du commerce sur le tabac dans le Canada, Procès-Verbaux [ci-après CRCTC], RG 13 boîte 2317, dossier 349/1903, Evidence of Alphonse Dussault, p. 581; Ernest J. Chalmers, The Book of Canada: Illustrating the Great Dominion, Toronto, 1905, p. 203.
  44. Howard Cox, The Global Cigarette: Origins and Evolution of British American Tobacco, 1880–1945, Oxford, Oxford University Press, 2000, p. 101–103; P. G. Porter, « Origins of the American Tobacco Company », Business History Review, printemps 1969, p. 59–76.
  45. Pour la réponse de Houde à une rumeur selon laquelle la compagnie avait été achetée par l’ATCC, voir « La combine du tabac », Le Soleil, 7 avril 1899, p. 6. Pour le compte rendu de Dussault de cet épisode, voir CRCTC, p. 582.
  46. CRCTC, p. 608.
  47. Témoignage d’Alphonse Dussault, CRCTC, p. 584.
  48. Témoignage d’Ernest E. Cinq-Mars, CRCTC, p. 729–732.
  49. Témoignage de Louis Samenhof, CRCTC, p. 719.
  50. Lors de la Commission royale d’enquête sur les écarts de prix, Gray Miller, président d’Imperial Tobacco, a déclaré qu’en 1908 l’ATCC avait acheté 87% des parts de la B. Houde & Cie pour la somme de 435,200$. Pourtant, dans une biographie de la société publiée en 1922 dans le Canadian Cigar and Tobacco Journal affirme que Louis Samenhof, un employé de l’ATCC, était le directeur général de la compagnie depuis 1905. Témoignage de Gray Miller, “Evidence, Price Spreads”, p. 1467; “The B. Houde Company, Limited”, Canadian Cigar and Tobacco Journal, February 1925, p. 17.
  51. Le Soleil, 27 mars 1924, supplément spécial « Chez-Nous », p. 2.
  52. David Monod, Store Wars: Shopkeepers and the Culture of Mass Marketing, 1890–1939, Toronto, University of Toronto Press, 1996, p. 149–194.
  53. J’ai utilisé deux techniques pour dépouiller ces journaux. La Patrie et La Presse ont été dépouillés une semaine par mois (en commençant avec la première semaine de janvier, la deuxième semaine de février et ainsi de suite) entre 1920 et 1960. Tous les mois de février et mars entre 1917 et 1948 ont été dépouillés dans Le Soleil. Les publicités d’avant 1914 ont été étudiées pour les mois de janvier et février des années 1900, 1905, 1910 et 1914. Même si cette étude met l’accent sur la publicité des journaux, les affiches des magasins et les étalages sont aussi importants pour légitimer les nouveaux produits industriels comme ceux des marques mentionnées. Voir Keith Walden, « Speaking Modern: Language, Culture, and Hegemony in Grocery Window Displays, 1887–1920 », Canadian Historical Review, vol. 70, septembre 1989, p. 285–310.
  54. Voir ces journaux, par exemple, en février 1925 et 1935.
  55. Publicité du tabac « Rose Quesnel », Le Soleil, 1er mars 1905, p. 3.
  56. Luc Côté et Jean-Guy Daigle, Publicité de masse et masse publicitaire : le marché québécois des années 1920 aux années 1960, Ottawa, Les presses de l’Université d’Ottawa, 1999, p. 303–330.
  57. Publicités du tabac Alouette, Le Soleil, 24 avril 1924, p. 13; 17 mars 1932, p. 19.
  58. Canadian Cigar and Tobacco Journal, octobre 1923, p. 41; publicité du tabac « Rose Quesnel », Le Soleil, 7 mars, 1936, p. 2.
  59. Publicité de Forest Frères, Le Soleil, 12 avril 1924, p. 27.
  60. Le Soleil, 20 avril 1931, p. 16; pour la même campagne, voir La Presse, 2 mai 1931, p. 23.
  61. Publicité de Forest Frères, Le Soleil, 15 mars 1923, p. 9. Sur le tabagisme et la sexualisation de l’espace, voir Rudy, The Freedom to Smoke, chap. 1.
  62. Le Soleil, 5 mars 1923, p. 9; 24 mars 1923, p. 2; 31 mars 1923, p. 3.
  63. Le Soleil, 15 mars 1923, p. 9.
  64. Rudy, Freedom to Smoke, chap. 1.
  65. Le Soleil, 15 mars 1923, p.9.
  66. Nathalie Hamel, « Coordonner l’artisanat et le tourisme, ou comment mettre en valeur le visage pittoresque du Québec (1915–1960) », Histoire sociale / Social History, vol. 34, nº 67, mai 2001, p. 97–114; McKay, The Quest of the Folk.
  67. Hamel, « Coordonner l’artisanat et le tourisme ».
  68. Ibid.
  69. Le Soleil, 16 avril 1923, p. 8.
  70. Publicités du tabac « Bon Bourgeois », Le Soleil, 4 avril 1923, p. 3; 18 avril 1923, p. 12; 2 mai 1923, p. 2 (Figure 6).
  71. Publicité de Rose Quesnel, Le Soleil, 7 mars 1936 (Figure 7); voir aussi 12 mars 1937, p. 23; 2 avril 1937, p. 11.
  72. Publicités du tabac « Hercule », La Presse, 27 octobre 1925, p. 20 (Figure 8); 3 novembre 1925, p. 14; 5 décembre 1925, p. 25.
  73. Publicité du tabac Alouette, Le Soleil, 24 mars 1932, p. 19.
  74. Ibid.
  75. Le Soleil, 17 mars, 1932, p. 19.
  76. Le Soleil, 29 mars 1934, p. 17; 22 mars 1934, p. 12; 13 avril 1934, p. 10; 25 avril 1934, p. 11.
  77. Publicité pour le tabac Alouette, Le Soleil, 10 avril 1924, p. 11.
  78. Publicité du tabac Alouette, Le Soleil, 10 avril 1924, p. 11.
  79. Publicité pour le tabac « Voyageur », La Presse, 8 octobre, 1930, p. 25.
  80. Publicité pour le tabac Voyageur, La Presse, 30 juillet 1930, p. 19.
  81. Publicité pour le tabac « Voyageur », La Presse, 30 juillet 1930, p. 19.
  82. Pour un examen plus approfondi de ces questions voir Rudy, The Freedom to Smoke, p. 117–120.
  83. Joseph Marion, « Evidence, Price Spreads », p. 1687.
  84. Gray Miller, « Evidence, Price Spreads », p. 1630; LAC, RG 33–18 Vol. 36, dossier « General Correspondence of Tobacco Companies », Subject Rock City, A. E. Picard to H. H. Stevens, 3 mai 1934.
  85. Le tabac cultivé localement a été brièvement taxé et licencié en 1918, mais la taxe d’accise a été retirée en 1923 et le système de licence s’est terminé au même moment. Voir « Growers Must be Licensed Now », Canadian Cigar and Tobacco Journal, septembre 1918, p. 49, 51; Ferland, Debates of the House of Commons, 24 juillet 1942, p. 4640; McGill University, Government Documents, Report of the Minister of Agriculture, 1941–42, «Tobacco Section », p. 71.
  86. Sur la chanson, voir Hélène Plouffe, « Un Canadien errant », Encyclopedia of Music in Canada, Toronto, University of Toronto Press, 1981, p. 155.
  87. Publicité de Millbank, Le Soleil, 21 avril 1924, p. 3. Pour d’autres exemples de cette campagne publicitaire de Millbank, voir Le Soleil, 3 mars 1924, p. 5 (« Les Montagnards »); 17 mars 1924, p. 13 (« Vive la Canadienne »); 28 avril 1924, p. 7 (« La Madelon »).
  88. Publicité des cigarettes « Turret », Le Soleil, 20 avril 1932, p. 10.
  89. Roger Lemelin, Autopsie d’un fumeur, Montréal, Alain Stanké, 1988.
  90. Voir par exemple, Michèle Martin, « Modulating Popular Culture: Cultural Critics on Tremblay’s Les Belles-Sœurs », Labour/ Le Travail, automne 2003, p. 109–135.
  91. Cox, The Global Cigarette.

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